Cassation, 3ème chambre civile, 23 septembre 2009, pacte de préférence, commune, terrain, lot communal
Le pacte de préférence est l'engagement de réserver la préférence au bénéficiaire, si l'on décide de vendre ou d'acheter, et de lui faire donc en priorité une proposition dans ce sens avant de s'adresser ailleurs.
En l'espèce, une commune a vendu le 23 mai 2003 un lot immobilier dans un lotissement communal à M. X et Mme Y. L'acte de vente comportait une clause qui prévoyait que si le couple désirait revendre ce lot dans les vingt ans qui suivaient, ils devraient proposer le rachat en priorité à la commune. Cette clause indiquait également que le prix de revente ne devait pas excéder celui de d'acquisition initial, réactualisé en fonction de l'indice INSEE. M. X et Mme Y, qui n'ont pas respectés cette clause, ont signé un compromis de vente pour ce terrain le 21 octobre 2006. La commune les a alors avisé qu'elle souhaitait exercer son droit de propriété.
M. X et Mme Y ont alors assigné la commune en justice afin de faire annuler cette clause qui selon eux, donnait profit à la collectivité locale. Après un jugement en première instance, la Cour d'appel de Pau les a déboutés le 24 avril 2008 en indiquant que la durée de cette clause était de vingt ans, et que les vingt ans n'étaient pas encore écoulés. Le couple se pourvoi donc en cassation car il estime qu'une telle clause constitue une atteinte au droit de propriété lorsque l'engagement est de vingt ans.
Ainsi, les pactes de préférence ont-ils une durée limitée ? Une durée trop longue serait-elle une atteinte au droit de propriété, et pourrait-elle être frappée de nullité ?
La Cour de cassation, dans un arrêt de rejet de la Troisième Chambre civile du 23 septembre 2009 estime que : « la stipulation avait été librement convenue, qu'elle avait pour but, en fixant d'ores et déjà un prix, institué pour une durée de vingt ans, d'empêcher la spéculation sur le bien dans un contexte marqué par la rareté de l'offre et le "décrochage" des possibilités financières de la plupart des ménages par rapport à l'envolée des prix de l'immobilier, et que M. X... et Mme Y... avaient bénéficié en contrepartie de son acceptation de la possibilité d'accéder à un marché protégé de la spéculation immobilière, la cour d'appel, qui a retenu à bon droit que les modalités stipulées, notamment quant à la durée de validité de la clause, n'étaient pas, au regard de la nature et de l'objet de l'opération réalisée, constitutives d'une atteinte au droit de propriété, en a exactement déduit que la demande en nullité devait être rejetée ».
On peut remarquer ici que la Cour de cassation procède à un contrôle de proportionnalité entre la durée du pacte de préférence et entre sa nature et son objet. Ainsi, la Cour de cassation indique que la durée du pacte de préférence relève d'un accord mutuel (I), mais aussi qu'il s'agit d'une compensation (II).
[...] A défaut, les parties auraient pu renégocier cette durée, car les parties sont libres de déterminer la durée d'un pacte de préférence. Les acquéreurs auraient dû savoir que cette clause allait créer des obligations envers chacune des parties. En effet, le pacte de préférence oblige le souscripteur à donner la préférence au bénéficiaire. Le pacte de préférence créer donc à la charge du souscripteur une obligation de faire. Il a donc pour effet de réduire le droit de disposer de la chose du souscripteur. [...]
[...] Mais cette durée est également une contrepartie de l'acquisition initiale. B – Une contrepartie de l'acquisition initiale La commune, souhaitant garantir des prix en dehors de toute spéculation immobilière, a donc vendu le terrain à M. X et Mme Y à un prix bas. Le prix réduit nécessite donc bien une concession des acquéreurs, qui devront le revendre ensuite à la commune à la même valeur qu'il l'on acheté. S'ils souhaitaient vraiment acheter un bien immobilier à un prix préférentiel, ils devaient être prêts à devoir accepter une contrepartie, qui était en l'espèce la durée de vingt ans du pacte de préférence. [...]
[...] On remarque que donc, à défaut de durée, le promettant semble indéfiniment tenu envers le bénéficiaire ou ses héritiers, même trente ans après la conclusion de ce pacte. Il s'agit d'une solution favorable au bénéficiaire mais très défavorable au souscripteur du pacte. En l'espèce, le pacte était assorti d'une durée de vingt ans. Et finalement on peut penser que cette aussi longue durée a presque les mêmes effets qu'aucune durée du tout, puisque cette stipulation est très défavorable pour les promettants. Néanmoins, bien que contraignante, cette durée a été soumise à la liberté contractuelle. B – Une certaine liberté contractuelle face à cette clause M. [...]
[...] Il y a seulement deux conditions pour former un pacte de préférence. Il faut tout d'abord que son objet soit suffisamment déterminé, c'est-à-dire que le bien concerné doit être désigné avec précision, mais aussi que la nature de l'acte soit indiquée (en l'espèce il s'agit d'une vente). Il faut également que les modalités de fonctionnement prévues laissent en toutes circonstances au souscripteur la possibilité de traiter ailleurs si le bénéficiaire décline l'offre. Ainsi, la stipulation d'une durée de validité n'est pas une condition de la validité du contrat, comme l'a rappelé la Chambre commerciale de la Cour de cassation le 15 octobre 2002, puis la Troisième chambre civile le 15 janvier 2003. [...]
[...] Ainsi, les pactes de préférence ont-ils une durée limitée ? Une durée trop longue serait-elle une atteinte au droit de propriété, et pourrait-elle être frappée de nullité ? La Cour de cassation, dans un arrêt de rejet de la Troisième Chambre civile du 23 septembre 2009 estime que : « la stipulation avait été librement convenue, qu'elle avait pour but, en fixant d'ores et déjà un prix, institué pour une durée de vingt ans, d'empêcher la spéculation sur le bien dans un contexte marqué par la rareté de l'offre et le "décrochage" des possibilités financières de la plupart des ménages par rapport à l'envolée des prix de l'immobilier, et que M. [...]
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