22 octobre 2009, La responsabilité du fait des choses, cassation, commentaire
Au XIXème siècle, la théorie de la responsabilité du fait des choses restait limitée. Elle n'était envisagée que dans un nombre très minime d'hypothèses prévues par les articles 1385 et 1386 du Code civil. Mais sous l'influence de la doctrine et de la jurisprudence, l'article 13384 est venu créer un principe général de la responsabilité des choses.
En l'espèce, une chute de pierre provenant d'une voute d'un bâtiment appartenant à M. Y, a endommagé le véhicule de M. X. Celui-ci, après expertise, assigne M. Y et son assureur la société Areas dommage, en responsabilité et indemnisation de son préjudice.
Après un procès en première instance, l'affaire est suivie d'un appel. Dans un arrêt du 21 mai 2008, la Cour d'appel de Bordeaux accueille la demande de M. X et condamne ainsi M. Y et son assurance à payer une somme d'argent pour les réparations, et pour le préjudice subit. En effet, la Cour déclare la responsabilité in solidum de M. Y et de son assureur au titre de l'article 1386 du Code civil, car même si le bâtiment a été entretenu et ne possède pas de vice de construction, M. Y reste responsable de l'état général du bâtiment.
L'assureur se pourvoit alors en cassation dans le but que sa responsabilité ne soit pas reconnue, car selon lui, le rapport d'expertise ne met pas en évidence les éléments nécessaires à l'engagement de la responsabilité du gardien de la chose instrument du dommage. En outre, M. X aurait du ramener la preuve du vice de construction qui devrait être à l'origine du dommage.
Par conséquent, quelles sont les conditions nécessaires pour retenir la responsabilité du fait des bâtiments en ruine ? Est-on obligé de se fonder sur l'article 1386 du Code civil pour la responsabilité des bâtiments, ou peut-on utiliser l'article 1384 alinéa 1er ?
Ainsi, selon l'arrêt de rejet de la Deuxième Chambre civile de la Cour de cassation le 22 octobre 2009 : « si l'article 1386 du Code civil vise spécialement la ruine d'un bâtiment, les dommages qui n'ont pas été causés dans de telles circonstances peuvent néanmoins être réparés sur le fondement des dispositions de l'article 1384, alinéa 1, du même code qui édictent une présomption de responsabilité du fait des choses. [...] Il résulte de l'arrêt que c'est de cette voûte que provenaient les pierres dont la chute a endommagé le véhicule ; que la responsabilité de M. Y est dès lors engagée en sa qualité de gardien de l'immeuble ».
De la sorte, la Cour de cassation explique l'existence de plusieurs fondements concernant la responsabilité des bâtiments en ruine (I). Cela aboutie à une évolution jurisprudentielle qui marque une volonté d'indemnisation des victimes (II).
[...] Commentaire d'arrêt Au XIXème siècle, la théorie de la responsabilité du fait des choses restait limitée. Elle n'était envisagée que dans un nombre très minime d'hypothèses prévues par les articles 1385 et 1386 du Code civil. Mais sous l'influence de la doctrine et de la jurisprudence, l'article 13384 est venu créer un principe général de la responsabilité des choses. En l'espèce, une chute de pierre provenant d'une voute d'un bâtiment appartenant à M. a endommagé le véhicule de M. X. [...]
[...] En effet, la Cour déclare la responsabilité in solidum de M. Y et de son assureur au titre de l'article 1386 du Code civil, car même si le bâtiment a été entretenu et ne possède pas de vice de construction, M. Y reste responsable de l'état général du bâtiment. L'assureur se pourvoit alors en cassation dans le but que sa responsabilité ne soit pas reconnue, car selon lui, le rapport d'expertise ne met pas en évidence les éléments nécessaires à l'engagement de la responsabilité du gardien de la chose instrument du dommage. [...]
[...] Avec l'arrêt du 6 octobre 2008 de la Cour de cassation, la notion de ruine vient se resserrer. La ruine ne pourra être reconnue qu'en cas de chute d'un bâtiment ou d'un élément le composant. En l'espèce, les juges ont considérés que les pierres de la voûte une fois tombées, ne faisaient plus partis de la ruine, ce qui vide de sa substance l'article 1386, car les cas de l'application de l'article 1386 deviennent plus que restreint. C'est paradoxal, cet article avait une vocation d'indemnisation. [...]
[...] Donc, normalement, l'article spécial doit s'appliquer en priorité, et ici il s'agit de l'article 1386. Il aurait du donc être appliqué, et l'assureur aurait été exonéré. On peut alors considérer que le juge de cassation commet une erreur de droit Ce qui est paradoxal, puisque le juge de cassation ne juge pas les faits, mais le droit. Mais en réalité, la forte réduction du champ de l'article 1386 conduit à appliquer couramment l'article 1384 du Code civil. Et ceci est fait dans le but d'une indemnisation plus renforcée des victimes. [...]
[...] B Une responsabilité du fait des choses de droit commun Les juges, en l'espèce, vont utiliser la méthode de la substitution de motifs, pour reconnaitre l'application de l'article 1384 alinéa 1. C'est une méthode rare, qui va leur permettre de d'indemniser la victime. Toutefois, cela est très défavorable pour M. Y et son assureur qui auraient du voir leur responsabilité anéantie. Mais cela ne signifie pas pour autant que, même si l'article 1384 est de droit commun, l'article 1386 est abrogé. Il peut encore s'appliquer. Tant qu'un texte n'a pas été abrogé, il a vocation à s'appliquer. Et c'est le législateur qui décide d'abroger une loi. [...]
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