Théorie du bilan cout-avantage, droit administratif des biens, projet d'aménagement, présomption d'irréfragabilité, utilité publique
L'arrêt rendu par le Conseil d'Etat le 22 octobre 2003, Association SOS Rivières et Environnement figure au nombre des rares décisions tendant à l'annulation d'une déclaration d'utilité publique après application de la théorie du bilan en ce qu'il énonce que « les inconvénients du projet l'emportent sur ses avantages dans des conditions de nature à lui faire perdre son caractère d'utilité publique ».
En l'espèce, le décret du 29 janvier 2001 a déclaré d'intérêt général et d'utilité publique le projet de création d'un barrage dans le département de la Charente maritime destiné à favoriser la production d'huîtres dans le bassin de Marennes-Oléron et à soutenir le débit d'étiage de la Charente et de la Boutonne.
Suite à cette déclaration d'utilité publique et conformément à la procédure de l'expropriation pour cause d'utilité publique, définie comme l'opération par laquelle un particulier est contraint de céder la propriété d'un immeuble dans un but d'utilité publique et moyennant une juste et préalable indemnité dont doivent pouvoir bénéficier tous les propriétaires expropriés, la DUP ayant été déclarée par décret, ce dernier est susceptible de recours pour excès de pouvoir devant le CE. Ainsi, plusieurs requêtes tendant à l'annulation de ce décret ont été portées devant la juridiction administrative, notamment par l'association SOS Rivières environnement et par le parti les Verts Poitou Charentes.
Le problème qui s'est posé au CE imposait ce dernier à raisonner en deux temps. Il devait d'abord déterminer si la construction du barrage présentait une utilité publique. Après avoir répondu à cette question par l'affirmative, il était conduit à appliquer la théorie du bilan pour déterminer si l'opération ne comportait pas des atteintes à la propriété privée, un coût financier, des inconvénients d'ordre social et des atteintes à d'autres intérêts publics excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente, auquel cas il annulerait le décret du 29 janvier 2001.
A cette double question, le CE a répondu en deux temps. Après avoir relevé que le projet de barrage présente une utilité publique, bien qu'il la qualifie de « faible », cette faiblesse présuppose toutefois son existence, il affirme que les inconvénients du projet l'emportent sur ses avantages dans des conditions de nature à lui faire perdre son caractère d'utilité publique et prononce ainsi l'annulation de décret du 29 janvier 2001, enterrant de cette façon le projet de barrage de la Trézence.
La solution rendue par le CE, bien qu'elle fasse application de la théorie du bilan coût-avantages dégagée à l'occasion de l'arrêt Ville Nouvelle-Est rendu en 1971, rompt avec une longue tradition qui tend de manière générale, à faire bénéficier les grands projets d'aménagement d'une présomption quasi irréfragable de légalité (AJDA 2004 p. 1193, R. HAUSTIOU).
[...] Voir note de M.F DELHOSTE, RFDA 2006 p Vers un renforcement du contrôle du JA de la DUP de grands projets ? Traditionnellement, les projets de grande envergure bénéficient d'une présomption quasi irréfragable de légalité, que le CE renverse dans cet arrêt. La théorie du bilan conduit en effet, le plus souvent, le juge à entériner les choix qui sont ceux de l'administration, ce qui génère par la même occasion une insatisfaction dans une partie de la doctrine, tentée parfois de réinventer ce mode de contrôle des actes de l'administration (voir B. [...]
[...] Il devait d'abord déterminer si la construction du barrage présentait une utilité publique. Après avoir répondu à cette question par l'affirmative, il était conduit à appliquer la théorie du bilan pour déterminer si l'opération ne comportait pas des atteintes à la propriété privée, un coût financier, des inconvénients d'ordre social et des atteintes à d'autres intérêts publics excessifs eu égard à l'intérêt qu'elle présente, auquel cas il annulerait le décret du 29 janvier 2001. A cette double question, le CE a répondu en deux temps. [...]
[...] D'autre part, tout en soulignant que cela n'avait pas à intervenir dans l'appréciation du bilan il notait que ce projet, aboutissement d'un long travail avait pour caractéristique de faire l'unanimité des élus et des professionnels concernés et que seuls par conséquent les experts s'étaient montrés partagés à son sujet. Cet arrêt s'inscrit dans la continuité de la place croissante accordée aux experts dans la prise de décision par le JA. On peut imaginer que les facteurs environnementaux auront un poids de plus en plus important dans la théorie du bilan, de façon à ce que l'administration mette son veto même sur des projets de grande envergure dès lors qu'ils présentent un risque pour l'environnement. [...]
[...] -2ème objectif : soutenir les débits d'étiage de la Charente et de la Boutonne. Il ne ressort pas des pièces du dossier Contrôle du JA étroit. Les auteurs du projet auraient dû apporter la preuve. -aucun projet de développements touristiques 2. Les inconvénients du projet plus lourds que ses avantages : résultat de l'application de la théorie du bilan -Evaluation du coût de l'opération : 67 millions d'euros. Il est regrettable que l'importance du coût d'une opération d'aménagement comme, de manière générale, de tout investissement, est par définition relative, cet élément n'étant, par conséquent, relevé par le juge que dans la mesure où l'intérêt de l'opération lui apparaît par ailleurs limité et incertain. [...]
[...] Or le CE relève l'aléa. Donc risque que cet objectif ne se réalise pas. S'il est réalisé, faible importance. Commenter en tout état de cause : le caractère irréversible. Syn de quoiqu'il en soit, idée de fatalité, d'irréversibilité. Aux vues du premier objectif, le projet est inintéressant car d'un très faible rendement. Insister sur le fait que les auteurs du projet admettent eux-mêmes l'incertitude de l'incidence du barrage sur la ponte des larves d'huîtres. [...]
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