Conseil d'État, Assemblée, 10 juillet 1996, Cayzeele, distinction, actes unilatéraux, contrats administratifs
Le recours pour excès de pouvoir est « l'arme la plus efficace, la plus économique et la plus pratique qui existe au monde pour défendre des libertés individuelles ».
Cette citation de Gaston Jèze met en exergue le fait que le recours pour excès de pouvoir permet de prononcer l'annulation d'une décision administrative du fait de son illégalité, elle permet le contrôle de la légalité et donc implicitement la défense des libertés. C'est dans cette optique que s'inscrit l'arrêt que nous allons commenter. En effet, un tiers demande l'annulation d'une clause réglementaire introduite dans un contrat administratif. Arrêt qui fut notamment rendu en Assemblée et publié au recueil Lebon, il s'agit donc d'une décision importante.
[...] Léon Duguit différenciait ce type de recours, au contentieux subjectif qui visait à reconnaître des droits subjectifs. Il s'agit par conséquent, du recours contractuel car le cocontractant de l'administration se plaint du non respect par l'administration des clauses contractuelles. C'est sur ce fondement que se base le Tribunal administratif de Grenoble pour rejeter sa demandant tendant à l'annulation du 2e alinéa de l'article 7 d'un contrat. En effet, le tribunal fait application de la jurisprudence traditionnelle et rejeta les conclusions de l'intéressé. [...]
[...] Le Conseil d'État juge que les « dispositions dont M.X a demandé l'annulation ont un caractère réglementaire ; qu'elles peuvent, par suite, être contestées devant le juge de l'excès de pouvoir ». Il est donc admis et cela pour la première une incursion du juge de l'excès de pouvoir dans les stipulations contractuelles. Selon Didier Chauvaux et Thierry Girardot « le juge va alors pouvoir s'immiscer dans les rapports contractuels. » D'autant plus, que le requérant a bien un intérêt à agir. [...]
[...] Ainsi, en principe, le contrat administratif est radicalement incompatible avec le contentieux de l'excès de pouvoir. Ce recours paraît donc impossible à mettre en œuvre contre un contrat. L'acte administratif unilatéral s'opposant au contrat administratif, il paraît donc impossible de recourir au contentieux de l'excès de pouvoir. Notamment car le contrat administratif est considéré comme un acte créateur de droit subjectif. Néanmoins, la jurisprudence a contourné à plusieurs reprises cette irrecevabilité. C'est donc dans cette lignée que s'inscrit l'arrêt Cayzeele. [...]
[...] L'arrêt met également en exergue les règles de publicité propres aux actes réglementaires. Ainsi, le Conseil d'État considère qu'en l'absence de publication du contrat, le délai de recours n'a pu commencer de courir alors même que M. X aurait obtenu une copie de la convention en cause. Le Conseil d'État applique alors la jurisprudence en vertu de laquelle seule la publication fait courir les délais de recours à l'encontre d'un acte réglementaire : CE juillet 1993, Syndicat CGT du personnel de l'hôpital Dupuytren. [...]
[...] Elle s'inscrit dans la théorie de l'acte mixte qui va permettre de tirer les conséquences du caractère réglementaire des clauses imposants des obligations aux tiers. Le fait que ces clauses soient divisibles des autres stipulations du contrat permet au juge de l'excès de pouvoir d'annuler uniquement ces clauses et donc de ne pas toucher à la substance même du contrat et donc de ne pas contrevenir à la liberté contractuelle des parties. Le Conseil d'État a par la suite repris la décision qu'il a rendu dans l'arrêt que nous venons de commenter, notamment dans l'arrêt du 8 avril 2009, Association Alcaly dans lequel il reconnaît que les clauses réglementaires d'un contrat sont par nature divisible de l'ensemble du contrat. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture