Recours, excès, pouvoir, administration, pénitentiaire, cas, Payet, Boussouar, Planchenault, cassation, 14, décembre, 2007
A l'heure de l'examen de la réforme pénitentiaire par le Sénat, les conditions de vie des détenus sont un sujet sensible dans l'actualité. Néanmoins, le respect des droits des détenus est un sujet récurrent, et qui peut se traduire par des manifestations très diverses.
Ainsi, une jurisprudence nombreuses s'intéresse aux recours des détenus contre les mesures prises au cours de leur détention. Les arrêts Payet, Boussouar et Planchenault pris par la Cour de Cassation le 14 décembre 2007 en sont une illustration.
Les arrêts en question affirment la recevabilité des recours pour excès de pouvoir soumis au Conseil d'Etat à l'encontre de décisions prises par l'administration pénitentiaire.
Dans l'arrêt Payet, un détenu ayant commis plusieurs tentatives d'évasion fait l'objet de transferts fréquents afin de prévenir d'autres évasions. Par une procédure de référé-suspension, il conteste cette mesure de rotation de sécurité. Le tribunal administratif de Paris ayant rejeté le recours, il se pourvoit en cassation. Le Conseil d'Etat déclare la demande recevable mais, ne constatant pas de caractère d'urgence, il laisse au juge des référés le soin de statuer sur le fond.
Dans l'arrêt Boussouar, un détenu conteste une mesure décidant d'un changement d'affectation décidant son transfert d'une maison centrale à une maison d'arrêt. La Cour administrative d'appel satisfait à la demande, et le garde des Sceaux à l'origine de la décision de changement d'affectation se pourvoit en appel. Le Conseil d'Etat juge que la cour administrative d'appel a commis une erreur de droit quant aux raisons pour lesquelles elle a déclaré la demande recevable, et substitue donc un autre motif à celui donné par la juridiction inférieure sans contester la recevabilité de la demande. Il considère aussi qu'une erreur de droit est intervenue concernant la motivation des actes administratifs, mais substitue là encore un autre motif à celui avancé par la cour administrative d'appel. Le recours du ministre de la justice sera rejeté.
Enfin, dans l'arrêt Planchenault, un détenu demande au Conseil d'Etat l'annulation de la décision de la directrice de sa maison d'arrêt le déclassant de son emploi. Sa demande a été rejetée en première instance et en appel au motif qu'il s'agissait d'une mesure d'ordre intérieur. Le Conseil d'Etat a décidé au contraire que la demande était recevable, mais la rejette sur le fond.
Avant d'analyser la légalité d'un acte, le juge doit vérifier que la requête est bien recevable. Au titre des conditions de recevabilité figure la règle de la décision préalable. Cette dernière impose que le recours soit dirigé contre une décision. Ainsi, les circulaires et directives ne peuvent pas faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, car il ne s'agit pas de décisions. En revanche, les mesures d'ordre intérieur sont de véritables décisions, mais de trop faible importance pour donner lieu à un recours.
En principe, les décisions de l'administration pénitentiaire relèvent du domaine des mesures d'ordre intérieur et échappent donc à tout contrôle de la part du juge. Mais ces trois décisions viennent affirmer la recevabilité du recours exercé à l'encontre de décisions de ce type. Par ce revirement de jurisprudence, le juge administratif étend son contrôle sur plusieurs actes administratifs affectant la situation des détenus.
[...] Ainsi, les circulaires et directives ne peuvent pas faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, car il ne s'agit pas de décisions. En revanche, les mesures d'ordre intérieur sont de véritables décisions, mais de trop faible importance pour donner lieu à un recours. En principe, les décisions de l'administration pénitentiaire relèvent du domaine des mesures d'ordre intérieur et échappent donc à tout contrôle de la part du juge. Mais ces trois décisions viennent affirmer la recevabilité du recours exercé à l'encontre de décisions de ce type. [...]
[...] C'est l'arrêt Caillol du 27 janvier 1984 qui vient affirmer cette sévérité en matière de décisions de l'administration pénitentiaire. Cette décision rendue en Assemblée du contentieux allait à l'encontre des conclusions du commissaire du gouvernement. Le juge administratif, refusait en l'espèce d'examiner la mesure par laquelle un détenu avait été placé en quartier de plus grande sécurité Il refusait aussi de connaître de décisions semblables par la voie d'une action en responsabilité, notamment dans son arrêt Spire du 9 juin 1978. [...]
[...] En effet, ces décisions ont toutes deux pour effet de restreindre l'application des mesures d'ordre intérieur, et les raisons avancées en 1995 sont les mêmes que celles pouvant être reconnues en 2007. Le rétrécissement du domaine des mesures d'ordre intérieur, un revirement de jurisprudence intervenu à l'issue de longues hésitations Malgré les apports des arrêts Hardouin et Marie, le domaine des décisions de l'administration pénitentiaire est resté très imperméable aux recours dans un premier temps Par la suite, les arrêts du Conseil d'Etat du 14 décembre 2007 sont venus apporter des changements concrets en la matière Une évolution nuancée de la jurisprudence après 1995 Malgré l'évolution de la jurisprudence du juge administratif intervenue avec les arrêts Hardouin et Marie, les conséquences attendues de ces arrêts ont mis un certain temps avant de se produire. [...]
[...] Le recours du ministre de la justice sera rejeté. Enfin, dans l'arrêt Planchenault, un détenu demande au Conseil d'Etat l'annulation de la décision de la directrice de sa maison d'arrêt le déclassant de son emploi. Sa demande a été rejetée en première instance et en appel au motif qu'il s'agissait d'une mesure d'ordre intérieur. Le Conseil d'Etat a décidé au contraire que la demande était recevable, mais la rejette sur le fond. Avant d'analyser la légalité d'un acte, le juge doit vérifier que la requête est bien recevable. [...]
[...] le détenu] est, dès lors, fondé à en demander l'annulation De même, dans l'arrêt Boussouar, la Haute Juridiction statuait sur une demande d'annulation d'une décision de changement d'affectation. Elle a établi en l'espèce que cette décision de changement d'affectation d'une maison centrale, établissement pour peines, à une maison d'arrêt [constituait] un acte administratif susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir et non une mesure d'ordre intérieur Enfin, dans l'arrêt Planchenault du même jour, le Conseil d'Etat venait affirmer que la décision de déclassement d'un détenu de son emploi constituait un acte administratif susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir Ainsi, dans ces trois arrêts du 14 décembre 2007, le Conseil d'Etat abandonne sa jurisprudence initiale et admet la recevabilité de décisions de l'administration pénitentiaire. [...]
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