Commentaire d'arrêt, Chambre commerciale, Cour de cassation, 27 février 2007, remise en cause du caractère exigible du passif
L'ouverture d'une procédure collective (redressement ou liquidation judiciaire) est fondée sur un critère primordial : l'état de cessation des paiements. En vertu de l'article L. 631-1 du Code de commerce, une entreprise est en état de cessation des paiements lorsqu'il lui est impossible « de faire face à son passif exigible au moyen de son actif disponible ».
Saisi d'office, le tribunal de commerce avait ouvert une procédure collective (ici liquidation judiciaire) à l'encontre de la société Avenir Ivry, laquelle ayant interjeté appel de cette décision, s'est trouvée soumise à une procédure de redressement judiciaire.
Contestant la décision ainsi rendue, la société, en présence de son mandataire, s'est pourvue en cassation au double motif que la juridiction d'appel aurait du rechercher si la commune sur le territoire de laquelle la société était propriétaire de deux immeubles n'avait pas émis son offre de les acquérir au prix correspondant à la valeur retenue par le juge de l'expropriation, de telle sorte que les immeubles auraient ainsi constitué un actif disponible.
[...] Autrement dit, la détermination de l'actif disponible ne peut se faire que par une approche comptable de la situation de l'entreprise. Selon une jurisprudence de la chambre commerciale du 24 mars 2004, l'actif disponible se compose des liquidités, éventuellement des réserves de crédit ou des créances lorsqu'il est avéré qu'elles seront disponibles à très court terme. Dans le cas présent, il n'en est rien. En effet, les immeubles appartenant à la société mise en procédure collective sont des immobilisations au sens comptable du terme. [...]
[...] De plus, aucune poursuite concernant le passif déclaré n'était en cours, de sorte que le passif quand bien même il aurait été exigible, n'était pas exigé. Dans l'arrêt ici commenté, la Cour de cassation dans sa formation commerciale s'est vue confrontée à deux problématiques bien distinctes. D'une part, elle a dû se questionner sur l'exercice de préemption par une commune, sur deux immeubles situés sur son territoire et appartenant à la société débitrice, est-il de nature à permettre d'inclure dans l'actif disponible lesdits immeubles ? [...]
[...] Cette interprétation témoigne d'un retour à la conception classique du passif exigible. Ainsi, la chambre commerciale se positionne en faveur d'une conception stricte du passif exigible admettant malgré tout que l'on puisse retrancher de ce passif exigible le passif faisant l'objet d'un moratoire ainsi que des créances faisant l'objet de contestations. B. La contestation et le moratoire : deux limites à la notion de passif exigible En l'absence de moratoire des créanciers et de contestations relatives au montant et aux caractéristiques ainsi qu'aux caractéristiques du passif, la Cour de cassation en sa formation commerciale n'avait pas à s'interroger sur la passif exigible. [...]
[...] Partant de là, la position de la chambre commerciale semble très cohérente. Même si l'actif immobilisé d'une entreprise est une richesse au même titre que l'actif circulant, seul ce dernier peut être considéré de disponible au regard du droit des entreprises en difficulté. Il a été considéré par la jurisprudence que la vente d'un immeuble n'est pas un événement à réalisation immédiate. Il est vrai qu'une vente induit le respect de conditions tant relatives au fond qu'à la forme. Il convient de s'attacher au droit de préemption invoqué par le débiteur lui même. [...]
[...] La Haute cour refuse de ne pas établir la cessation des paiements du fait de l'inertie des créanciers, mais des éléments objectifs qu'un accord avec les créanciers ou un contentieux sur les créances permette de retrancher certaines créances du passif exigible. Apportons aussi une précision sur la preuve. Il appartient au débiteur d'apporter les éléments de preuve nécessaires et exigés s'il souhaite échapper à l'état de cessation des paiements. [...]
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