Présomption d'administrativité, bureau d'aide sociale, OPHLM, Meurthe-et-Moselle, jurisprudence
Un contrat conclu entre personnes publiques est-il nécessairement un contrat administratif ?
D'après le Conseil d'Etat, la réponse est négative, comme l'illustre l'arrêt Bureau d'aide sociale de Blénod-lès-Pont-À-Mousson rendu le 11 mai 1990 par les 1ère et 4ème sous-sections réunies.
Si le principe est établi, les critères jurisprudentiels permettant de qualifier un tel contrat de contrat administratif ou d'acte de droit privé le sont moins.
En l'espèce, l'Office public d'habitations à loyer modéré (OPHLM) de Meurthe-et-Moselle avait donné à bail au Bureau d'aide sociale de Blénod-lès-Pont-à-Mousson des bâtiments destinés à abriter un foyer-logement pour personnes âgées.
L'OPHLM jouait dans cette opération un rôle d'intermédiaire transparent : chargé de la construction des bâtiments afin de mettre à profit les conditions de prêt avantageuses dont il pouvait disposer, l'OPHLM était intégralement défrayé par les redevances versées par le bureau d'aide sociale. Le bureau d'aide sociale en vint cependant à considérer la redevance comme excessive.
[...] Qu'entend-on par des rapports de droit privé et quels sont ces objets qui les font naître, à l'exclusion de tout rapport de droit public ? Il semble que dans ses conclusions sous l'arrêt U.A.P, le commissaire du gouvernement Labetoulle ait voulu entendre par là les contrats relatifs à la gestion du domaine privé et les contrats conclus conformément aux usages et aux lois du commerce, notamment les contrats conclus par les établissements publics et commerciaux avec les usagers et entre eux. [...]
[...] En effet, si la jurisprudence U.A.P. a posé la présomption d'administrativité des contrats conclus entre personnes publiques, elle a aussi prévu que cette présomption serait réfragable dans les cas où, eu égard à son objet, [le contrat] ne fait naître entre les parties que des rapports de droit privé. II. Une présomption réfragable : les problèmes posés par l'exception tirée de l'objet du contrat Dans une application contestable de la jurisprudence U.A.P., le Conseil d'Etat considère en l'espèce que la présomption doit être renversée mettant en évidence les contradictions inhérentes à la présomption d'administrativité telle qu'énoncée par le Tribunal des conflits, qui rendront sa remise en cause par la jurisprudence ultérieure inévitable Une application contestable de l'exception prévue par la jurisprudence U.A.P. [...]
[...] Faire du critère organique le facteur premier de la qualification de contrats ne permet pas les nuances nécessaires. En effet, selon leurs besoins, les personnes publiques peuvent préférer voir les contrats passés entre elles qualifiés d'actes de droit privé, supposant un régime égalitaire, ou d'actes de droit public, permettant l'exercice par une partie de ses prérogatives de puissance publiques. Réintroduire un critère matériel par la petite porte, comme le fait la jurisprudence U.A.P., n'est peut-être pas suffisant. L'abandon progressif de cette jurisprudence était donc peut-être nécessaire, et peut- être recherché par le Conseil d'Etat. [...]
[...] En effet, la présomption, comme vu précédemment, cherche à faire du critère organique le facteur premier de la méthode de qualification des contrats conclus entre personnes publiques. Or la référence à un objet du contrat ne faisant naître que des rapports de droit privé entre les parties réintroduit dans l'analyse le critère matériel. Ceci ne poserait pas de problèmes si l'imprécision de l'exception ainsi formulée ne forçait pas le juge à recourir aux critères qu'il connaît, c'est-à-dire aux critères du service public et de la clause exorbitante tels qu'utilisé dans la méthode traditionnelle de qualification des contrats conclus par une personne publique avec une personne privée. [...]
[...] Le Conseil d'Etat commença son analyse en notant que l'objet du contrat était exclusivement financier puis observa qu'il n'avait pas pour objet l'exécution d'une mission de service public et enfin qu'il ne comportait aucune clause exorbitante. Il en conclut que ce contrat ne faisait naître entre ces parties que des rapports de droit privé et n'était donc pas un contrat administratif. Ne sachant à quoi se rattacher pour décider de si le contrat ne fait naître entre les parties que des rapports de droit privé, le juge utilise les critères du service public et de la clause exorbitante, que la jurisprudence U.A.P. cherchait justement à contourner. [...]
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