commentaire d'arrêt, comparé; CE; Conseil d'Etat; 3 décembre 1999; Association ornithologique et mammologique de Saône et Loire; Association France nature environnement; Ligue pour la protection des oiseaux; 25 janvier 2002
Les compétences du juge administratif en matière de contrôle de conformité du droit interne aux textes de droit de l'Union Européenne sont parfois incertaines. Par deux arrêts en date du 3 décembre 1999 et du 25 janvier 2002, le Conseil d'État a eu l'occasion de se prononcer sur l'étendu et les limites des pouvoirs du juge.
En l'espèce, concernant l'arrêt rendu par le Conseil d'État en date du 3 décembre 1999, les associations de défense de l'environnement se sont d'abord adressées au Premier Ministre pour qu'il engage, conformément à l'article 37 alinéa 2 de la Constitution, une procédure de modification des dispositions réglementaires qui se trouvent dans ces lois. De plus, elles se sont adressé au Ministre de l'Environnement, en tant qu'autorité de police de la chasse, dans le dessein qu'il fixe les dates d'ouverture et de fermeture de la chasse, conformément aux dispositions de Code rural. Ayant essuyé des refus de la part du Premier Ministre et du Ministre de l'Environnement, les associations ont saisi le Conseil d'État d'un recours pour excès de pouvoir. Les associations requérantes ont formé un recours afin de rendre inapplicables les dispositions des lois de 1994 et de 1998, introduites à l'article L. 224-2 du code rural, relatives aux dates d'ouverture anticipée et de clôture temporaire de la chasse au gibier d'eau. Elles soutiennent, que ces dispositions méconnaissent la directive de l'Union Européenne du 2 avril 1979 relative à la conservation des oiseaux sauvages.
En l'espèce, concernant l'arrêt rendu par le Conseil d'État en date du 25 janvier 2002, la Ligue pour la protection des oiseaux a saisi le Conseil d'État d'un recours en annulation de certaines dispositions du décret d'application du 1er août 2000. En effet, dans le but de mettre fin au contentieux relatif aux dates d'ouverture et de fermeture de la chasse, une loi a été adoptée le 26 juillet 2000. L'article 24 de cette loi reprend les stipulations de la directive de l'Union Européenne. Pour se conformer à cette directive, les dates où la chasse est permise doivent être comprises entre le 1er septembre et le 31 janvier. Cependant, le décret d'application de la loi de 2000 autorise l'ouverture de la chasse à des dates antérieures au 1er septembre et la fermeture de la chasse à des dates postérieures au 31 janvier pour certaines espèces d'oiseaux migrateurs. Le Conseil d'État a donc été appelé à se prononcer sur la conformité du décret avec les objectifs de la directive.
La question commune que soulèvent ces deux arrêts pourrait être formulée de la sorte : le juge administratif peut-il contrôler la conformité d'un texte de droit interne vis-à-vis du droit de l'Union Européenne et dans quelles limites ?
Par un arrêt rendu le 3 décembre 1999, le Conseil d'État, s'appuyant sur l'interprétation de la Cour de Justice des Communautés Européenne de la directive en question, annule les décisions ministérielles au motif que l'alinéa 2 de l'article L 224-2 est incompatible avec la directive.
Par un arrêt en date du 25 janvier 2002, le Conseil d'État sursoit à statuer et renvoie une question préjudicielle à la Cour de Justice des Communautés Européennes. En effet, il conclut que les dispositions contestées étaient incompatibles avec l'objectif de protection complète des espèces énoncé par la directive. Cependant, cette directive permet de déroger à ce principe dans certains cas qui paraissent flous.
Ainsi, la juge administratif affirme l'étendue de ses compétences afin d'assurer la suprématie du droit de l'Union Européenne en droit interne (I) mais admet ses limites en matière de contrôle de conformité du droit interne (II).
[...] Lorsque la Cour de Justice des Communautés Européennes s'est prononcée sur une difficulté d'interprétation, le Conseil d'État doit se référer à cette jurisprudence, comme il l'a fait dans l'arrêt Association ornithologique et mammologique de Saône et Loire et Association France nature environnement. En effet, si le juge administratif s'écarte de l'interprétation de la précédente Cour, il commet une illégalité. En l'espèce, La CJCE, dans un arrêt en date du 16 octobre 2003, a conclu à l'incompatibilité des dispositions de l'article 2 du décret aux objectifs de la directive. [...]
[...] En l'espèce, l'association ornithologique et mammologique de Saône et Loire et l'association France nature environnement ont déposé un recours en annulation contre le refus du Premier Ministre de mettre en œuvre une procédure de modification d'un texte législatif. En effet, le texte réglementaire est un texte à valeur législative et pouvait donc, en vertu de l'article 37 alinéa 2 de la Constitution, ce texte peut être modifié par décret. Cette décision se rattache à l'exercice du pouvoir réglementaire. Ainsi, la décision est susceptible d'annulation par le juge administratif lors d'un recours pour excès de pouvoir. [...]
[...] A') Le renvoie préjudiciel devant la Cour de Justice Européenne pour difficulté d'interprétation. - Au départ, Le Conseil d'État n'avait pas recours à la question préjudicielle en matière de d'interprétation du droit de l'Union Européenne car il estimait ne rencontrer aucune difficulté sérieuse. On peut fournir l'exemple de l'arrêt Cohn-Bendit Ass décembre 1978, Min. de l'intérieur Cohn-Bendit, 11604) dans lequel le Conseil d'État affirmait le fait que le requérant ne puisse invoquer une directive, qu'elle soit transposée ou non, à l'appui d'un recours contre une mesure individuelle. [...]
[...] La loi interne doit donc être conforme aux objectifs du droit de l'Union Européenne et à l'interprétation qu'en fait la Cour de Justice des Communautés Européennes. En effet, les objectifs avaient été préalablement interprétés par la Cour de Justice des Communautés Européennes dans un arrêt en date de 1994 (CJCE janvier 1994, Association pour la protection des animaux sauvages Préfet de Maine-et-- Loire et Préfet de Loire-Atlantique), Affaire C-435/92, Recueil de jurisprudence 1994 p. I-00067). De plus, tout justiciable peut se prévaloir des dispositions d'une directive lorsque l'État n'a pas pris, dans les délais impartis par celle- ci, les mesures de transposition nécessaires. [...]
[...] Par un arrêt en date du 25 janvier 2002, le Conseil d'État sursoit à statuer et renvoie une question préjudicielle à la Cour de Justice des Communautés Européennes. En effet, il conclut que les dispositions contestées étaient incompatibles avec l'objectif de protection complète des espèces énoncé par la directive. Cependant, cette directive permet de déroger à ce principe dans certains cas qui paraissent flous. Ainsi, la juge administratif affirme l'étendue de ses compétences afin d'assurer la suprématie du droit de l'Union Européenne en droit interne mais admet ses limites en matière de contrôle de conformité du droit interne (II). [...]
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