Commentaire de l'arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de Cassation en date du 17 novembre 1998
La remise d'un chèque à titre de garantie est fréquemment utilisée en raison de ses avantages pratiques. En effet, elle évite la plupart du temps au débiteur d'avoir à déposer une somme d'argent à titre de garantie. Par ailleurs, cette remise est également favorable au créancier puisqu'elle lui offre une certaine sécurité et lui fournit parfois une arme particulièrement redoutable, comme le prouve l'arrêt de la Chambre commerciale de la Cour de cassation du 17 novembre 1998.
Dès lors, on s'intéressera à l'encaissement du chèque de garantie en lui-même (?) puis à ses conséquences juridiques (??). Ainsi, la Cour de cassation poursuit sa ligne jurisprudentielle sur ce point.
[...] Néanmoins, la chambre commerciale n'a pas opté pour cette approche. Elle préfère appliquer avec rigueur l'article L.131-31 du Code monétaire et financier (ancien article 28 du décret-loi de 1935) qui répute non écrite toute mention contraire à la règle du paiement à vue. Ceci a pour conséquence que le délai de présentation d'un chèque de garantie, comme celui d'un chèque ordinaire, est de huit jours à compter du jour porté sur le chèque comme date d'émission (CA Paris mars 1993). [...]
[...] En effet, conformément à la Convention de Genève qui ne fait pas de l'existence de la provision une condition de validité du chèque, la chambre commerciale a admis dans un arrêt du 12 janvier 1993 qu'un chèque n'est pas nul par le fait que son bénéficiaire serait informé de l'absence ou de l'insuffisance de la provision lors de l'émission. Ainsi, notre droit interne à l'article L.131-4 du Code monétaire et financier prévoit que l'existence d'une provision lors de l'émission du chèque est obligatoire, néanmoins son absence n'est pas sanctionnée par la nullité du chèque. La cour d'appel de Colmar dans un arrêt du 18 juin 1996 avait également adopté cette position. Dès lors, dans cet arrêt de 1998 la Haute juridiction maintient sa ligne jurisprudentielle sur la validité de ce type de chèques. [...]
[...] Deux justifications sont alors envisageables. Soit la chambre commerciale considère que l'utilisation frauduleuse suppose une altération du chèque. Soit parce qu'elle considère que la présentation à l'encaissement ne peut pas en constituer une utilisation frauduleuse dans la mesure où celui qui remet un chèque de garantie s'expose nécessairement à son éventuel encaissement. Cette seconde justification, fondée sur l'article 28 du décret du 30 octobre 1935, parait être la plus vraisemblable. La chambre commerciale dans un arrêt en date du 24 octobre 2000 a explicitement consacré que la mise en paiement du chèque de garantie n'est pas frauduleuse. [...]
[...] Ainsi, le chèque est un instrument de paiement fondé sur la création d'un titre négociable. Autrement dit, ce titre est transmissible selon des procédés simplifiés d'endossement ou de tradition dérogeant aux règles de la cession de créance de 1690 du Code civil. En effet, le chèque est un écrit par lequel une personne, le tireur, donne l'ordre à un établissement de crédit, le tiré, de payer à vue une certaine somme à une troisième personne, le bénéficiaire ou porteur, ou à son ordre. [...]
[...] De plus, le fait que le montant de sa dette vis-à-vis du bénéficiaire du chèque soit inférieur au montant de ce dernier n'empêche pas son bénéficiaire de le présenter à l'encaissement. Cette différence de montant impose seulement au bénéficiaire de restituer au tireur la différence entre les deux sommes. La chambre commerciale reprend ainsi une solution déjà énoncée dans un arrêt en date du 22 juin 1993. Dès lors, P. Crocq considère qu'il s'agit d'une application du principe selon lequel, comme toute sûreté, l'aliénation fiduciaire à titre de garantie de la provision, réalisée par le biais du chèque, ne peut pas être une source d'enrichissement injuste pour le créancier. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture