Le jus cogens et les droits et libertés fondamentales, dissertation de droit des libertés fondamentales de 10 pages
Plusieurs droits et libertés fondamentaux, principalement des droits de l'Homme au niveau international, ?mériteraient? d'atteindre le statut de norme de jus cogens car celle-ci est la norme supérieure et indérogeable par excellence seulement quel intérêt cela présente-il si cela ne rend pas plus effective leur application ? Le problème majeur est que nous sommes en présence d'une matière éminemment politique et que les Etats, très différents, restent bien trop frileux pour prendre un risque quelconque. Ce problème accompagné de critiques théoriques amène alors à mettre en doute la pertinence du recours au jus cogens en matière de droits et libertés fondamentaux (I) mais l'élévation de tels droits et libertés au rang de normes impératives du droit international général bien que lente, ardue et semée d'embûches a eu lieu, reste faisable et relève de l'évolution du droit international (II) .
[...] Les uns soutiendront que la liberté de la presse doit être considérée comme une règle de jus cogens et les autres non, les autres défendront férocement l'idée que le droit à l'avortement est impératif et indérogeable mais pas les uns etc. Malgré ces divergences, certains droits sont repris de façon récurrente par les différents auteurs et sont alors reconnus en tant que normes du jus cogens. C'est à force de répétitions et de réaffirmations que l'élévation aura lieu, d'abord au sein de la doctrine puis au niveau étatique. Les traités internationaux ont bien sûr contribué à ces efforts même si le caractère du jus cogens n'est souvent reconnu qu'implicitement par les Etats. [...]
[...] Cette reconnaissance résulte de jurisprudences successives, plus particulièrement de la Cour européenne des droits de l'Homme ; celle-ci a “découvert” ce caractère progressivement. D'abord dans l'arrêt Soering du 7 juillet 1989 où elle énonce que l'article 3 CEDH constitue une prohibition absolue [consacrant] l'une des valeurs fondamentales des sociétés démocratiques 88) puis dans l'arrêt Selmouni France du 28 juillet 1999 où elle reprend les termes de l'arrêt Soering et enfin, la consécration, dans l'arrêt Al-Adsani Royaume-Uni du 21 novembre 2001 où, je cite, elle admet sur la foi des précédents jurisprudentiels, que l'interdiction de la torture est devenue une règle impérative du droit international Après avoir étudié l'état du droit positif, il convient maintenant de s'attacher à ce que nous réserve l'avenir. [...]
[...] Il convient ici d'opérer une comparaison entre la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 (CEDH), la Convention américaine relative aux droits de l'Homme du 22 novembre 1969 (CADH) et le Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 (PIDCP). Ces trois textes appliquent la technique du noyau dur : la CEDH compte cinq droits auxquels aucune dérogation n'est permise (droit à la vie article droit de ne pas être torturé et de ne pas subir des traitements inhumains ou dégradants article droit de ne pas être tenu en esclavage ou en servitude article 4 droit à la non-rétroactivité de la loi pénale article 7 et règle non bis in idem article 4 du Protocole la CADH onze (droit à la reconnaissance de la personnalité juridique article droit à la vie article droit de ne pas être torturé et de ne pas subir des traitements inhumains ou dégradants article 5 droit de ne pas être tenu en esclavage ou en servitude article droit à la non-rétroactivité de la loi pénale article droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion article 12, droit à la protection de la famille article 17, droit à un nom article 18, droits de l'enfant article 19, droit à une nationalité article 20 et droits politiques article 23) et le PIDCP sept (droit à la vie article droit de ne pas être torturé et de ne pas subir des traitements inhumains ou dégradants article droit de ne pas être tenu en esclavage ou en servitude article 8 droit de ne pas aller en prison pour dette article 11, droit à la non-rétroactivité de la loi pénale article 15, droit à la reconnaissance de la personnalité juridique article 16 et droit à la liberté de pensée, de conscience et de religion article 18). [...]
[...] La notion de jus cogens régional est critiquable et critiquée mais les conditions de survenance, d'application et d'éventuelle modification ou disparition sont les mêmes à la seule différence que la zone géographique est plus réduite. Nous considérons donc que celui-ci est une réalité et, pour illustrer cette réalité, nous invoquons les conventions régionales précitées. Au niveau régional, le jus cogens est composé, dans leur région respective, de tous les droits qu'elles considèrent chacune comme intangibles et pas seulement des quatre qu'elles ont en commun. [...]
[...] Prenons l'exemple du droit à la vie. Ce droit est considéré comme un droit fondamental par certains Etats qui seraient susceptibles de l'élever au rang de norme du jus cogens mais d'autres ne sont pas prêts à franchir ce cap car ils estiment être compétents pour sanctionner certains crimes par la peine de mort. La peine de mort s'oppose au droit à la vie or si ce dernier était qualifié de norme impérative du droit international, il serait par là même indérogeable, les Etats ayant la peine de mort comme sanction possible violeraient donc le droit international. [...]
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