Contrats administratifs, arrêt Commune de Béziers, jurisprudence administrative, loyauté contractuelle, contentieux contractuel
La notion de loyauté est aujourd'hui au cœur de l'actualité juridique. Au-delà d'une simple évolution sémantique qui, avec le courant de libéralisation de l'économie et ses exigences de concurrence loyale, fait préférer aux termes de bonne foi celui de loyauté, cette dernière reçoit aujourd'hui une application grandissante tant en droit privé - avec l'affirmation d'un courant dit du « solidarisme contractuel » - qu'en droit européen avec l'élaboration de principes du droit européen du contrat comprenant l'impératif de loyauté contractuelle. Etonnamment, le terme de loyauté est longtemps resté absent de la jurisprudence administrative et n'a reçu de consécration directe par le Conseil d'Etat qu'en 2009 dans son arrêt Commune de Béziers. Toutefois, cette absence de visibilité ne doit pas cacher l'influence, certes sous-jacente, mais non moins fondamentale, de la notion de loyauté, étroitement associée à celle de bonne foi, dans l'élaboration prétorienne de la théorie générale des contrats, le « droit administratif des contrats ».
A la nécessité d'expliquer une telle absence textuelle se joint le besoin de présenter l'application de l'exigence de loyauté tant dans la formation et l'exécution que dans le contentieux du contrat administratif.
[...] Les évolutions récentes du droit administratif en faveur d'une plus grande stabilité des relations contractuelles ont également conduit à l'affirmation grandissante de l'exigence de loyauté au stade du contentieux contractuel administratif. L'affirmation de l'exigence de loyauté dans le contentieux contractuel Contexte - La réévaluation du principe de sécurité juridique au détriment d'une sanction mécanique de la nullité La nullité du contrat, qu'elle résulte de son objet, de l'incompétence d'une des parties ou de la violation des règles de passation, a longtemps été considérée comme un moyen d'ordre public, ainsi que l'a rappelé le Conseil d'Etat dans l'arrêt Jacquier du 28 juillet 2000. [...]
[...] L'exigence de loyauté reste toutefois fondamentale tant lors de l'exécution du contrat qu'en matière de contentieux contractuel (III). L'application implicite de la notion de loyauté en matière d'exécution du contrat L'affirmation prétorienne du principe d'équilibre financier du contrat, contrepartie des prérogatives exorbitantes du droit commun de l'administration en matière d'exécution des contrats, manifeste l'exigence d'une certaine loyauté de l'autorité publique à l'égard de son cocontractant. Théorie du fait du prince Bien que le droit public, comme en droit privé, prévoie des procédures de modification conventionnelle des contrats, telles que l'avenant, il est également loisible à l'administration, sur le fondement du principe de mutabilité du service public, de modifier certaines clauses de ses contrats de manière unilatérale. [...]
[...] Plus récemment, l'exigence de loyauté des relations contractuelles a trouvé une nouvelle application aux contrats de marchés publics dans un arrêt du Conseil d'Etat du 10 février 2010, Société Prest'Action. Le Conseil d'Etat a ainsi estimé qu'une société ayant librement signé un contrat de marché public ne pouvait invoquer une nullité du contrat « au motif que seule la procédure prévue pour la passation des délégations de service public aurait dû être suivie ». Bibliographie Ouvrages généraux Christine Bréchon-Moulènes, « De la loyauté de l'autorité publique contractante », in Mélanges Moderne, Mouvement du droit public Jacqueline Morand-Deviller, Droit administratif (11ème édition), Montchrestien Laurent Richer, Droit des contrats administratifs (7ème édition), Lextenso éditions, LGDJ Articles Ana Beduschi-Ortiz, « La notion de loyauté en droit administratif », Actualité Juridique Droit Administratif pp. [...]
[...] La création d'obligations nouvelles par la voie de la modification unilatérale du contrat (CE juin 1913, Deplon) ainsi que toute mesure affectant le contrat de manière indirecte donnaient lieu à une indemnisation intégrale. L'évolution jurisprudentielle s'est néanmoins opérée dans le sens d'un rétrécissement significatif de la portée de la théorie du fait du prince. Si des mesures à portée particulière alourdissant les charges du cocontractant ouvrent toujours droit à une indemnisation (CE avril 1948, Ville d'Ajaccio), des mesures générales, telles qu'une nouvelle réglementation fiscale, ne donnent plus droit à la réparation des préjudices subis par le cocontractant en application du principe d'égalité devant les charges publiques. [...]
[...] Le Conseil d'Etat a également forgé, au fil des nombreux arrêts constituant sa jurisprudence en matière contractuelle, le principe d'équilibre financier du contrat, selon lequel le cocontractant a droit, sous certaines conditions, à une compensation pécuniaire lorsque l'équilibre initialement prévu est rompu à son détriment. Le fait du prince, entendu comme toute mesure administrative rendant l'exécution du contrat plus onéreuse, ouvre en principe droit à une indemnité. Le cocontractant a donc le droit d'être entièrement protégé de l'aléa administratif pour des raisons d'équité. [...]
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