Dans un arrêt du 17 octobre 1995, la Chambre commerciale de la Cour de cassation a dû statuer sur la qualification d'un tableau, oeuvre d'art originale, afin de savoir s'il devait lui être appliqué le régime fiscal des meubles meublant.
[...] Mais cette conclusion revient à se focaliser sur les qualités premières du tableau, loin de la réflexion menée par la Cour de cassation lors de la qualification des biens. B - La prépondérance de la situation de l'objet sur sa nature dans l'opération de qualification En l'espèce, les juges n'ont pas fait prévaloir la valeur réelle du tableau, mais ont fondé sa qualification sur sa destination, sur l'utilisation qu'en fait le propriétaire. Ainsi, elle a rejeté l'argument que le tableau pourrait faire partie d'une collection de tableaux exposés et a uniquement retenu l'usage qui en était fait lorsqu'a éclos le litige, à savoir orner l'appartement de l'ancien propriétaire décédé et celui de son héritier. [...]
[...] En effet en considérant que le tableau litigieux est un meuble meublant, l'article 261-I du Code général des impôts s'applique, permettant d'évaluer la valeur de l'ensemble des meubles meublants à de celle de l'immeuble où il se trouve. S'il était considéré comme un œuvre d'art, l'article 764-II du Code précité exigerait une imposition sur sa valeur réelle, qui ne peut être estimée inférieure à l'évaluation qui en a précédemment été faite lors de contrats ou conventions. En appliquant les dispositions du Code civil et en niant toute autonomie à celle du Code général des impôts, la Cour de cassation permet donc au contribuable d'être moins imposé, et cela lui évite un redressement des droits de succession. [...]
[...] Ce droit est notamment composé de l'abusus, soit le droit de disposer de la chose, qui peut se comprendre comme celui d'en transmettre la propriété par toutes conventions, et notamment par la donation. Cette solution jurisprudentielle serait alors en marge de volontés politiques qui semblent au contraire souhaiter pénaliser l'enrichissement par l'héritage qui est actuellement la principale source de transmission des richesses, au profit d'une certaine équité qui voudrait que la majorité du patrimoine soit acquis par les rémunérations ou l'épargne issues d'un travail. [...]
[...] Cependant, la Cour de cassation applique une solution déjà dégagée par une décision du Conseil d'Etat du 22 juillet 1977 selon laquelle, et comme l'a rappelé le professeur Cozian, sauf dispositions contraires le texte fiscal doit être compris à la lumière du droit commun. Ainsi les règles civiles s'appliquent au droit fiscal. Suivant cette hypothèse, les juges civils ont pu relever que l'article 261-I évoquant les meubles meublants sans en donner de définition expresse, il leur fallait se référer à l'article 534 du Code civil. Selon ce dernier et son interprétation jurisprudentielle, le tableau litigieux est donc qualifié de meuble meublant. [...]
[...] La Chambre commerciale estime donc que, n'étant pas prétendu que M. Tenoudji ait possédé une collection de tableaux ou que le tableau en question n'ait pas orné son appartement, il convient de le qualifier de meuble meublant au sens de l'article 534 du Code civil. Une conception réaliste dans l'application des règles ambigües de qualification des meubles. Certaines qualifications de meubles ne sont pas aisées, les mots et les conditions choisies par le législateur pouvant être interprétés de différentes manières ; laissant aux juges la possibilité de faire prévaloir une approche favorisation la situation du bien plutôt que sa valeur ou ses qualités premières A - La difficulté de qualification de certains meubles Bien que de prime abord la qualification d'un bien entre meuble et immeuble puisse paraître évidente, des difficultés apparaissent dans plusieurs cas particuliers. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture