Les relations entres le droit de la concurrence et l'administration apparaissent comme des relations complexes.
La notion d'application du droit de la concurrence par le juge administratif se définit comme l'utilisation par ce dernier, des règles de concurrence pour trancher les litiges qui lui sont soumis. Or, le droit de la concurrence est avant tout destiné à encadrer l'activité économique des entreprises, il a vocation à sanctionner les atteintes au marché imputables à des comportements ou des structures d'entreprises. Il en résulte que les règles de concurrence apparaissent naturellement comme le droit des opérateurs privés.
Aujourd'hui le juge administratif a accepté d'intégrer les règles de l'ordonnance dans son bloc de légalité dont il impose le respect aux actes de l'administration (I), devenant ainsi un véritable juge de la concurrence (II).
[...] Rappelons que le Conseil d'Etat est aujourd'hui devenu juge de droit commun du droit communautaire et doit donc tenir compte de ses dispositions dans le contrôle de la légalité des actes administratifs. Dans la mesure où les articles 7 et 8 de l'Ordonnance de 1986, relatifs aux pratiques anticoncurrentielles, sont rédigés en des termes quasi identiques à ceux des articles 81 et 82 du Traité C.E, relatifs aux règles de la concurrence, l'application des dispositions de l'Ordonnance était inévitable. La décision Société Christ et fils du 12 juin 1996 constitue la première occasion pour le juge administratif d'annuler un acte administratif (en l'espèce un arrêté ministériel procédant à l'extension d'un accord interprofessionnel instituant un régime de prix minimum) sur le fondement de l'article 81 C.E (ex article 85). [...]
[...] Ce transfert de compétence n'autorise pas la Cour d'appel de Paris à connaître des actes administratifs des personnes publiques qui contreviendraient au droit de la concurrence. Seul le contentieux des décisions du Conseil de la concurrence est transféré à la cour d'appel de Paris. Par conséquent, la Cour d'appel de Paris s'est vue chargée du point de vue matériel du contrôle des actes administratifs, et détient actuellement un pouvoir de réformation et d'annulation semblable à celui du Conseil d'Etat. Le juge judiciaire s'est donc vue confié un contentieux de pure régulation publique. [...]
[...] Son intervention dans le domaine de la concurrence est une idée traditionnelle en droit administratif (Bernard Stirn) Le juge administratif a été amené à se comporter en juge de la concurrence à travers l'application de principes fondamentaux du droit public : principe de liberté du commerce et d'industrie et principe d'égalité. Le principe de liberté et du commerce et de l'industrie, issu du décret d'Allarde des 2-17 mars 1791 qui proclamait la liberté générale de toute activité économique, a ainsi mis en place le premier droit de la concurrence français. [...]
[...] Cet arrêt constitue un pas supplémentaire dans la constitution d'un droit public de la concurrence. Mais le problème est de savoir si l'application des règles de concurrence ne va pas gêner les personnes publiques dans l'exercice de leur mission d'intérêt général Ce revirement de jurisprudence va permettre au juge administratif de s'affirmer progressivement comme un véritable juge de la concurrence. II/ LE JUGE ADMINISTRATIF : VERITABLE JUGE DE LA CONCURRENCE L'évolution de la jurisprudence a fait du juge administratif un véritable juge de la concurrence cependant, l'application des règles de la concurrence par ce dernier semble demeurer sous certains aspects problématique Une évolution tendant à construire un véritable droit public de la concurrence Le juge administratif dispose de compétences propres en matière de concurrence mais voit aussi le champ d'application de son contrôle s'enrichir par la jurisprudence L'enrichissement du contrôle des actes administratifs par le juge administratif : arrêt Société EDA Dans cette affaire, le juge était saisi d'une requête introduite par la société EDA tendant à obtenir l'annulation de la décision de l'établissement public Aéroports de Paris (ADP) par laquelle il avait rejeté son offre en vue d'exercer son activité de la location de voitures sur les aéroports de Roissy et d'Orly au motif qu'elle n'était pas conforme aux conditions posées par ADP puisqu'elle portait uniquement sur l'aéroport d'Orly et non simultanément sur les deux aéroports comme l'exigeait le dossier de consultation de l'appel d'offre. [...]
[...] Par cette décision, le Conseil d'Etat admet l'opposabilité des règles de concurrence aux actes administratifs. Ainsi fait-il référence quelques mois plus tard au principe de liberté de la concurrence qui découle de l'ordonnance du 1er décembre 1986 Dès lors, à la question de savoir ce qui justifiait que l'on rende opposable à l'autorité publique des règles qui visent en premier lieu des entreprises, le Conseil d'Etat a répondu qu'il s'agissait du principe de libre concurrence applicable même en l'absence d'un texte spécifique imposant le respect du droit de la concurrence. [...]
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