Responsabilite administrative du fait des lois arret gardedieu 2007

Thèmes abordés

responsabilité administrative, responsabilité du fait des lois, méconnaissance des conventions internationales, responsabilité sans faute fondée sur la rupture d'égalité, responsabilité sui generis, faute, sans faute, arrêt Nicolo, arrêt La Fleurette

Résumé du document

Lorsque la loi contraire au traité cause un préjudice, la responsabilité de l'État est engagée en dehors de toute faute. Il s'agit d'une responsabilité objective qui constitue avec la jurisprudence La Fleurette le second régime de responsabilité de l'État législateur.

Les solutions qui se dégagent du droit international, du droit communautaire et du droit de la Convention européenne des droits de l'homme impliquent l'existence d'une obligation de réparation des dommages causés par une violation des engagements internationaux . Cette responsabilité ne se rattache fà aucun des fondements classiques de la responsabilité administrative : il ne s'agit ni d'une responsabilité pour faute, ni de responsabilité sans faute, mais d'un régime « objectif », « sui generis », comparable à certains régimes législatifs de responsabilité.

Extraits

[...] La reprise expresse de la formule originelle de l'arrêt La fleurette en matière de responsabilité du fait des lois C'est en 1938 que le Conseil d'Etat reconnaît, pour la première fois, la responsabilité sans faute de l'Etat du fait des lois ass., 14/01/1938, Soc. des produits laitiers La Fleurette). Jusqu'à présent le silence gardé par le législateur sur la possibilité d'une responsabilité de l'Etat était interprété comme excluant toute indemnisation. Désormais, le silence du législateur est analysé comme ouvrant droit à une possibilité d'indemnisation. [...]

[...] Mais, la responsabilité de l'Etat ne peut être engagée en raison du fait que le juge administratif ne peut contrôler la constitutionnalité des lois. En revanche, le juge peut, au terme de l'article 55 de la constitution et de son célèbre arrêt Nicolo ass, 20/10/1989) contrôler la compatibilité entre une loi et un engagement international. Ainsi, en reconnaissant une incompatibilité entre deux de ces textes, le Conseil d'Etat constate une irrégularité constitutive d'une faute. Une responsabilité pour faute de l'Etat du fait des lois est donc possible sur cette base. [...]

[...] Pour autant, un certain nombre d'éléments incitent à ne pas ranger la responsabilité dont il est ici question dans la catégorie de la responsabilité pour faute. L'article 55 de la Constitution, tel qu'il est appliqué dans la décision Nicolo, permet de constater l'inconventionnalité de la loi par la voie de l'exception, mais ni sa lettre ni son esprit n'invitent à qualifier une telle inconventionnalité d'acte fautif. Le droit international, oblige à assurer la réparation des préjudices causés par une loi inconventionnelle, mais c'est une obligation qu'il fait reposer de façon objective, sans contraindre le pays à procéder à quelque qualification. [...]

[...] Il résulte de l'arrêt du Conseil d'État La Fleurette[1], qui figure au GAJA. Il permet d'engager la responsabilité de l'État du fait de l'adoption d'une loi sans que soit discutées ni la constitutionnalité, bien sûr, ni même la conventionnalité de celle-ci. Responsabilité objective, elle aboutit à la réparation du préjudice anormal et spécial causé par cette loi, même légale En clair, seules des situations exceptionnelles peuvent donner lieu à indemnisation. Un régime équivalent a été consacré pour les dommages résultant d'une convention internationale. [...]

[...] En second lieu ce régime, permettra de satisfaire les exigences posées par les Cours de Strasbourg et de Luxembourg, et même au-delà s'agissant de la seconde. Ce régime permettra, conformément à la jurisprudence de la CEDH, de réparer intégralement tout préjudice résultant de la méconnaissance par la loi d'une norme internationale, ce qui va au-delà des principes posés par la CJCE dans son arrêt Brasserie du Pêcheur. L'inconventionnalité de la loi pourra entraîner dans le système proposé la réparation du préjudice, alors qu'en toute rigueur la jurisprudence communautaire ne le permettrait pas. [...]