Commentaire arrêt fragonard
En matière de vente d‘œuvres d‘art, les incertitudes qui planent quant à l‘authenticité de certaines pièces compliquent souvent l‘appréciation d‘une erreur éventuelle sur la substance. L‘arrêt rendu par la 1ère chambre civile de la Cour de Cassation le 24 mars 1987 illustre bien ces difficultés.
[...] La réalité est différente de la conviction et peut s'apprécier à tout moment. ▪ On pouvait donc en déduire que si l'aléa intervient avant ou au moment du contrat, il n'y a pas lieu d'invoquer une erreur chez une quelconque partie. Confirmation postérieure que la nullité ne peut être invoquée en cas d'aléa entrant dans le champ contractuel ▪ Cette position se confirme par la suite notamment dans l'arrêt en date 28 mars 2008 rendu par la 1ère chambre civile la Cour de cassation. [...]
[...] Cette conviction aléatoire incluait donc la possibilité d'une erreur. Mais cette erreur n'a été confirmée qu'après la formation du contrat, donc le consentement ne pouvait pas être vicié au moment du contrat. ▪ On ne peut donc invoquer une erreur qui apparaîtrait une fois le contrat définitivement formé. L'erreur est cause de nullité en tant qu'elle vicie le consentement, ceci seulement au moment de la formation du contrat. « L'aléa chasse l'erreur », un principe jurisprudentiel bien installé Déduction a contrario d'un principe ébauché dans l'affaire Poussin ▪ Dans l'affaire Poussin (arrêt de la Cour de Cassation en date du 13 décembre 1983), l'aléa était intervenu non au moment du contrat mais après sa formation [du contrat]. [...]
[...] Par un arrêt confirmatif du 12 juin 1985, la cour d'appel de Paris a rejeté leur demande d'annulation. Ils ont alors formé un pourvoi en cassation, arguant que la Cour d'appel s'était seulement basée sur l'interprétation objective de l'expression « attribué à », sans rechercher de manière subjective la conviction exacte du vendeur, qui selon eux était erronée, et donc source d'un vice du consentement. Cette affaire pose donc la question suivante : l'erreur substantielle peut-elle être reconnue en tant que vice du consentement entrainant de ce fait la nullité du contrat lorsqu'il existe un aléa sur la substance de la chose au moment de la signature du contrat ? [...]
[...] ▪ Il faut cependant noter que tout aléa n'est pas exclusif d'une erreur, puisque si le contractant peut envisager plusieurs qualités pour la chose, il y aura erreur si la réalité se révèle incompatible avec toutes ces qualités. L'exclusion d'une erreur sur la substance ▪ La conviction doit être exclusive de l'erreur, c'est-à-dire interdire ou imposer telle ou telle réalité. ▪ Or ici, on a consenti sous la conviction que la toile pouvait ou ne pouvait pas être de Fragonard. [...]
[...] ▪ Une erreur sur la valeur ne peut donc être invoquée en droit français. En l'espèce, bien que le fait que le tableau se révèle être un Fragonard augmente considérablement sa valeur, c'est justement sa substance qui fait sa valeur. L'erreur sur la substance, source de vice du consentement ▪ Elle sanctionne un consentement non éclairé en tant qu'elle porte « sur la substance de la chose lorsqu'elle est de telle nature que sans elle la partie n'aurait pas contracté » (conception subjective des qualités substantielles de la chose : le juge se base sur la psychologie de l'acteur, en jugeant au cas par cas pour savoir si la qualité est jugée comme substantielle par la partie). [...]
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