Avis du Conseil d'Etat, 10 avril 1992, SARL Hofmiller
C'est avec l'arrêt Blanc de 1873 qu'émerge la notion de service public comme élément déterminant de la compétence administrative. Cependant, les frontière de celle-ci ne sont pas toujours si claires. Notamment, avec l'émergence de la notion de services publics industriels et commerciaux avec l'affaire du Bac d'Eloka en 1921, on a vu la compétence judiciaire s'introduire dans la sphère des services publics.
Dans l'espèce qui nous est ici présentée avec l'avis du conseil d'Etat du 10 avril 1992, SARL Hofmiller, une commune a commandé à la société Hofmiller de payer le montant de la redevance d'enlèvement des ordures ménagères pour l'année 1984, et a pris de plus un acte exécutoire quant à cette redevance pour 1985. La société, refusant, a saisi le tribunal administratif de Strasbourg. Celui-ci a rejeté sa demande. La société a alors interjeté appel devant la Cour administrative d'appel de Nancy. Cette dernier sursoit à statuer et saisi donc le Conseil d'Etat pour avis sur la question de savoir si le service d'enlèvement des ordures ménagères financé par une redevance recouvrée par la commune au profit du concessionnaire est un service public administratif ou un service public industriel ou commercial. A cette question est liée celle de savoir si le fait de ne pas bénéficier du service donne ou non le droit d'être exonéré de la redevance en question.
Savoir si le service d'enlèvement des ordures est industriel ou administratif permettra de définir la compétence ou l'incompétence de la juridiction administrative puisque, conformément à la jurisprudence du Bac d'Eloka (1921) notamment, les litiges entre services publics industriels et commerciaux (SPIC) et leurs usagers relèvent en principe de la compétence judiciaire, contrairement à ceux concernant les services publics administratifs (SPA).
En l'espèce, le Conseil d'Etat, pour définir ce service public, utilise les critères classiques d'identification d'un SPIC dégagés par l'arrêt USIA de 1956 que sont l'objet du service, son financement et son mode de fonctionnement. Il met cependant l'accent sur le financement par la redevance, ce qui l'amène à considérer l'enlèvement et le traitement des ordures comme un SPIC et donc à écarter la compétence administrative.
[...] La soumission possible à la TVA comme les entreprises privées Mode de fonctionnement similaire à celui d'une entreprise privée : notamment avec la TVA, faculté ouverte par la code général des Impôts, comme l'indique l'arrêt : « faculté [ ] d'opter pour l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée des opérations relatives au service d'enlèvement et de traitement des ordures, déchets et résidus, lorsque ce service donne lieu au paiement de la redevance ainsi instituée. La même faculté d'assujettissement est d'ailleurs ouverte par cette disposition en ce qui concerne les opérations relatives à des services industriels et commerciaux ». On peut voir que cet élément du fonctionnement découle du financement du service par la redevance. L'arrêt donne à cette suite l'exemple de la fourniture d'eau et de l'assainissement, traditionnellement qualifiés de SPIC par la jurisprudence. B. [...]
[...] Il découlait de l'arrêt USIA que si l'activité de service public est essentiellement financée par des ressources fiscales ou par des subventions, le caractère industriel et commercial ne peut être retenu : Confirmé par TC syndicat d'aménagement de la ville nouvelle de Cergy-Pontoise et TC commune de Pointe-à-Pitre. Pour qu'il y ait SPIC, il faut donc, a contrario, que le service soit financé essentiellement par des redevances payées par les usagers, comme un prix du service rendu. C'est le cas ici, et cela avait déjà été le cas, par exemple, dans TC ville de Cannes Ponce. Importance du financement aussi dans TC, 15/01/1979, caisse de crédit municipal de Toulon M. Creus. [...]
[...] Même solution avec TC syndicat d'aménagement de la ville nouvelle de Cergy-Pontoise et TC préfet du Val d'Oise. Changement avec TC, 11/07/1933, dame Mélinette : service d'enlèvement des ordures considéré comme un SPIC. Un objectif en accord avec la qualité de service public industriel et commercial Conclusions du commissaire du gouvernement Jacques Arrighi de Casanova sur l'arrêt Hofmiller : « L'objectif d'hygiène et de salubrité publiques n'a d'ailleurs jamais empêché un service de revêtir un caractère industriel et commercial ». Ce sera confirmé avec TC, novembre 1992, Fontaine. [...]
[...] Cette faculté apparaissait déjà dans la loi de finances pour 1974 justement, alors que jusque là il devait être obligatoirement financé par une taxe et était donc un SPA. La redevance et la volonté d'une gestion industrielle et commerciale Définition de la redevance : prix du service rendu ; correspondance par rapport au coût et base de calcul sur le service lui-même (par exemple, le volume de déchets pour la redevance sur les ordures ménagères, le volume d'eau pour celle sur l'eau, etc). [...]
[...] Objectif de répondre à une question posant problème, qui n'a donc pas eu de réponse claire dans les jurisprudences précédentes notamment. La possibilité d'être exonéré du paiement de la redevance en cas de non utilisation du service La cour administrative d'appel posait la question de savoir si, en cas de compétence judiciaire, la non utilisation du service pouvait entraîner une exonération du paiement de la redevance. Comme le Conseil d'Etat retient la compétence judiciaire puisqu'il considère qu'il y a SPIC, il écarte la question dans son arrêt in fine. [...]
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