Le service public est la notion la plus étudiée, la plus discutée, et sans doute la plus importante de tout le droit administratif. Difficile à définir, elle a aussi évolué dans le temps pour acquérir aujourd'hui un sens plus large que lors de sa naissance, il y a plus d'un siècle.
On se trouve en présence d'un service public, soit lorsqu'une mission d'intérêt général est assurée par une personne publique, soit lorsque cette mission est confiée à une personne privée qui est, à cette fin, dotée de prérogatives et soumise à des obligations particulières. Cette définition elle-même témoigne de l'élargissement de la notion aux personnes privées, tournant majeur de l'entre-deux guerres.
De toutes les activités administratives, l'activité de service public est la plus importante. Cela tient à son étendue et à sa diversité. Mais, paradoxalement, c'est une des notions les plus difficiles à cerner. Cette difficulté entraîne des conséquences qui ne se limitent pas au seul domaine pratique. Elle relève même du débat d'idées : quel doit être le rôle de l'Etat dans notre société ?
On doit se demander si l'Etat Providence satisfait mieux le citoyen que l'Etat minimal. Le développement ou la restriction des services publics aussi bien nationaux que locaux ne sont pas exempts de présupposés idéologiques.
Déterminer le domaine du service public rejaillit sur des problèmes importants et actuels. Le restreindre réduirait le nombre de fonctionnaires puisque désormais, depuis l'arrêt Berkani, tous les agents des services publics administratifs (SPA) se sont vus reconnaître ce statut. On peut aussi se demander à quel niveau de collectivité territoriale doit revenir l'exercice d'une compétence. Relève aussi du champs de la définition de service public la situation de l'usager.
Les réponses sont d'autant plus cruciales que la communauté économique n'a pas globalement la même vision que celle du système français qui paraît le plus éloigné de la moyenne européenne. Le traité d'Amsterdam de juin 1997 reconnaît la spécificité et l'utilité des services publics. Les traités, les récentes directives européennes, laissent entrevoir un rapprochement avec la conception française. La communauté européenne parle de mission de service d'intérêt économique général. Il faut que la formule assure à la fois la cohésion et l'ouverture.
Afin d'étudier la notion de service public, nous essaierons tout d'abord de comprendre pourquoi la notion de service public est une notion fondamentale du droit administratif (I), puis nous nous attarderons à donner une définition actuelle de la notion de service public (II).
[...] C'est le cas le plus simple : la personne publique gère le service public. Qu'en est-il quand l'activité est exercée non plus par une personne publique mais par une personne privée ? Il s'agit d'un service public à condition que l'activité soit prise en charge par une personne publique, qu'elle soit en quelque sorte assumée par celle-ci Dans certains cas, l'identification du rattachement à une personne publique se fait sans difficulté. La question est plus délicate quand on se trouve en présence d'organismes purement privés et ne bénéficiant d'aucune dévolution contractuelle du service public. [...]
[...] Le lien absolu entre service public et personne publique est battu en brèche. Très tôt, on remarque que la définition donnée par Duguit est trop large. Toutes les activités des personnes publiques ne méritent pas cette qualification. Une autre évolution se fait dans les années 1930 à partir de l'arrêt CE mai 1938, caisse primaire, aide et protection. Le conseil d'Etat admet que les personnes privées peuvent exercer des missions de service public. S'en est fait de la liaison entre services publics et gestion par les personnes publiques. [...]
[...] Cette définition elle-même témoigne de l'élargissement de la notion aux personnes privées, tournant majeur de l'entre-deux guerres. De toutes les activités administratives, l'activité de service public est la plus importante. Cela tient à son étendue et à sa diversité. Mais, paradoxalement, c'est une des notions les plus difficiles à cerner. Cette difficulté entraîne des conséquences qui ne se limitent pas au seul domaine pratique. Elle relève même du débat d'idées : quel doit être le rôle de l'Etat dans notre société ? On doit se demander si l'Etat Providence satisfait mieux le citoyen que l'Etat minimal. [...]
[...] Dans cette décision, le commissaire du gouvernement a tranché en faveur de la compétence judiciaire et de l'application du droit privé car la colonie africaine exploitait son service de transports par bacs dans les mêmes conditions qu'un industriel ordinaire À partir de là, la gestion privée entraîne la compétence des tribunaux judiciaires, l'innovation est d'étendre la notion de gestion privée et donc la compétence judiciaire des services publics entiers. Ainsi, l'arrêt de 1921 créé donc les services publics industriels et commerciaux. Il peut donc être intéressant de voir sur quels critères se fonde le juge administratif pour opérer cette distinction entre SPIC et SPA. Curieusement, le juge a tardé à dégager ces critères. [...]
[...] Dans l'arrêt Ville de Melun de 1990, le Conseil d'Etat qualifie une activité de service public sans faire référence aux critères de la jurisprudence Narcy. Toutefois, plusieurs arrêts postérieurs à Ville de Melun viennent rappeler que les trois critères cumulatifs sont indispensables. La décision ville de Melun est donc une particularité spécifique à l'espèce. Lors de cette espèce, la prérogative de puissance publique fait défaut, mais malgré tout, le Conseil d'Etat n'abandonne pas ce critère. La haute juridiction prend juste ici en compte l'existence de cas particuliers où le contrôle de la gestion de l'organisme par la puissance publique est tellement intense que le critère de prérogative de puissance publique n'est pas nécessaire pour qualifier une activité de service public. [...]
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