Régime, contentieux, circulaires, administratives, conseil, Etat, 18, novembre, 2002
A défaut de définition légale, la notion de circulaire, originellement conçue comme une simple commodité administrative permettant aux autorités réglementaires d'éclaircir aux services qui leur sont subordonnés les normes les concernant, s'est sensiblement développée au fur et a mesure des décisions rendues par le juge administratif. Ainsi, depuis une soixantaine d'années, cet acte administratif unilatéral n'est plus forcément interprétatif et donc privé de force exécutoire, en effet, il existe également des circulaires revêtant un caractère décisoire, susceptibles de recours. L'arrêt rendu en Section contentieuse du Conseil d'État le 18 novembre 2002 apporte alors des précisions conséquentes au régime contentieux des circulaires administratives.
En l'espèce, une particulière a demandé à bénéficier d'une aide juridictionnelle en vertu de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique. Une aide juridictionnelle est une aide financière permettant aux justiciables a faibles revenus de bénéficier d'une prise en charge par l'État des honoraires et frais de justice. Pour bénéficier de l'aide juridictionnelle, les ressources mensuelles du justiciable doivent être inférieures à un certain plafond. La loi du 10 juillet 1991 exclut du calcul de ces ressources certaines prestations. Le décret du 19 décembre exclut notamment l'allocation de logement familiale (pas l'aide personnalisée au logement), position que reprend la circulaire du 26 mars 1997.
Or, la femme se voit refuser la demande du bénéfice de l'aide juridictionnelle au motif que ses ressources, parmi lesquelles a été comptée l'aide personnalisée au logement, dépassent le plafond conditionnant l'octroi de cette aide juridictionnelle. Ainsi, la demanderesse réclame l'abrogation du décret du 19 décembre 1991 et de la circulaire du 26 mars 1997 en tant qu'ils n'écartent pas l'aide personnalisée au logement du calcul des ressources précédant a l'octroi de l'aide juridictionnelle. Sa demande étant rejetée par le Garde des Sceaux par une lettre du 23 février 2001, elle saisit le Conseil d'Etat par voie du recours pour excès de pouvoir, réclamant alors l'annulation de la lettre du 23 février 2001 et l'abrogation du décret du 19 novembre 1991 et de la circulaire du 26 mars 1997.
[...] Le Conseil a donc admis qu'une circulaire, des lors qu'elle est impérative, peut faire objet d'un recours pour excès de pouvoir. De plus, si elle est illégale, elle doit être annulée ainsi que le refus de l'abroger. C'est en cela que l'arrêt Duvigneres apporte des précisions significatives a la jurisprudence antérieure qui méritent d'être étudiées. La circulaire étant « un pavillon qui peut recouvrir toutes sortes de marchandises : ordres du jour, conseils, recommandations, directives d'organisation et de fonctionnement, règles de droit »1 M Tricot, Conclusions de l'arrêt Institution Notre-Dame du Kreisker , un tri équilibré et clair de circulaires susceptibles ou non d'être déférées s'imposait. [...]
[...] Il s'agit donc de circulaires qui fixent, dans le silence des textes, une loi nouvelle. La règle nouvelle fixée par la circulaire peut alors d'abord faire l'objet d'illégalité externe, a savoir le défaut de compétence de l'auteur. Cela pourrait alors être le cas d'un ministre qui prendrait une circulaire comportant une règle nouvelle, étant donné que ce dernier n'a de pouvoir réglementaire général que dans des hypothèses très limitées8 Arrêt Trani octobre 1967, Incompétence peut être invoquée par parties à tout moment de la procédure : seule une habilitation législative ou du premier ministre est susceptible d'autoriser l'adoption de mesures réglementaires par un ministre. [...]
[...] Le Conseil d'État détermine alors un nouveau critère de recevabilité, a savoir le caractère impératif des dispositions de la circulaire La distinction traditionnelle entre circulaires interprétatives et circulaires réglementaires progressivement écartée Pour comprendre l'arrêt Duvigneres, il faut d'abord s'intéresser a la jurisprudence admise jusqu'alors en matière de régime contentieux des circulaires administratives. C'est par l'arrêt Institution Notre-Dame du Kreisker en date du 29 janvier 1954 que le Conseil d'État fixe les modalités de recevabilité du recours pour excès de pouvoir contre les circulaires, encore en vigueur en 2002. Il distingue alors les circulaires interprétatives et les circulaires réglementaires. D'une part sont donc identifiées les circulaires interprétatives, celles-ci constituant la majorité des circulaires. [...]
[...] en date du 1er avril 1949 ainsi que par l'arrêt Institution Notre-Dame de Kreisker. Toutefois, cette distinction est contestable du fait notamment de sa difficile mise en oeuvre. En effet, la distinction ne valait pas simplement pour les circulaires elles-mêmes, mais également pour leur contenu. Ainsi, les circulaires pouvaient très bien comprendre a la fois des dispositions interprétatives et des dispositions réglementaires. Par ailleurs, l'application de la distinction entre les deux types de circulaires a pu entrainer des erreurs d'interprétation. [...]
[...] Le décret du 19 décembre exclut notamment l'allocation de logement familiale (pas l'aide personnalisée au logement), position que reprend la circulaire du 26 mars 1997. Or, la femme se voit refuser la demande du bénéfice de l'aide juridictionnelle au motif que ses ressources, parmi lesquelles a été comptée l'aide personnalisée au logement, dépassent le plafond conditionnant l'octroi de cette aide juridictionnelle. Ainsi, la demanderesse réclame l'abrogation du décret du 19 décembre 1991 et de la circulaire du 26 mars 1997 en tant qu'ils n'écartent pas l'aide personnalisée au logement du calcul des ressources précédant a l'octroi de l'aide juridictionnelle. [...]
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