Droit, Essai sur les conditions de la responsabilité en droit public et privé, problèmes de causalité et d'imputabilité, Francis-Paul Benoit, 1957, causes du dommage, prejudice, lien causal, subjectivité du juge
Spinoza, dans "Ethique", explique que "pour toute chose, il doit y avoir une cause, ou une raison assignable, pourquoi elle existe ou pourquoi elle n'existe pas". Le texte qui sera ici étudié, écrit par François Paul Benoît -docteur en droit privé mais également agrégé en droit public- est issu d'un "Essai sur les conditions de la responsabilité en droit public et privé (problèmes de causalité et d'imputabilité)" en date de 1957. Dans cet extrait est ici question du lien de causalité entre le dommage et le fait dommageable mais aussi le lien de causalité entre le dommage et le préjudice ainsi que du rôle devant être opéré par le juge face à cela. Par définition philosophique, la cause désigne une force produisant un effet.
Ainsi le lien de causalité serait un événement ayant une force telle qu'elle créée un lien entre le fait dommageable et le dommage, se trouvant entre les deux.
Lorsque l'on parle du dommage, il est fait référence à une atteinte subie par une personne dans son corps, son patrimoine ou ses droits extra-patrimoniaux lui ouvrant un droit à réparation, le dommage peut alors être matériel (atteinte au patrimoine), moral (atteinte aux valeurs non-pécuniaires) ou corporel (atteinte à l'intégrité physique). Le fait dommageable quant à lui constitue l'événement étant à l'origine du dommage telle qu'une faute par exemple.
[...] Cela ne semble en effet pas compliqué à établir à partir du moment où il n'y a eu qu'un seul fait générateur à l'origine du dommage mais dès lors qu'une succession d'événements cause un ou plusieurs dommages, il sera compliqué pour le juge d'établir quelle est "la cause directe et immédiate" de ce dernier. C'est ici que la problématique de la pluralité de causes se fait ressentir ; par quel moyen doit-on déterminer ce lien de causalité ? En effet, dans un tel cas, il existe "tout un faisceau de lignes de causalité, c'est-à-dire de causes possibles [aboutissant] au dommage. [...]
[...] Une appréciation subjective du juge sur le lien de causalité en cas de pluralité de causes du dommage. Le texte nous explique qu'en conséquence de cette pluralité de causes du dommage, il ne peut, "de toute évidence, être résolu dans chaque cas d'espèce que par le jeu d'une appréciation humaine des faits, d'un choix parmi diverses causes possibles, avec tout ce que comporte de subjectif toute appréciation et tout choix". En effet, par définition le terme "subjectif" renvoie à quelque chose relevant d'un sujet, un être pensant comme conscience individuelle tandis que par opposition, le terme "objectif" renvoie à une chose qui s'imposerait justement à l'esprit, indépendamment de toute interprétation. [...]
[...] La réappartion de la subjectivité du juge dans l'appréciation de la rupture du lien causal. Une fois de plus "on voit qu'aucune solution d'espèce ne peut intervenir sans une appréciation humaine des faits nécessairement objective". Afin de justifier cela nous pouvons énoncer le dernier exemple donné dans cet extrait relatif à une personne souffrant d'une maladie du coeur qui, suite à un accident se voit mourir d'une crise cardiaque "au cours des soins qui lui sont donnés en raison de blessures provoquées par un accident". [...]
[...] Ainsi la causalité adéquate permet au juge de déterminer l'événement rendant le dommage le plus probable ; il s'agira de trouver l'élément déterminant du dommage pour établir un lien de causalité. Le juge devra alors établir un choix en analysant quelle cause est la plus probable au dommage. Il est à noter que nous parlons ici de probabilité : il s'agit d'une proportion de chance que telle cause soit à l'origine d'un dommage. Ceci est d'ailleurs rappellé par le texte à travers le terme "susceptible de jouer le rôle du fait dommageable". [...]
[...] Ainsi plusieurs théories permettent au juge d'établir le lien de causalité : la théorie de la causa proxima (le premier fait à l'origine du dommage) qui n'a jamais été utilisé en droit administratif ; la théorie de la causa remota : dernier fait à l'origine du dommage ; mais ce sont les théories de l'équivalence des conditions et de la causalité adéquate qui seront plutôt utilisées par le juge administratif afin d'opérer un choix sur le lien de causalité direct et immédiat. Par conséquent si nous prenons la théorie de l'équivalence des conditions, toutes les conditions seront équivalentes, aucun tri ne serait à faire, la cause du dommage étant tout événement à défaut duquel le dommage ne se serait produit. Or nous voyons dans cet extrait que le juge recourt à "un choix parmi diverses causes possibles" dans le but de caractériser le lien de causalité. Ceci nous ferait donc échos à la théorie de la causalité adéquate. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture