Ch mixte 25.05.2006 pacte de préférence annulation substitution connaissance du pacte de par le tiers
Sorte de droit de préemption conventionnel, le pacte de préférence se définit plus précisément comme « une convention par laquelle un promettant s'engage, pour le cas où il se déciderait à conclure un contrat donné, à en faire prioritairement la proposition au bénéficiaire ». Le pacte de préférence est considéré par F. Terré comme le « moins contraignant des avant-contrats ». En effet, alors que le promettant, dans une promesse unilatérale, de vente par exemple, donne un consentement actuel et irrévocable à la conclusion du contrat, le débiteur d'un pacte de préférence s'engage seulement à proposer son bien au bénéficiaire dans l'hypothèse où il se déciderait à vendre.
Malgré son caractère peu contraignant, le pacte de préférence a fait l'objet de nombreuses décisions jurisprudentielles. Si la question de sa nature juridique a d'abord été soulevée devant les juges, s'accordant désormais à en faire un contrat sui generis, c'est surtout le problème des sanctions résultant de sa violation qui entrainé un large contentieux.
La Cour de cassation, de jurisprudence constante n'admettait, jusqu'en 2006, que l'octroi de dommages-et-intérêts pour le bénéficiaire lésé du pacte de préférence, à l'encontre du tiers acquéreur, et ce, sur le fondement de la lettre même de l'article 1142. En cas de connaissance du pacte par le tiers, et de la volonté du bénéficiaire de s'en prévaloir, la nullité pouvait être prononcée.
Pourtant, les bénéficiaires de pacte de préférence n'étaient pas pleinement satisfaits de ces sanctions, revendiquant surtout le droit d'être substitués aux tiers acquéreurs, comme le démontre parfaitement l'arrêt soumis à notre étude.
En l'espèce, un pacte de préférence inclu dans une donation partage de 1957 donne priorité à Mme A en cas de vente d'un bien immobilier. Une parcelle de ce bien fait ensuite l'objet d'une autre donation-partage, mentionnant l'existence du pacte de préférence. Le bien est enfin vendu à la SCI Emeraude, en 1985, via un acte notarié dressé par M. B.
Mme X, attributaire du pacte de préférence stipulé en 1957, invoque alors sa violation, et demande, en sa qualité de bénéficiaire, d'être substituée dans les droits de l'acquéreur, et, subsidiairement, d'obtenir paiement de dommages et intérêts.
[...] Au contraire, lorsque le tiers est de mauvaise foi, des sanctions peuvent également être prononcée à son encontre, en vertu de l'opposabilité des conventions. La connaissance du pacte de préférence, exigée par la cour de cassation, de longue date d'ailleurs (Req avril 1902), est donc tout à fait fondée, et s'inscrit parfaitement dans l'application des principes d'opposabilité et d'effet relatif des conventions. En l'espèce, le pacte de préférence a été mentionné dans les différents actes de donation-partage, et a fait l'objet d'une publication à la conservation des hypothèques. [...]
[...] Ainsi, la levée d'option postérieure à la rétraction de la promesse par le promettant ne pouvait entrainer que le paiement d'une indemnité pécuniaire. Un arrêt de la troisième chambre civile du 25 mars 2009 est venu confirmer cette position. Dans ce cas d'espèce, les juges de second degré avaient ordonné la réalisation forcée de la vente, malgré la rétractation du promettant. Cette sanction a été censurée par la Haute Cour. Seule une disposition expresse incluse dans la promesse de vente semblerait permettre la réalisation forcée de celle-ci. [...]
[...] Le bénéficiaire d'un pacte de préférence est ainsi en droit d'exiger l'annulation du contrat passé avec un tiers et d'obtenir sa substitution à l'acquéreur Or, l'annulation se définissant comme l'anéantissement rétroactif de l'acte, comment le bénéficiaire pourrait-il être substitué dans les droits d'une partie à un contrat qui n'existe plus ? Le maintien du contrat suivi de la substitution serait donc plus pertinent de ce point de vue. Une autre solution pourrait consister en la nullité, suivie d'une cession forcée et non d'une substitution. [...]
[...] Malgré son caractère peu contraignant, le pacte de préférence a fait l'objet de nombreuses décisions jurisprudentielles. Si la question de sa nature juridique a d'abord été soulevée devant les juges, s'accordant désormais à en faire un contrat sui generis, c'est surtout le problème des sanctions résultant de sa violation qui entrainé un large contentieux. La Cour de cassation, de jurisprudence constante n'admettait, jusqu'en 2006, que l'octroi de dommages-et-intérêts pour le bénéficiaire lésé du pacte de préférence, à l'encontre du tiers acquéreur, et ce, sur le fondement de la lettre même de l'article 1142. [...]
[...] Au contraire, la fraude, elle pourrait justifier la sanction proposée par les juges du Quai de l'Horloge. Dans cette hypothèse, il s'agit d'éviter que le but des fraudeurs soit atteint, la substitution permet donc de mettre en œuvre la situation que le débiteur, en contractant avec un tiers, souhaitait éviter. Enfin, la substitution est une sanction contestable en elle-même. L'objet d'un pacte de préférence suppose de négocier en priorité avec le bénéficiaire dans le cas où le promettant accepterait de conclure un contrat donné. [...]
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