Conformément à la référence rousseauiste, la conception traditionnelle du droit public français considérait la loi comme d'une essence plus haute que celle du règlement, d'où la primauté incontestée de la première sur le second. En effet, selon cette vision, 'la loi est l'expression de la volonté générale' (art. 6 de la déclaration des Droits de l'homme et du citoyen) et s'identifie à la souveraineté nationale ; son domaine ne peut donc être limité : fait partie de la loi tout ce sur quoi statue le Parlement et est loi toute disposition élaborée par le Parlement selon la procédure législative et promulguée par le chef de l'Etat (définition organique de la loi) ; quant aux règlements, ils ne font qu'exécuter la loi, d'où leur subordination. Ainsi, il semblerait, à première vue, que la Constitution du 4 octobre 1958, en délimitant les domaines de la loi & du règlement, fut sur le papier une 'révolution juridique' (P. Durand) considérable (I) ; il s'agira pourtant de montrer que cette révolution fut malgré tout, dans les faits, largement introuvable (II).
[...] Les frontières entre domaine de la loi et domaine du règlement s'en trouvent donc brouillées. Une "révolution juridique" introuvable ? Force serait donc d'en conclure à une "révolution introuvable", puisque la loi semble avoir retrouvé dans la réalité du système constitutionnel l'ensemble de son domaine traditionnel. Il convient cependant de nuancer notre propos en soulignant, d'une part, que le domaine du règlement reste préservé et, d'autre part, qu'une autre "révolution juridique" est sur le point de prendre le dessus. En effet, il faut tout d'abord remarquer que si l'art n'est plus utilisé, l'art. [...]
[...] L'écart entre la théorie et la réalité du système constitutionnel s'explique ensuite par le fait qu'en vertu de l'art de la Constitution, si une loi comporte des dispositions à caractère réglementaire cela ne constitue plus en soi un motif d'inconstitutionnalité (CC juillet 1982). En effet, le gouvernement a alors la faculté mais non l'obligation de s'opposer à son adoption en invoquant l'irrecevabilité, et des raisons d'ordre technique ou politique peuvent faire qu'il n'y recourre pas. Cet art est dès lors tombé en désuétude et n'a plus été utilisé depuis mai 1979. [...]
[...] La "révolution juridique" de 1958 : d'une définiton matérielle du domaine de la loi (art à la reconnaissance d'un domaine du règlement (art C). Cependant, en déterminant à l'aide d'une liste, limitative par définition, la consistance du domaine de la loi, la Constitution du 4 octobre 1958 semble, dans son art produire une véritable "révolution juridique". Même si les matières traditionnellement du domaine de la loi s'y trouvent, on passe en effet, de fait, d'une définition organique à une définiton matérielle de la loi. [...]
[...] Dans ces conditions, il appartient au législateur de mettre en cause toutes les matières, le gouvernement se bornant à les mettre en oeuvre. Il faut ainsi distinguer, d'une part, le pouvoir réglementaire dérivé (résultant de l'art. 34) et, d'autre part, le pouvoir réglementaire autonome (cf. CE février 1985, Association des centres E. Leclerc) résultant de l'art (le premier ministre "assure l'exécution des lois") & de l'art qui dispose que "les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ont un caractère réglementaire" (par exemple la procédure civile ou administrative, la détermination des contraventions ou des peines applicables ; cf. [...]
[...] 37-2 des autres mesures. En revanche, la pénétration croissante des normes européennes & du droit communautaire dans le domaine de la loi est à l'origine d'une révolution juridique plus récente mais bien plus réelle. En effet, il est un fait que plus d'un texte nouveau sur deux est désormais d'origine brusseloise rapport 1993) et que les directives européennes, devant être transposées de façon automatique dans le droit national, aboutissent à ce que "la loi est dictée à ceux qui sont chargés de l'édicter" (F. [...]
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