Fonctionnaires, vie privée, comportement, dignité, examplarité, sanction, vie familiale
Un arrêt vient d'être rendu le 2 février dernier par le Conseil d'État sur la question épineuse des mutations dans la fonction publique, ce qui témoigne de l'aspect central du droit à la vie privée pour les fonctionnaires.
Le fonctionnaire reste un fonctionnaire même dans sa vie privée. Mais, dans le même temps, le droit au respect de la vie privée fait partie des droits fondamentaux de la personne humaine et il est, à ce titre, garanti par un certain nombre de textes juridiques (le Conseil constitutionnel considère que ce droit découle de l'article 2 de la Déclaration de 1789).
[...] Mais le Conseil d'État, saisi par le ministère de l'intérieur indique, dans son arrêt, que « pour apprécier si une mutation porte une atteinte disproportionnée au droit d'un fonctionnaire au respect de sa vie privée et familiale, il appartient au juge administratif de prendre en compte non seulement les conséquences de cette décision sur la situation personnelle de l'intéressé, mais aussi le statut de celui-ci et les conditions de service propres à l'exercice des fonctions découlant de ce statut », ce que n'avait pas fait le TA. Or, l'intérêt du service justifie de limiter la durée d'affectation de ces fonctionnaires en Outre-mer : la demande du capitaine Le Rasle est donc rejetée. Ainsi le fonctionnaire demeure un cas à part, tenu à la réserve et à l'exemplarité ; le respect de sa vie privée demeure un débat important. En un sens, il y a un conflit entre l'intérêt de l'administration et celui du fonctionnaire. Conflit dont la gravité est fonction du contexte et du fonctionnaire. [...]
[...] L'arrêt du Conseil d'État du 16 juin 1995 Mifsud précise ce cadre pour une affaire où un gradé d'une police municipale avait fait exécuter des travaux dans sa villa par un agent placé sous ses ordres et pendant les heures de service, qui avait demandé une actualisation des indemnités. En sens inverse, la sanction disciplinaire peut être appliquée totalement. Ainsi, dans l'affaire du sous brigadier Occelli : celui-ci révoqué par arrêté du 5 août 1987 par le ministère de l'intérieur, saisit le tribunal administratif qui annule l'arrêté en considérant qu'il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation. Mais le ministre de l'intérieur fiait appel et obtient gain de cause. [...]
[...] B – Dans quelle mesure la mutation tient-elle compte du respect à la vie privée ? Elle en tient parfois compte La loi du 30 décembre 1921 dite loi Roustan permet aux fonctionnaires mariés de demander à être affectés dans le département où exerce l'un des deux époux. Cette priorité s'applique même si l'un des époux n'est pas fonctionnaire et elle est étendue aux partenaires d'un PACS Depuis 1991, la loi Roustan a été implicitement abrogée pour les fonctionnaires de l'Etat qui relèvent du statut général, soumis aux dispositions similaires de l'article 60 de la loi du 11 janvier 1984. [...]
[...] En ce sens, un premier élément de réponse à la question du droit à la vie privée pour un fonctionnaire peut être dégagé : plus qu'un autre citoyen salarié, le fonctionnaire doit se conformer à un code de bonne conduite, sinon il peut être sanctionné dans sa vie professionnelle. De la même façon, et sans aller jusqu'aux cas graves évoqués précédemment, de multiples interpénétrations entre vie privée et vie professionnelle rendent le droit à la vie privée souvent difficile à faire respecter. [...]
[...] En effet, le fonctionnaire représente la fonction publique aux yeux de l'opinion. En ce sens, les comportements privés qui peuvent entraîner le discrédit sur l'administration sont nécessairement considérés comme répréhensibles. Ainsi, une disposition du statut général de Vichy joue encore un rôle non négligeable sur la situation du fonctionnaire, alors que pourtant elle a disparu des statuts élaborés sous les IVème et Vème Républiques : « le fonctionnaire doit, dans le service comme dans sa vie privée, éviter tout ce qui serait de nature à compromettre la dignité de la fonction publique » (loi du 4 septembre 1941, article 5). [...]
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