But, intérêt, général, opérations, travail, public
Selon le Professeur René Chapus, la matière des travaux publics a toujours bénéficié d'une autonomie au sein du droit administratif. En réalité, la notion de travail public et les régimes qui lui sont liés ont leur origine dans la loi du 28 pluviôse de l'an VIII. Déjà à cette époque, alors que l'administration jouissait d'une irresponsabilité de principe en toute matière, les dommages causés par les travaux publics pouvaient engager la responsabilité des personnes publiques et notamment celle de l'Etat. Le terme de travail public est susceptible de deux acceptions. La première, familière pour le profane, désigne un ouvrage à faire, et l'autre, l'ouvrage réalisé, que l'on qualifie aujourd'hui plus communément « d'ouvrage public ». Et même si le Professeur René Capitant a affirmé dans une étude publiée en 1929 que la notion de travail public était une notion double, les opérations de travaux publics évoquées par le sujet sont assez explicites pour que l'on puisse limiter l'étude aux travaux publics, et donc en écarter l'ouvrage public. Le travail public est un travail immobilier entrepris pour le compte d'une personne publique dans un but d'intérêt général, ou il est fait pour une personne privée, et il faut alors, pour qu'il soit un travail public, que son exécution concrétise l'accomplissement d'une mission de service public. La notion d'intérêt général, le but d'intérêt général, mériterait une étude beaucoup plus approfondie, puisqu'elle touche toutes les matières du droit administratif, et en particulier le droit administratif des biens. Le doyen Hauriou, chef de file de la faculté de Toulouse, n'a-t-il pas tenté de faire de l'affectation formelle des choses à l'utilité publique, un des critères déterminant de la domanialité publique, avant que le critère du service public de Léon Duguit ne l'emporte sur les autres porté par l'époque de l'Etat providence et le développement du service public. Pour définir le but d'intérêt général, il convient tout juste de comprendre avec nos contemporains que cette notion, très abstraite, aux contours variables, est enchaînée aux cornes du droit administratif, car sans elle, la société libérale n'existerait pas (Cf. Rousseau le contrat social), et sans elle, aucune des prérogatives de puissance publiques ne pourraient être justifiées. L'administration doit toujours agir toujours conformément à l'intérêt général. Le rôle joué par le but d'intérêt général dans la qualification jurisprudentielle de travail public doit être analysé dans ses évolutions, puisqu'ils sont caractéristiques, malgré la petite autonomie de la matière, d'une évolution d'ensemble dans le droit administratif. Il n'est pas étonnant alors de voir que le but d'intérêt général apparaît clairement dans la définition classique du travail public, et qu'il constitue son critère finaliste et déterminant. Mais on peut s'émouvoir aujourd'hui sur la disparition de la référence systématique du juge administratif au but d'intérêt général en tant que critère de qualification d'un travail en travail public.
[...] Si un critère finaliste plus réducteur, correspondant à l'exécution d'une mission de service public, a été retenu par le juge administratif dans l'hypothèse des travaux effectués pour le compte d'une personne privée, c'est sans doute encore à cause de la fonction de la personne au profit de laquelle les travaux ont été effectués. Contrairement aux personnes publiques, les personnes privées n'ont pas vocation à exercer une mission d'intérêt général, encore moins de service public, l'intervention d'une personne publique dans le cadre d'une mission de service public est donc nécessaire. [...]
[...] Lorsque l'on regarde l'évolution du rôle joué par le but de l'intérêt général dans la qualification jurisprudentielle du travail public, on peut constater un déclin de la référence systématique à cette notion Mais l'intellectualisation de la notion, et une approche comparative entre les deux hypothèses prédominantes qui conduisent depuis 1955 à la qualification d'un travail, en travail public, permettent de comprendre que cette évolution était nécessaire et généralisée(II) Le déclin de la référence systématique au but d'intérêt général dans la qualification jurisprudentielle de la notion de travail public. La qualification d'une opération en travail public par le juge administratif passe par deux critères. [...]
[...] Il ne fait pas de doute à la lecture de ces arrêts que ces décisions successives, depuis Effimief en 1955, donnant une définition nouvelle aux travaux publics, ont été opportunes. [...]
[...] L'intérêt général reste en jeu, indirectement, par le biais de l'exécution du service public. Si l'on considère que l'exécution d'un service public, n'est que la résurgence de l'intérêt général dans le cadre des travaux effectués par une personne publique pour le compte d'une personne privée, on ne peut occulter le fait que l'apparition de la notion de service public, qui semble plus usuelle que celle du but d'intérêt général, s'inscrit dans un contexte particulier et général. Dans un contexte général tout d'abord, puisque l'ensemble du droit public a été noyé par la notion de service public, qui bien que très proche de la notion du but d'intérêt général n'en constitue pas son synonyme. [...]
[...] En tout cas, elle révèle une évolution aux nouvelles données sociales. Une évolution nécessaire et souhaitée de la définition classique : les raisons de l'adaptation du critère du but d'intérêt général aux situations nouvelles Avant la consécration par le juge de la nouvelle définition des travaux publics, le juge s'accommodait du vocabulaire juridique pour offrir le régime favorable des travaux publics à des opérations effectuées pour le compte des personnes privées. Dans l'arrêt Mure du 24 janvier 1936, les travaux exécutés par des communes sur des propriétés privées en vue prévenir ou de limiter les éboulements de terrains ont été présentés par référence à la définition classique (alors seule consacré) comme faits « par la commune et pour un but d'utilité publique ». [...]
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