Il reste qu'en dépit de cette évolution protectrice des droits des détenus, l'application de la qualification des mesures d'ordre intérieur est toujours appliquée sur la base de la distinction par le juge entre les mesures qui portent atteinte ou non à une liberté fondamentale de manière substantielle ou/et à la situation juridique et statutaire de la personne concernée, conformément à la jurisprudence Hardouin et Marie.
Sur ce fondement, et à titre d'exemple, continue d'être qualifiée de MOI le refus de remettre un courrier à un détenu, au motif que ce refus ne porte pas atteinte à la liberté de la correspondance. Cette appréciation peut apparaître tout à fait contestable, du point de vue de la garantie des droits et libertés des détenus.
[...] Soit la mesure porte une atteinte substantielle à la situation juridique de l'individu [ex. : dans Hardoin atteinte à la carrière militaire] et alors il y a recevabilité. Pour les mesures non disciplinaires, l'évolution est la suivante : Le placement à l'isolement d'un détenu Le placement d'un détenu en cellule disciplinaire à titre préventif [ex : Conseil d'État mars 2003, Frérot] Dans ces hypothèses, le juge a qualifié ces décisions de MOI, puis, revirement de jurisprudence = Conseil d'État juillet 2003, Garde des Sceaux c/Remli relatif à l'isolement à titre préventif. [...]
[...] : la question du refus de remettre une lettre à un détenu. Alors que le juge a toujours qualifié ce refus de MOI, le tribunal administratif de Toulouse dans un jugement du 2 juillet 2008 estime que la rétention de correspondance est susceptible de recours pour excès de pouvoir, car cette mesure porte atteinte à la liberté de correspondance. De même, il a qualifié de décision le changement d'affectation d'un détenu. Enfin, sous l'influence du commissaire du gouvernement Mathias Guyomard, le Conseil d'État a pris 3 décisions importantes en date du 17 décembre 2008. [...]
[...] Une telle appréciation conduit le CE a estimé que l'administration pénitentiaire et le ministre de la Justice sont dans l'obligation de prendre les mesures nécessaires à la protection de la vie des détenus. Une telle obligation a pour conséquence d'imposer aux directeurs d'établissements pénitentiaires et au ministre de la Justice l'adoption de moyens de protection des détenus et une telle obligation fonde désormais l'évolution du régime de responsabilité, notamment en cas de suicide d'un détenu fondé désormais sur la faute simple (voir infra chapitre sur la responsabilité). [...]
[...] Cette dernière, dès lors qu'elle n'est pas de nature disciplinaire, le juge estimait qu'il s'agissait d'une mesure d'ordre intérieur Conseil d'État février 96, Fauqueux. Puis sous l'influence de la CEDH [arrêt de l'affaire Carlos], le Conseil d'État s'engage vers la recevabilité des mesures non disciplinaires. Dans la jurisprudence Hardouin et Marie, la recevabilité contre les mesures disciplinaires est subordonnée à 2 conditions alternatives que le juge vérifie : Soit la mesure porte atteinte à une liberté fondamentale [ex : dans Hardouin liberté d'aller et de venir] et dans ce cas il y a recevabilité = atteinte substantielle. [...]
[...] Un autre exemple peut être retenu pour mieux analyser les termes du débat : le changement d'affectation d'un détenu d'un établissement pénitentiaire à un autre établissement. Alors qu'une telle décision était qualifiée de mesure d'ordre intérieur, le CE par un arrêt d'assemblée procède à un revirement de jurisprudence par sa décision en date du 14 décembre 2007, Garde des Sceaux c/Boussouar (séance 2 document 12). Ce revirement qui conduit le Conseil d'État à qualifier une telle mesure de décision susceptible de REP est fondé sur le fait que celle-ci a des conséquences sur la situation juridique du détenu. [...]
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