Conseil d'Etat 30 octobre 2009 transposition d'une directive en droit interne
En l'espèce, Madame P, une magistrate a été nommée vice présidente au Tribunal de Grande Instance de Périgueux par un décret du Ministre de la Justice, Garde des Sceaux, en date du 24 août 2006 ; ce même décret donnant à une seconde magistrate le poste de chargé de formation à l'Ecole Nationale de Magistrature, que Madame P convoitait.
Elle dépose alors une requête devant le Conseil d'Etat, demandant l'annulation du décret du 24 août 2006. Elle soutient que la décision du Ministre de la Justice est entachée d'une erreur de droit ; elle évoque une discrimination en raison des activités syndicales qu'elle exerce, connues de l'administration. Madame P invoque alors « le bénéfice des règles relatives à la charge de la preuve fixées par l'article 10 de la directive du Conseil du 27 novembre 2000 » dont le délai de transposition avait pourtant expiré.
La question à laquelle le Conseil d'Etat va alors devoir donner une solution est donc de savoir si Madame P peut invoquer l'article 10 de cette directive du 27 novembre 2000, qui n'a pas été transposée en droit interne avant l'expiration du délai. Le Conseil d'Etat va par là pouvoir déterminer si la décision du Ministre de la Justice est entachée d'une erreur de droit.
Dans son arrêt du 30 octobre 2009, le Conseil d'Etat répond par la négative : il rejette la requête de Madame P concernant l'annulation du décret du 24 août 2006, et énonce que le choix du Ministre de la Justice n'est pas entaché d'une erreur de droit.
Il est alors intéressant de déterminer dans quel sens la décision du Conseil d'Etat est justifiée (1) puis d'analyser l'application de la directive invoquée par la magistrate (2).
[...] C'est donc pour cela que dans son arrêt du 30 octobre le Conseil d'Etat a appliqué la directive du 27 novembre 2000. De plus, dans cet arrêt, le Conseil d'Etat évoque le caractère constitutionnel de l'obligation de transposition d'une directive en droit interne. Il se base pour cela sur l'article 88-1 de la Consitutiton. C'est ceci qui explique qu'une directive est applicable en droit interne même si elle n'a pas été transposée dans le délai imparti. [...]
[...] Le Conseil d'Etat affirme que la décision du Ministre de la Justice n'est pas entaché d'erreur de droit, malgré la présomption d'une discrimination qui va être écartée par la preuve de l'absence d'une erreur de droit A : La présomption d'une discrimination. La magistrate a basé sa demande d'annulation du décret du 24 août 2006 sur une présomption de discrimination à son égard. Selon elle, se « candidature aurait été écartée en raison de ses responsabilités syndicales connues de l'administration ». Le Conseil d'Etat admet que les éléments qu'elle a rapportés sont en effet susceptibles de faire présumer l'existence de la discrimination qu'elle invoque. [...]
[...] C'est en partie sur ce sujet que se penche le Conseil d'Etat dans son arrêt du 30 octobre 2009. En l'espèce, Madame une magistrate a été nommée vice présidente au Tribunal de Grande Instance de Périgueux par un décret du Ministre de la Justice, Garde des Sceaux, en date du 24 août 2006 ; ce même décret donnant à une seconde magistrate le poste de chargé de formation à l'Ecole Nationale de Magistrature, que Madame P convoitait. Elle dépose alors une requête devant le Conseil d'Etat, demandant l'annulation du décret du 24 août 2006. [...]
[...] Ce régime de la preuve (c'est le défendeur qui doit prouver l'absence d'erreur de droit) est tiré de l'article 10 de la directive n° 2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000, invoqué par la magistrate. Le Conseil d'Etat a donc rendu sa décision sur la base de cette directive, qui n'avait pourtant pas été transposée en droit interne dans le délai imparti : L'application d'une directive non transposée en droit interne dans les délais. Il est évident à la lecture de l'arrêt que la directive invoquée par la magistrate est applicable en droit interne alors qu'elle n'a pas été transposée dans les délais, ce qui est pourtant une obligation constitutionnelle comme le rappelle le Conseil d'Etat. [...]
[...] Quant au ministre, c'est à lui d'apporter les éléments permettant de prouver qu'il n'y a pas de discrimination, dans la décision qu'il rend. B : La preuve de l'absence d'erreur de droit. « Il incombe au défendeur de produire tous les éléments permettant d'établir que la décision attaquée repose sur des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ».C'est donc au Ministre de la Justice d'apporter ces preuves. Le Conseil d'Etat a retenu les preuves que le Ministre a rapportées, et c'est pour cela que la solution de l'arrêt est justifiée. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture