Rôle, juge, cas, impossibilité, application, texte, cassation, 2, juillet, 1993
Le Doyen Vedel caractérisait le droit administratif comme « fondamentalement jurisprudentiel ». Ainsi, bien que le droit administratif, comme tout droit, soit basé sur des normes écrites telles que la loi ou la Constitution, il est surtout influencé par la jurisprudence. En effet, bien que l'article 5 du Code civil précise « qu'il est défendu aux juges de se prononcer par voies de dispositions générales et règlementaires sur les causes qui leurs sont soumises », l'article 34 interdit au juge de se réfugier derrière le silence, l'obscurité ou l'insuffisance de la loi. Sinon serait coupable de déni de justice. Il doit donc en dégager une règle qui fait lieu à la jurisprudence, aux principes généraux du droit. Ceux-ci font partie de la jurisprudence, et sont définis comme des règles tirées de l'interprétation des textes législatifs par le juge et dont la portée est générale.
Il semble que Mr Milhaud, ait été concerné par ces principes. En effet, au début des années 1988, le docteur Milhaud se livra a des expérimentations sur un jeune accidenté de la route, plongé dans le coma, afin d'apporter des éléments scientifiques dans un procès. Il était accueilli au service de réanimation du centre hospitalier d'Amiens. Son état s'étant rapidement dégradé, les médecins avaient conclu à sa mort cérébrale au vu d'électro-encéphalogrammes et d'artériographies convergents. L'organisme du jeune patient restait toutefois maintenu en survie artificielle par appareillage. A la suite de la constatation de son décès, la famille du jeune homme fut d'autant plus choquée qu'elle n'avait jamais été mise au courant de ces expériences.
Suite à ces faits, une plainte est déposée contre Mr Milhaud devant le Conseil régional de l'ordre des médecins de Picardie. Ces organismes autonomes sont constitués de conseillers élus par les médecins. Ils possèdent un rôle moral, de protection des intérêts des malades et de la profession, mais également un rôle administratif par son pouvoir réglementaire et un rôle juridictionnel attribué par le législateur. En vertu de cette dernière compétence, le conseil régional de l'ordre des médecins de Picardie rend donc une décision le 14 juin 1988 sanctionnant le comportement de Mr Milhaud à l'égard du jeune patient. Le Médecin fait alors appel au Conseil National de l'Ordre des médecins qui confirme la première décision le 23 janvier 1993. Par conséquent, Mr Milhaud dépose une requête auprès du Conseil d'Etat demandant l'annulation de la décision du Conseil National de l'Ordre des médecins confirmant la décision de la juridiction de première instance. Le Conseil d'Etat est, en l'espèce, compétent car c'est lui qui est chargé de contrôler le fonctionnement de la section du contentieux du Conseil de l'Ordre des médecins à laquelle le législateur attribue une formation proche de celle d'une juridiction administrative.
[...] Lors de la requête de Mr Milhaud, le Conseil d'Etat en tant que juridiction du troisième degré a relevé dans les décisions rendues par les juridictions du Conseil Régional et National de l'Ordre des médecins une erreur de droit. Celle-ci se définie en l'espèce comme une compréhension erronée des motifs prévus par la base légale applicable. En effet, comme le soulève dans ses conclusions le conseiller David Kessler, il n'existe pas en droit français de définition juridique de la mort, il n'existe que des procédures de constatation de la mort. [...]
[...] Il était accueilli au service de réanimation du centre hospitalier d'Amiens. Son état s'étant rapidement dégradé, les médecins avaient conclu à sa mort cérébrale au vu d'électro-encéphalogrammes et d'artériographies convergents. L'organisme du jeune patient restait toutefois maintenu en survie artificielle par appareillage. A la suite de la constatation de son décès, la famille du jeune homme fut d'autant plus choquée qu'elle n'avait jamais été mise au courant de ces expériences. Suite à ces faits, une plainte est déposée contre Mr Milhaud devant le Conseil régional de l'ordre des médecins de Picardie. [...]
[...] En l'espèce, le juge n'a pas estimé qu'il été nécessaire d'appliquer le principe général de droit concernant la publicité des débats car le caractère disciplinaire du jugement ne l'impliquait pas. De plus, le Conseil d'Etat affirme de manière péremptoire, que « les débats ont eu lieu, conformément à l'article 26 du décret du 26 octobre 1948 ». De ce fait, on constate que l'application des principes généraux de droits n'est pas absolue, bien que ceux-ci constitue une des bases du droit administratif, et que l'appréciation du juge est très présente quant à cette application. [...]
[...] De cette manière, la juridiction du premier degré a basé son jugement sur les articles « et 19 [ ] portant Code de déontologie médicale » applicables à des personnes vivantes et conscientes ou, dont la famille est présente si un consentement est à donner dans le cas d'une personne inconsciente. Or, en l'espèce, le cas du patient ne correspondait pas aux caractéristiques des articles précités. En effet, il était considéré comme cérébralement mort. Cette erreur de droit une fois relevée, le Conseil d'Etat doit néanmoins solutionner le fondement légal de la décision pesant sur Mr Milhaud. Cependant, le problème reste entier, aucun texte ne concerne dans ses dispositions claires et précises le cas de Mr Milhaud et de son patient. [...]
[...] Par ce procédé, le juge affirme son pouvoir face au législateur qui rédige les textes applicables. Le juge est celui qui va éclairer les textes parfois obscurs ou inappropriés comme en l'espèce. Il reste ainsi dans sa fonction d'applicateur des lois sans pour autant entrer dans le cadre normateur, de créateur de normes qu'il lui est interdit de pénétrer. Des principes soumis à l'appréciation du juge Cet arrêt révèle donc un des caractères essentiels de l'existence des principes généraux du droit. [...]
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