Droit administratif des biens, modes d'acquisition des biens, personnes publiques, règles de droit commun, règles exorbitantes du droit commun
Monsieur BOURVIL, maire de la commune de Maubeuge, veut que le terrain qui lui semble abandonné sur le territoire de sa commune, soit incorporé gratuitement dans le patrimoine de sa commune. La question se pose de savoir si cela est juridiquement envisageable.
Il existe 2 modes d'acquisition des biens par les personnes publiques :
- L'acquisition selon les règles de droit commun
- L'acquisition selon les règles exorbitantes du droit commun
Et ces 2 modes d'acquisition peuvent se faire soit à titre onéreux, soit à titre gratuit.
[...] De même, qu'aucun successible n'est venu réclamer la succession. Le ministre de l'Intérieur ne voulant pas débourser un centime pour l'acquisition du terrain et étant donné qu'il n'est fait mention d'aucun legs ou don et que l'acquisition des biens sans maître se fait prioritairement par les communes, il reste la succession en déshérence, dont seul l'Etat peut en faire l'acquisition en vertu de l'article L 1122-1 du CG3P. Toutefois, la question se pose de savoir si la clause d'exhérédation posée par le de cujus dans son testament fait réellement obstacle à l'acquisition du terrain par l'Etat. [...]
[...] Ensuite, les immeubles ne doivent pas avoir de propriétaires connus. Enfin, les taxes foncières ne doivent plus avoir été acquittées depuis plus de 3 ans ou l'ont été par un tiers. En l'espèce, la succession n'est ouverte que depuis 24 ans, à compter de la mort du propriétaire du terrain. Et l'identité du propriétaire était connue. En conséquence, les conditions ne sont pas réunies pour qualifier le terrain situé sur la commune de Maubeuge, de biens sans maîtres. Donc, le maire de Maubeuge ne pourra pas demander à son conseil municipal de voter une délibération incorporant gratuitement le terrain dans le patrimoine communal. [...]
[...] Ensuite, cette acquisition de la succession en déshérence ne rend pas l'Etat immédiatement propriétaire de la succession. En effet, il doit respecter une certaine procédure : D'une part, il doit être envoyé en possession, comme précédemment décrit. D'autre part, avant de devenir propriétaire, il doit laisser passer un certain délai pendant lequel, seuls les héritiers restés inactifs pourront réclamer la succession et mettre fin à la déshérence. Pour les successions ouvertes après le 01/01/2007, l'héritier resté inactif dispose d'un délai de 10 ans à compter de la date du décès du de cujus, pour agir. [...]
[...] Ainsi, il existe une obligation pour l'Etat de rendre le don lorsque celui-ci lèse les intérêts des héritiers qui sont dans le besoin et qu'il ne correspond pas à un intérêt général exceptionnel. En l'espèce, la construction d'une gendarmerie est susceptible de relever très certainement d'un intérêt général. Mais la question reste posée quant à son caractère exceptionnel. Les faits nous apprennent par ailleurs que les héritiers vivent au Népal, de façon très chiche, c'est-à-dire avec avarice. Le style de vie des héritiers ne semble pas présenter les caractéristiques d'un style de vie de personnes dans le besoin. Par conséquent, le l'Etat ne pourra pas se voir obligé de refuser le don. [...]
[...] Et on peut constater que la prescription trentenaire n'a pas encore été atteinte. Par conséquent, monsieur HUBERNATUS dispose encore de son droit de réclamer sa succession. Si l'Etat n'a pas aliéné le bien, il devra le restituer à l'héritier. Cependant, dans le cas où il l'aurait fait, l'héritier pourra exercer une action sur le prix net du bien vendu. L'article 811-3 du code civil peut également trouver à s'appliquer ; il dispose que si l'Etat a acquis une succession en déshérence sans avoir été envoyé en possession, il pourra être condamné à payer des dommages-intérêts envers les héritiers. [...]
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