Cession de créance, cautionnemement, caution, droits exclusifs, fait du créancier, droit préférentiel
Dans une optique de protection de la caution, le droit contemporain paralyse bien souvent la garantie qu'offre le cautionnement par le jeu de l'article 2037 du C.civ (article 2314 depuis l'ordonnance du 23 mars 2006), « siège du bénéfice de subrogation » (D. 2006 p. 1364, Avena-Robardet). Il décharge la caution lorsque la subrogation aux droits, hypothèques et privilèges du créancier ne peut plus, par le fait de ce créancier, s'opérer en faveur de la caution.
[...] Ce n'est que suite à la mise en liquidation judiciaire de la débitrice qu'elle agit en réclamant à la caution le paiement des sommes dues. De facto, cette dernière l'assigna en demandant sa décharge sur le fondement de l'article 2037, le créancier n'ayant pas exercé sa faculté d'obtenir la cession des créances, l'exposant ainsi à payer une somme largement supérieure à celle qui existait lors de la réalisation de la condition. Les juges du fonds faisant droit à sa demande, la créancière se pourvoit en cassation, soutenant que la cession de créance ne constitue pas un droit préférentiel, que le créancier est libre de choisir le moyen le plus efficace pour obtenir paiement de sa créance, et enfin que la subrogation n'est pas rendu impossible par le fait exclusif du créancier dès lors que la perte du droit litigieux résultait également à un tiers, par le débiteur, des biens financés. [...]
[...] Cela semblait déjà avoir été affirmé, notamment dans un arrêt de la Chambre commerciale du 13 mai 2003. On remarquera toutefois une divergence avec la Première chambre civile. Dans arrêt du 10 juin 2005, la Chambre mixte consacre la position de la Chambre commerciale, mais les faits de l'espèce (le créancier ne s'était pas seulement abstenu de demander l'attribution judiciaire du gage, il avait donné mainlevée du gage) brouillent la portée de l'arrêt. Une gênante absence de limite. Le point gênant de cette jurisprudence : le créancier n'a aucunement promis à la caution qu'il mettrait en œuvre la garantie. [...]
[...] Le créancier semblait donc sincèrement penser pouvoir être totalement désintéressée et agir au mieux dans son intérêt et celle de la caution. La solution du 3 mai 2006, par son manque de nuance, pourrait avoir pour effet de décourager les créanciers d'avoir recours à des opérations pourtant susceptibles d'éteindre la créance sans réveiller la caution. Une solution innovante : l'élargissement du champ de l'ancien article 2037 par la consécration d'une notion nouvelle, « les droits exclusifs ». L'ajout des « droits exclusifs » : une conséquence logique du non exercice d'une faculté comme « fait du créancier ». [...]
[...] On pourrait être tenté de l'assimiler à la notion de « droit préférentiel », d'autant qu'elles ont une caractéristique majeure en commun : elles confèrent « un avantage particulier au créancier pour le recouvrement de sa créance ». Mais pourquoi la Cour les aurait alors cité l'une après l'autre, tel un vulgaire pléonasme ? Il semblerait qu'il ne faille pas s'inquiéter et que tout l'intérêt de la distinction réside dans l'explication développée dans le A. [...]
[...] Le non exercice d'un droit à la cession de créances par la créancier constitue-t-il une faute au sens de l'ancien article 2037 du C.civ ? Dans son arrêt du 3 mai 2006, la Chambre commerciale de la Cour de cassation répond par l'affirmative, confirmant la jurisprudence selon laquelle l'inertie du créancier est susceptible de caractériser un « fait du créancier » au sens de l'ancien article 2037 et innovant en consacrant la notion nouvelle de « droits exclusifs », élargissant ainsi le champ d'application de l'article précité (II). [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture