Le juge n'est-il que la bouche de la loi?
[...] Il le fait à travers ses représentants, les députés (les législateurs), dont la légitimité et la force vient de leur statut d'élus. La loi est donc toute-puissante puisqu'elle résulte d'une volonté légitime, puisqu'elle est, comme l'affirme justement l'article 6 de la Constitution de 1789, l'expression de la volonté générale Cette assimilation totale de la volonté générale et de la volonté du législateur en théorie, donné un rôle exclusif de créateur à ce dernier et relégué le juge au rôle d'instrument d'application de la loi. [...]
[...] Ils ne seraient sans doute pas nécessaires. Leur existence-même prouve donc que cette vision du rôle du juge est réductrice et simplifie beaucoup le fonctionnement de la justice. En réalité, le juge ne se contente pas d'appliquer la loi telle que l'a édictée le législateur : il la recrée d'une certaine manière par son travail de jurisprudence et l'encadre et/ou l'oriente fortement par le contrôle qu'il peut, dans certains cas, en faire En effet, le juge dispose indirectement mais indiscutablement d'un certain pouvoir créateur vis-à-vis de la loi. [...]
[...] Ensuite, il doit interpréter la loi, et éventuellement la préciser en définissant concrètement des termes flous et sans valeur normative comme l' intérêt de l'enfant ou la notion de bonne foi Tout en s'appuyant bien sûr sur les textes, le juge va donc donner sa propre lecture de la loi dans ses décisions. Cette lecture est cependant globalement unifiée par le contrôle que peut faire la Cour de Cassation des décisions rendues en dernier ressort par les juridictions inférieures, lorsqu'elle est saisie par l'une des parties en procès. Au-delà, le juge peut arriver à créer directement du droit. [...]
[...] Le fait que cette décision soit sans recours appuie l'idée que le Parlement n'est pas tout puissant et que la loi ne peut lui être totalement identifiée. A un niveau supranational, c'est la Cour de Justice des Communautés Européennes et la Cour Européenne des Droits de l'Homme qui imposent leur volonté au législateur national, du fait de la supériorité des traités internationaux sur les lois ordinaires dans la hiérarchie des normes. Pourrait-on dire qu'elles dictent la loi au législateur ? [...]
[...] On peut retrouver cette même intrusion du juge dans le domaine de la loi dans le contrôle de conventionalité. Par celui-ci en effet, non seulement le juge (judiciaire depuis l'arrêt Jacques Vabre de la Cour de Cassation du 24 avril 1975 et administratif depuis l'arrêt Nicolo du Conseil d'Etat du 20 septembre 1989) n'est pas un instrument passif de la loi puisqu'il contrôle que les lois ordinaires sont bien conformes aux traités internationaux signés et ratifiés par la France (rôle de surveillance), mais il est aussi capable d'écarter une loi si celle-ci est contraire à un traité (notamment la Convention européenne des Droits de l'Homme, mais aussi, bien sûr, les traités de l'Union européenne). [...]
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