La loi du 5 juillet 1985 est une loi de rupture, une loi procédant à un choix de société. Son objectif est d'assurer aux victimes d'accidents de la circulation une meilleure indemnisation. Mais il en va différemment lorsque la victime a également la qualité de conducteur fautif. Ainsi l'article 4 de la loi dispose que « la faute commise par le conducteur du véhicule terrestre à moteur a pour effet de limiter ou d'exclure l'indemnisation des dommages qu'il a subis ». En application de ce texte, la victime conductrice est donc traitée moins favorablement que la victime non conductrice dont le droit à indemnisation ne peut être réduit qu'en raison de sa faute inexcusable, à condition en outre que celle-ci ait été la cause exclusive de l'accident. C'est ainsi que les conducteurs ont pu être considérés comme « les mal-aimés de la loi de 1985 ».
[...] Pourtant, l'arrêt rendu par la Chambre mixte le 28 mars 1997 énonçait que la faute de l'article 4 devait être appréciée en fonction de son rôle dans la réalisation du préjudice et non de l'accident. Mais cet arrêt n'a pas empêché les juridictions du fond de continuer à apprécier la faute du conducteur par rapport au rôle qu'elle a joué dans l'accident. En effet, hormis les cas où la faute à un lien direct avec le dommage ( par exemple l'absence de port de casque pour un motard ou de ceinture de sécurité pour un conducteur de véhicule à quatre roues voire excès de vitesse aggravant les blessures), comment apprécier cette faute, sinon par rapport à l'accident? [...]
[...] Toute faute de la victime conductrice va pouvoir lui être opposée pour réduire ou exclure sa réparation. D'après les dernières jurisprudences, il faut simplement que la faute du conducteur soit la cause du dommage de ce dernier. Les juges du fond sont compétents pour apprécier le montant de la diminution de l'indemnisation de la victime conductrice, même si la Cour de cassation se réserve le droit d'exercer son contrôle sur la qualification de la faute en elle-même. Dès lors quelles caractéristiques doit présenter la faute du conducteur? [...]
[...] Dans ce contexte, un comité d'experts de la communauté européenne avait énoncé la volonté de passer de la théorie fondée sur la faute à une théorie fondée sur le risque, destinée à accroître un sentiment de responsabilité personnelle chez le conducteur Notons que cette théorie du risque a été adopté par la loi espagnole du 29 octobre 2004 et des lois allemandes, canadiennes et américaines s'en inspirent. Mais c'était sans compter avec la résistance des tribunaux français et d'une partie de la doctrine, qui demeurent très attachés à la causalité. [...]
[...] Quant à l'incidence de la faute sur l'indemnisation du conducteur. Dans le cas où le conducteur a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice, son indemnisation peut être soit exclue, soit limitée comme le prévoit l'article cela dépendant de l' appréciation souveraine des juges du fond Il conviendra enfin d'évoquer la controverse autour du régime indemnitaire applicable au conducteur, caractérisé par une injustice flagrante, et son devenir en évoquant les diverses propositions de réforme qui souhaitent aligner le sort des conducteurs victimes sur celui des autres victimes d' accidents de la circulation A. [...]
[...] Le partage est actuellement le suivant: si, au moment du choc avec le véhicule, le conducteur était déjà au sol depuis quelques instants et immobile, il est considéré comme non conducteur. Mais si, au moment du choc, le processus d'éjection n'est pas achevé parce que le conducteur glisse encore au sol et va heurter une voiture ou est heurté alors qu'il n'est pas encore retombé au sol ou juste au moment où il s'immobilise, il conserve la qualité de conducteur. La notion de véhicule terrestre à moteur semble poser moins de difficultés que celle de conducteur. Le véhicule terrestre à moteur exclut donc tout engin qui vole ou qui vogue. [...]
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