Quel est l'intérêt juridique de distinguer droit et liberté, droits et libertés et droits fondamentaux et libertés fondamentales ?
[...] Quel est l'intérêt juridique de distinguer droit et liberté, droits et libertés et droits fondamentaux et libertés fondamentales ? D'un point de vue strictement sémantique, le passage de l'expression « droits et libertés publiques » à l'expression « droits et libertés fondamentaux » ne semble constituer qu'un simple changement de terminologie. Ainsi, ce glissement d'une expression vers l'autre pourrait être dépourvu d'effets sur l'ensemble des normes juridiques, et, en ce sens, les auteurs de manuels qui modifient le titre de leurs ouvrages ne céderaient qu'à l'air du temps terminologique. [...]
[...] En ce sens, le glissement vers les droits fondamentaux et libertés fondamentales peut permettre de légitimer l'exercice du pouvoir. Car la référence à la fondamentalité des droits ou libertés s'inscrit dans un mouvement d'harmonisation des différents ordres juridiques et de rapprochement de l'ordre juridique français avec les ordres européens et notamment avec la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et la CEDH. [...]
[...] Si certains enseignants ont refusé de se plier à cette tendance pour le nom de leurs manuels comme les professeurs P. Wachsmann, ou J. Rivero, une grande majorité abandonne l'intitulé traditionnel au profit de la nouvelle terminologie - c'est le cas notamment des professeurs L. Favoreu ou M. Delmas Marty. Cette diffusion accélérée à partir des années 1990 s'illustre également par l'article 8 de l'arrêt du 29 janvier 1998 qui dispose que l'épreuve d'exposé-discussion de l'examen d'entrée aux Centres Régionaux de Formation Professionnelle d'Avocats est constituée désormais d'un sujet relatif à la protection des libertés et droits fondamentaux. [...]
[...] La distinction entre « droits ou libertés publiques » et « droits fondamentaux et libertés fondamentales » peut également avoir pour conséquence une légitimation du pouvoir normatif. Lorsque le travail parlementaire fait référence aux droits fondamentaux ou libertés fondamentales sans les préciser, il confère indirectement aux juridictions - à ceux qui interprètent la loi - le pouvoir de décider des droits ou libertés qui en relèvent. Lorsque les juridictions créent eux-mêmes une catégorie de droits fondamentaux ou libertés fondamentales - à l'instar du Conseil constitutionnel - d'une certaine manière elles s'auto-attribuent la capacité d'identifier les droits ou libertés qu'elles jugent fondamentaux et de leur appliquer un régime juridique particulièrement bénéfique et protecteur. [...]
[...] Le Conseil y a notamment inclus le droit de la défense, la liberté individuelle, la liberté d'aller et venir ou encore la liberté de mener une vie familiale normale par exemple. Enfin, les droits et libertés fondamentaux ont été progressivement consacrés au niveau législatif. Plusieurs lois font aujourd'hui référence au caractère fondamental des droits et libertés. Parfois, la loi proclame fondamental un droit, le plus souvent dans les premiers articles, pour exprimer une volonté politique de lui conférer un régime particulier. [...]
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