Le problème de l'augmentation de la délinquance des mineurs est l'une des préoccupations des pouvoirs publics. Certains maires ont voulu réagir à la fois parce qu'ils administrent des villes particulièrement exposées et parce qu'ils veulent montrer aux populations leur volonté politique. Le Conseil d'Etat se montre dans cette affaire plus généreux avec les libertés locales qu'il ne nous à accoutumés à l'être, en admettant la légalité de ce que l'on a appelé les « couvre-feux » municipaux restreignant la circulation nocturne des mineurs non accompagnés dans certains quartiers difficiles. Il reconnait ainsi que ces quartiers nécessitent l'application de règles juridiques particulières, portant éventuellement une atteinte injustifiée en d'autres temps ou en d'autres lieux à la liberté d'aller et venir ou au principe d'égalité.
[...] Il existe donc des circonstances d'espèce de nature à justifier l'arrêté de police du 5 juillet 2001. L'arrêt Benjamin (CE du 19 mai 1933) qui pose, en matière de police municipale, le principe d'un plein contrôle de proportionnalité reçoit en l'espèce une illustration nouvelle. Ce contrôle n'est en rien, comme l'écrit le professeur Chapus, un contrôle d'opportunité ; c'est un contrôle de nécessité, car l »opportunité et nécessité n'est en rien synonymes Le juge recherche seulement l'adéquation de la mesure par rapport aux troubles à l'ordre public (CE du 19 juin 1953 arrêt Houphouët-Boigny). [...]
[...] La pratique administrative a élargi cette notion en y englobant l'ordre moral (CE du 30 septembre 1960 arrêt Jauffret), la dignité de la personne humaine (CE du 27 octobre 1995 arrêt Commune de Morsang-sur-Orge et ville d'Aix-en-Provence) et ce que le professeur Chapus appelle la protection des individus contre eux-mêmes (CE du 22 janvier 1982 arrêt Association Auto défense). Le juge administratif estime qu'au moyen de l'interdiction faite aux mineurs de moins de 13 ans de circuler la nuit à Etampes, le maire entend contribuer à la protection de l'ordre public. L'arrêté de police municipale a donc pour but essentiel de protéger les mineurs contre les actes de violence dont ils pourraient être victimes, voire contre l'imprévoyance de leurs parents. [...]
[...] Celles-ci sont constituées en l'espèce, le contrat local de sécurité de la ville d'Etampes ayant mis l'accent sur le taux élevé de la délinquance des mineurs. La nécessité de circonstances locales particulières a été mise en avant par l'arrêt Société des films Lutetia (CE du 18 décembre 1959). Elles consistent par exemple en la sensibilisation spéciale d'habitants d'une commune à l'immoralité d'un film. Quoi qu'il en soit, les risques locaux particuliers ne doivent pas seulement être affirmés, ils doivent surtout être établis. [...]
[...] L'imposition de sanctions pénales, prononcées par le juge pénal, doit permettre d'assurer l'exécution des actes administratifs. Dans l'arrêt Société immobilier de Saint-Just du TC du 2 décembre 1902, il a été dit qu'il est de l'essence même du rôle de l'administration d'agir immédiatement et d'employer la force publique sans délai ni procédure, lorsque l'intérêt immédiat de la conservation publique l'exige ; quand la maison brûle, on ne va pas demander au juge l'autorisation d'y envoyer les pompiers Dans l'affaire Ville d'Etampes, il apparaît donc évident que la police nationale peut agir, car un enfant de moins de 13 ans, seul dans un quartier difficile se doit d'être reconduit chez lui et il serait ridicule de se contenter de dresser une contravention de police à ses parents pour violation d'un arrêté de police municipale (contravention qui de toute manière ne peut pas être dressée au mineur de moins de 13 ans).Sur cette question de l'exécution forcée, on peut supposer que le maire d'Etampes a présent à l'esprit le contenu de l'ordonnance du 29 juillet 1997 qui avait annulé l'arrêté de police du maire de Sorgues pour violation d'une liberté publique et absence d'urgence, éléments dont la réalité est démontrée dans l'affaire de la ville d'Etampes. [...]
[...] De même, est considérée comme excessive l'interdiction de circulation à partir de 22 heures. Cependant, le maire s'étant engagé devant le juge à repousser cet horaire à 23 heures, il n'y a sur ce point pas lieu de suspendre l'arrêté municipal. Une situation urgente justifiant l'exécution forcée En vertu de l'arrêté de police du maire d'Etampes, les mineurs de moins de 13 ans circulant en dehors des horaires fixés pourront être reconduits à leur domicile par des agents de police nationale. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture