Vincent DE GAULEJAC est directeur du Laboratoire de changement social et professeur de sociologie à l'université Paris-VII.
Il est le fondateur et le Directeur du Laboratoire de Changement social (Paris VII). Président du Comité de recherche en sociologie clinique de l'Association Internationale de Sociologie, il dirige actuellement la collection Sociologie clinique chez Eres et la revue Changement social. Ses nombreuses recherches portent sur le pouvoir dans les organisations, les processus de changement, et sur le sujet face aux déterminations sociales et psychiques. Parmi ses nombreuses publications figurent 14 livres dont L'Emprise de l'organisation ; La névrose de classe ; Le Coût de l'excellence ; La Lutte des places ; L'Histoire en héritage, roman familial et trajectoire sociale.
C'est à son plus récent ouvrage, s'intitulant La société malade de la gestion (Seuil, Paris, 2005), auquel nous nous intéressons particulièrement.
Selon l'auteur, la gestion est au cœur de notre système économique, social et politique. Les considérations comptables et financières l'emportent sur les considérations humaines et sociales.
C'est pourquoi il importe de se demander en quoi l'idéologie gestionnaire se répercute sur la société dans son ensemble ?
Ainsi, il convient, dans une première partie de montrer que l'idéologie gestionnaire est au cœur de la société (société en tant qu'entreprise et groupement d'individus), puis dans un second temps de prouver la corrélation entre idéologie gestionnaire et responsabilité sociale de l'entreprise.
[...] D'où la volonté croissante de mettre en place une GPEC (Gestion Prévisionnelle des Emplois et Compétences). Pour répondre à ce besoin d'anticipation, le bilan de compétences est un outil qui tend à s'imposer. En effet, l'humain a un potentiel qu'il s'agit de développer afin de le mettre en synergie avec les objectifs de rentabilité de l'entreprise. Licenciement : Avec l'idéologie gestionnaire, le DRH se trouve souvent contraint de diminuer les effectifs, qui est désormais considérée comme la variable d'ajustement par excellence ( plans sociaux, fermeture de site, ou licenciement individuel) dans le seul but d'accroître sa rentabilité financière et ainsi de satisfaire les actionnaires. [...]
[...] On n'a pas le même sens de la qualité selon que l'on est de l'un ou l'autre coté (employeur ou salarié). La qualité s'avère plutôt être un outil de pression pour renforcer la productivité et la rentabilité qu'un outil d'amélioration des conditions de la production. Aussi, le système de valeurs prôné par l'entreprise favorise l'engagement individuel. Le travail doit avant tout être un lieu de réalisation de soi-même. La recherche du profit est couplée à un idéal qui n'est autre que l'éthique. [...]
[...] Pour l'inciter à suivre cette voie, on associe la gestion au désir d'entreprendre et de progresser, on le pousse à l'excellence, lui promet de belles récompenses. D'ailleurs, depuis les années 1990, la notion de qualité s'est diffusée dans les entreprises. Elle a pour but de dépasser les objectifs de performance, rentabilité et profitabilité. Le désir est constamment suscité comme celui de réussir, lui-même induisant un besoin de reconnaissance et de récompense. Naît alors la notion du challenge et donc de mérite individuel. [...]
[...] En effet, aujourd'hui la société se mobilise au service de l'économie. Le modèle gestionnaire sert de référence à un monde qui se doit toujours plus productif et plus rentable. Famille. La famille se transforme en petite entreprise chargée de produire des individus autonomes, performants et employables. De l'enfance à la retraite, la gestion de soi devient une nécessité pour s'intégrer. Il est important d'être le plus performant possible en occuper, par exemple, ses temps libres de manière optimale. Ecole. L'éducation doit se mettre au service de l'économie pour satisfaire les besoins du marché de l'emploi. [...]
[...] Finalement l'idéologie gestionnaire devient la cause des problèmes qu'elle est censée traiter. Le monde managérial, sous l'influence de l'idéologie gestionnaire, devient de plus en plus contradictoire : par exemple, on demande aux salariés de travailler en équipe mais on les évalue individuellement. Le monde managérial n'est plus un engagement réciproque qui règle les rapports entre l'individu et l'organisation : si l'entreprise va mal, le salarié n'a qu'à s'en prendre qu'à lui-même, s'il est licencié c'est qu'il n'a pas été bon. [...]
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