Commentaire de l'arrêt Gomard, Conseil d'Etat, 13 décembre 1968, la déontologie des fonctionnaires, fonction publique, procédure disciplinaire
La déontologie des fonctionnaires n'apparait pas dans le statut général de la fonction publique. Cependant les fonctionnaires ont des obligations et très précisément des obligations juridiques. Lorsque les fonctionnaires ont manqué à une ou plusieurs obligations afférentes à l'exercice de leurs fonctions, une procédure disciplinaire peut sanctionner les fonctionnaires et mener à une révocation. C'est de la déontologie et de la procédure de révocation dont il est question dans l'arrêt Gomard du Conseil d'Etat du 13 décembre 1968. Dans cet arrêt les faits sont les suivants.
Sieur Gomard, inspecteur principal des impôts à la direction des enquêtes et recherches de la région parisienne a été en relation avec des trafiquants d'alcool.
La commission administrative paritaire a rendu un avis, en conséquence le 29 juillet 1963 le ministre de l'Economie et des Finances prend un arrêté prononçant la révocation de sieur Gomard sans suspension des droits à pension.
[...] On peut toutefois se demander si cette double procédure ne conduit pas à un cumul des peines pour un même fait. Le fonctionnaire est ainsi puni deux fois, une première fois par une sanction disciplinaire qui peut aller jusqu'à le révoquer, et une sanction pénale ou il encourt une peine de prison. La solution est la procédure aurait été différente si sieur Gomard n'avait pas été révoqué mais suspendu. Lorsqu'un fonctionnaire fait l'objet de poursuite pénale, la présomption d'innocence ne s'oppose pas à la prise d'une mesure de suspension. [...]
[...] Il examine la composition du dossier communiqué à sieur Gomard Pour dégager ensuite le principe de l'indépendance de l'action pénale et disciplinaire Le dossier soumis au conseil de discipline L'instruction d'une affaire disciplinaire est destinée à permettre à l'administration de prendre une décision la plus objective possible à l'égard d'un agent et en même temps d'offrir à l'intéressé un exercice le plus satisfaisant possible de ses droits à la défense. L'instruction comporte trois temps forts : la suspension de fonction, la communication du dossier, la motivation de l'action disciplinaire. En l'espèce, sieur Gomard conteste la régularité de la procédure suivie. Selon sieur Gomard le dossier contenait des déclarations défavorables pour lui. De plus l'exactitude de ces pièces a été contestée au cours d'une instance judicaire. [...]
[...] Or, la notion de bonnes mœurs qui correspond au respect de la profession dans sa vie privée et professionnelle, évolue ; et ce qui est répréhensible hier ne l'est plus aujourd'hui. Cette obligation et les sanctions qui accompagnent son manquement semblent donc assez subjectives. De plus, en l'espèce, rien ne démontre encore que sieur Gomard ait participé à ce trafic d'alcool, ni qu'il ait eu connaissance de ce trafic. Sieur Gomard a été peut être sanctionné alors qu'il pensait ses amis comme des personnes aux bonnes mœurs. [...]
[...] Nous ne traitons ici que des relations que sieur Gomard avait avec ces trafiquants. Dans ses agissements le fonctionnaire ne doit pas porter atteinte à la réputation de l'administration. Le fait que Sieur Gomard ait pour ami des trafiquants d'alcool, compte tenu de sa profession d'inspecteur général des impôts, est contraire à la probité. Le genre de vie du fonctionnaire, l'absence totale de dignité d'un magistrat dans sa vie privée (CE 21 février 1968, Aubertin), ou des relation et fréquentations douteuses, constituent autant de manquements à cette obligation de moralité qui reste éminemment subjective. [...]
[...] La faute disciplinaire porte atteinte à des biens inestimables, elle sanctionne des devoirs moraux plus étendus, des manquements à une obligation de la déontologie des fonctionnaires. Aussi, pour le même fait la gravité sera appréciée très différemment sur le plan disciplinaire et sur le plan pénal. Enfin les différences dans la technique d'application sont fondamentales, les grands principes du droit pénal (légalité des incriminations et des sanctions, autorité de la chose jugée, prescription de l'action publique) sont sans application en droit disciplinaire. [...]
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