La procédure de l'expropriation telle que fixée par le code du même nom s'articule en deux phases distinctes. La première, la phase administrative se décompose en trois temps. Une enquête publique destinée à démontrer l'utilité publique du projet d'expropriation, qui donne lieu à un acte administratif, la déclaration d'utilité publique. Ensuite, l'arrêté de cessibilité vient désigner l'immeuble faisant l'objet de la procédure d'expropriation. La deuxième phase, qui peut aujourd'hui être en partie concomitante, relève de la juridiction judiciaire. Sur saisine préfectorale, le juge de l'expropriation constate la régularité de la procédure administrative et rend une ordonnance d'expropriation qui vaut transfert de propriété du bien. Le juge judiciaire est aussi celui de l'indemnisation.
[...] Ce dernier semble être le cas d'ouverture de pourvoi en cassation le plus problématique. En effet, il peut s'agir de pourvois invoquant la caducité des actes administratifs en vertu desquels l'ordonnance est rendue. Il se peut qu'après que le juge ait rendu son ordonnance, le juge administratif déclare l'un des actes de la procédure illégal, la DUP comme l'arrêté de cessibilité. Une telle situation ne pose pas de grave problème si ladite ordonnance n'est pas encore définitive. Cependant, nous verrons que longtemps, les droits des particuliers furent mis à mal dans l'hypothèse d'une ordonnance définitive. [...]
[...] Le décret précise dans un deuxième temps les voies de recours contre la décision du juge de l'expropriation de constater ou non le défaut de base légale de l'ordonnance. Alors que la Cour de cassation avait jugé dans son arrêt du 12 mai 1999, Moschenross Cne d'Haguenau que la décision ne pouvait être attaquée que par le pourvoi en cassation, l'article R. 12-5-6 ouvre la voie de la procédure d'appel dans le délai d'un mois, confirmé par la jurisprudence en 2007 dans l'arrêt Département du Puy de Dôme époux Randanne. [...]
[...] La Cour de cassation favorise même cette situation en suspendant sa décision sur des pourvois, lorsqu'elle a connaissance d'une requête administrative formée contre la DUP ou arrêté de cessibilité. C'est le raisonnement suivi par exemple dans la décision de la Cour d'Appel de Limoges, le 8 avril 1992, dans sa décision Commune d'Aubière. Ainsi, l'ordonnance d'expropriation n'est pas définitive tant que le juge de l'excès de pouvoir n'a pas rendu sa décision. Le juge judiciaire pourra ensuite, si besoin, annuler l'ordonnance en constatant l'illégalité de la procédure administrative. [...]
[...] Il s'agit donc de connaître les recours possibles contre cette ordonnance, normalement prise à l'issue de la procédure administrative, si cette dernière se trouve entachée d'irrégularité. Longtemps, l'ordonnance, une fois devenue définitive, n'était plus susceptible de recours. Le transfert de propriété ne pouvait alors plus être annulé directement. Malgré quelques aménagements destinés à limiter ce qui apparaissait déjà comme un déni de justice, la loi du 2 février 1995 apporta une solution plus globale. Depuis, le code de l'expropriation précise en son article L. [...]
[...] Cette position de la Cour peut sembler sévère, en ce qu'elle confirme le transfert de propriété vers la personne publique, malgré l'annulation de la procédure administrative, au seul motif que l'ordonnance est devenue définitive. Cependant, il convient de préciser que la Cour laisse ouverte la possibilité pour la personne privée de réclamer la rétrocession du bien en cas de défaut d'affectation à l'utilité publique; tout comme est ouverte la voie de l'indemnisation. Nous venons donc de voir que dans le cas où l'ordonnance d'expropriation est devenue définitive, le transfert de propriété qu'elle emporte peut l'être aussi, et ce même si postérieurement, le juge administratif venait à déclarer un élément de la procédure administrative illégal. [...]
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