UGAP, Tribunal des conflits, TC, 5 juillet 1999
Le contrat, instrument indéniable du droit privé, est devenu l'un des outils privilégiés de l'action des personnes publiques. La nature de ce contrat est conséquent eu égard le dualisme de droit applicable qui soulève des conflits entre les deux ordres de juridiction, tranchés par le Tribunal des conflits.
En l'espèce, à la demande d'une personne publique, l'Union des Groupements d'Achats Publics (UGAP) a conclu un contrat relatif à la fourniture d'ordinateurs aux hospices civils de Colmar, avec la société SNC ACTIV CSA. Suite à un litige entre les deux parties, une action en justice est intentée devant le Tribunal de Grand Instance de Strasbourg. Le préfet de Haut Rhin déclare alors le juge judiciaire incompétent, le contrat litigieux étant administratif. La Société SNA ACTIV CSA interjette appel devant la Cour d'appel de Colmar qui rejet le déclinatoire de compétence. Le dossier est transmis au Tribunal des conflits.
Par conséquent, la question est de savoir si la seule référence à un cahier des charges est-elle une clause exorbitante de droit commun conférant au contrat un caractère administratif ?
Le Tribunal des conflits répond par la négative et rejette la décision rendue par la Cour d'appel au motif que le fait de qualifier la référence à un cahier des charges d'une clause exorbitante est conditionné par la détention de celui-ci de clauses exorbitantes de droit commun. Il se base ainsi sur deux critères alternatifs pour qualifier un contrat administratif : l'exécution d'un service public ou l'existence, dans le contrat, de clause exorbitante du droit commun. Il retient comme une telle clause, le fait de conférer le pouvoir de résiliation unilatérale du contrat dont dispose la personne publique en l'absence de tout manquement du titulaire du marché à ses obligations contractuelles. De ce fait, la juridiction administrative est compétente pour statuer sur les litiges concernant un tel contrat.
Le Tribunal des conflits opère à une clarification quant aux critères jurisprudentiels d'un contrat administratif (I) tout en procédant à un examen de fond du cahier des charges auquel se réfère le contrat litigieux (II).
[...] Alors un contrat soumis audit code serait un contrat administratif. Cependant il convient de relever de l'arrêt commenté, que le contrat dont la passation est soumise au Code des marchés publics n'est un contrat administratif que s'il satisfait aux critères du contrat administratif. Il est vrai qu'établir un lien entre le Code des marchés publics et le caractère de contrat administratif présente des inconvénients et notamment la dépendance de la qualification du contrat du montant du marché, mais la solution adoptée par le Tribunal des conflits n'est pas non plus sans poser de problème puisqu'elle contient un paradoxe qui aboutit au fait d'un contrat privé peut être un marché public. [...]
[...] Il retient comme une telle clause, le fait de conférer le pouvoir de résiliation unilatérale du contrat dont dispose la personne publique en l'absence de tout manquement du titulaire du marché à ses obligations contractuelles. De ce fait, la juridiction administrative est compétente pour statuer sur les litiges concernant un tel contrat. Le Tribunal des conflits opère à une clarification quant aux critères jurisprudentiels d'un contrat administratif tout en procédant à un examen de fond du cahier des charges auquel se réfère le contrat litigieux (II). [...]
[...] De ce fait, le contrat litigieux n'est pas foncièrement privé. Du reste, le critère tiré de la présence de « clauses exorbitantes de droit commun » est apparue pour la première fois dans une décision rendue par le Conseil d'Etat en 1912 (CE juillet 1912, Société des granits polyphyroïdes des Vosges). Il convient de souligner que le caractère exorbitant d'une clause comme critère du contrat administratif a donné lieu à des variations de jurisprudence à cause de la difficulté de définir une telle notion. [...]
[...] Ainsi, le contrat étant par excellence un instrument de droit privé, c'est à défaut qu'il est qualifié d'administratif. Par conséquent, la présence de clause exorbitante dans la convention de l'arrêt commenté confère au contrat le caractère administratif. Finalement il existe deux critères traditionnels qui permettent d'identifier un contrat administratif. Néanmoins, la doctrine s'est longtemps intéressée à la possibilité de l'existence d'un troisième critère : la soumission d'un contrat passé par une collectivité publique au Code des marchés publics, interrogation levée par le Tribunal des conflits. [...]
[...] Ainsi le Tribunal des conflits relève une clause appartenant à la catégorie jurisprudentielle des clauses impossibles. Il s'agit de stipulation impossible à insérer dans un contrat de droit privé. Le Tribunal des conflits a précédemment eu affaire à des clauses exorbitantes provenant de l'usage, par l'administration, de prérogatives de puissance publique comme par exemple la faculté de prononcer la résiliation unilatérale du contrat, sans mise en demeure préalable et sans indemnité (TC juillet 1962, Cts Cazautets Ville de Limoges) ou l'octroi d'exonérations fiscales au cocontractant (TC juillet 1962, Cts Cazautets Ville de Limoges). [...]
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