Affaires administratives, administration, administrer, Etat de droit, droit administratif autonome, indépendance statutaire
« On administre que de deux manières : par des ordonnances en forme de loi et par des décisions en forme de jugement ». Le succès que connu la formule d'Herion de Pansey s'explique par la justification qu'elle fournissait tant à l'interdiction faite aux juridictions judiciaires de connaitre des affaires administratives, qu'à l'attribution à rebours de ce contentieux à des autorités organiquement administratives mais dotées de fonctions juridictionnelles. Elle justifie, la place particulière du juge administratif, ce « juge-administrateur » comme l'appelait encore R. Chapus.
[...] Le véritable moment fondateur du droit administratif est très certainement l'arrêt Blanco du Tribunal des Conflits de 1873. Le Tribunal y affirme la compétence du juge administratif pour connaître de la responsabilité à raison des dommages causés par des services publics, il établit ainsi un lien entre le fond du droit applicable et la compétence de la juridiction administrative. Cette reconnaissance de la spécificité du droit applicable aux litiges administratifs par le Tribunal des Conflits instaure définitivement le principe de la liaison de la compétence et du fond. [...]
[...] Elle justifie, la place particulière du juge administratif, ce « juge-administrateur » comme l'appelait encore R. Chapus. L'organisation constitutionnelle française depuis la Révolution repose sur la séparation des pouvoirs, fondée sur la distinction des fonctions qui doivent assurer un fonctionnement harmonieux de la société. La place au combien particulière du juge administratif est d'ailleurs largement le fait du moment révolutionnaire. Comme le démontre le doyen Vedel, la croyance des Constituants en un minimum d'exigence de séparation des pouvoirs « à la française » ceci afin de prévenir concrètement les abus des corps judiciaires de l'Ancien régime, va directement conduire les révolutionnaires au choix d'une justice retenue. [...]
[...] La fin de la justice retenue, avec laquelle l'administration perd tout pouvoir de jugement, se confirme avec l'arrêt Duc Conseil d'Etat CE décembre 1899, Cadot par lequel le juge administratif abandonne de manière purement prétorienne la théorie du ministre-juge. Désormais, le Conseil d'Etat n'intervient plus en appel des décisions contentieuses des ministres. Il est le seul juge de l'Administration, le ministre ayant eu raison de refuser : « de statuer sur ces affaires qui n'étaient pas de sa compétence ». [...]
[...] C'est donc à la lumière de l'arrêt Canal que l'on prend conscience de l'importance capitale de la décision du Conseil Constitutionnel n° 86-226 du 23 janvier 1987 qui reconnait la compétence exclusive de l'ordre administratif pour annuler ou réformer les actes de l'administration prises dans l'exercice de prérogatives de puissance publique. Cette décision élevée au rang de principe de valeur constitutionnel permet de confirmer ce que le juriste britannique Dicey déclarait en 1855 : « la soumission de tous aux même juridictions sans privilèges, même pour l'administration, est l'expression même de l'Etat de droit ». [...]
[...] Même par des contraintes, la séparation des pouvoirs à repris ses droits. L'administrateur n'est plus juge ; mais le juge administratif lui développe un droit puissant permettant sinon de se substituer à l'Administration tout du moins d'en contraindre fortement l'action. L'efficacité du recours contentieux devant le juge administratif par le développement d'un droit administratif autonome L'affirmation d'un droit administratif autonome (A'.) devait donner les bases nécessaires à la juridiction administrative pour renforcer son indépendance statutaire et faire progresser son contrôle juridictionnel sur les actes de l'administration (B'.). [...]
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