Commentaire d'arrêt du Conseil d'Etat du 6mars 2002, TRIBOULET et BROSSET-PROSPISIL
L'ordonnance de la Marine d'août 1681 donnait compétence au conseil de préfecture pour connaître des contraventions de grande voierie relatives au domaine public maritime ceci afin de préserver au mieux son intégrité. Cette compétence, attribuée depuis par voie de conséquence au juge administratif, semble aujourd'hui être parfaitement acquise. Celui-ci n'hésite pas en effet à faire preuve d'intransigeance dans cette optique de préservation.
En l'espèce, le 25 septembre 1909 et le 25 août 1911, le préfet du Morbihan autorise Mr Auboin à édifier un terre-plein au lieu dit « Pen-er-Men » sur la commune d'Arradon, ceci en contrepartie d'une redevance. Mme Brosset acquiert la maison, construite sur le terre-plein, à la suite d'une donation entre vifs intervenue en 1945. Alors qu'elle bénéficiait d'occupations temporaires depuis l'acquisition de la maison, le préfet du Morbihan refuse le 6 septembre 1993 le renouvellement de l'autorisation qui avait pris fin le 31 décembre 1990 mais lui propose toutefois une autorisation limitée. Refusant cette proposition, elle sollicite le bénéfice d'une concession d'endigage. Le préfet, qui rejette sa demande le 9 mars 1994, lui adresse ensuite deux mises en demeure les 4 juillet 1994 et 10 avril 1995. Dès lors, un procès verbal de contravention de grande voirie est dressé à son encontre pour occupation sans titre du domaine public.
Le 8 décembre 1999, la cour administrative d'appel de Nantes condamne notamment dans son article 3 Mme Brosset à remettre les lieux dans leur état antérieur à l'édification de la maison dans un délai de trois mois à compter de la notification de son arrêt, infirmant par là le jugement rendu par le tribunal administratif de Rennes le 20 mars 1997. Elle précise que l'administration pourra procéder d'office à l'exécution de la mesure aux frais, risques et périls de l'occupant. Mme Triboulet et Mme Brosset-Prospisil, venant aux droits de Mme Brosset se pourvoient contre cet article 3.
Mme Brosset, occupante sans titre du domaine public, doit-elle être expulsée? Dans le cas d'une réponse affirmative, sous quelles conditions ?
[...] Puisque, selon le conseil d'état, Mme Brosset ne bénéficie d'aucun droit de propriété ou droit réel, celui-ci n'a pas à apprécier si les mesures ont été prises dans un tel objectif. La mise à l'écart de ces textes par le juge semble contestable, même si la préservation du domaine public maritime revêt un caractère d'intérêt général, En effet, la cour européenne des droits de l'homme fait par exemple preuve de pragmatisme en examinant plus la proportionnalité de l'atteinte que la satisfaction de l'objectif poursuivi. [...]
[...] Le principe de confiance légitime qui est un principe général du droit communautaire n'a pas également été méconnu par celle-ci puisque la situation juridique en l'espèce n'est pas régie par ce droit. Enfin, le fait que le procès verbal de contravention de grande voirie soit intervenu cinq ans après la l'expiration de la dernière autorisation temporaire du domaine public ne devait pas nécessairement être pris en considération par la cour administrative d'appel. En l'espèce, le conseil d'état est amené à s'interroger sur les conséquences qu'entraîne l'occupation sans titre du domaine public maritime naturel alors même que cette occupation est ancienne et a antérieurement été autorisée. [...]
[...] Le 8 décembre 1999, la cour administrative d'appel de Nantes condamne notamment dans son article 3 Mme Brosset à remettre les lieux dans leur état antérieur à l'édification de la maison dans un délai de trois mois à compter de la notification de son arrêt, infirmant par là le jugement rendu par le tribunal administratif de Rennes le 20 mars 1997. Elle précise que l'administration pourra procéder d'office à l'exécution de la mesure aux frais, risques et périls de l'occupant. Mme Triboulet et Mme Brosset- Prospisil, venant aux droits de Mme Brosset se pourvoient contre cet article 3. [...]
[...] Or, l'occupation de cette dépendance du domaine public par Mme Brosset constitue une utilisation privative nécessairement soumise à autorisation. Si cette dernière avait bénéficié d'autorisations d'occupations temporaires (ou permissions de voierie), elle n'a pas de droit au renouvellement de celle- ci. Et, à l'expiration de la dernière autorisation (qui est intervenue quatre ans avant le procès verbal de contravention de grande voirie), elle devient occupante sans titre du domaine public (ex : CE décembre 1985 ministre de la culture) et alors même que l'administration a toléré son maintien dans les lieux (ex : CE mars 1945, Société des Sablières de la Seine) L'absence de concession d'endigage Alors que Mme Brosset sollicitait auprès du préfet le bénéfice d'une concession d'endigage, celle-ci lui a été refusée. [...]
[...] Le conseil d'état confirme ici ce refus. Les travaux d'exondement ont pour effet de soustraire un terrain à l'action des flots et, ceux effectués avant l'entrée en vigueur de la loi du 28 novembre 1963, sous réserve d'une approbation par l'autorité compétente, auraient pour conséquence de transférer la propriété du terrain en question au bénéficiaire des travaux d'endigage. Or, ici, le cédant du terre-plein avait eu l'autorisation d'édifier et d'agrandir celui-ci en contrepartie d'une redevance. On pouvait donc penser que ces travaux faisaient suite à une concession d'endigage et qu'ils étaient translatifs de propriété au bénéfice du propriétaire. [...]
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