« Intégration sociale», « égalité des chances », « assimilation », « diversité »… Ces termes rapportent à un même enjeu qui fait aujourd'hui débat dans notre société: la discrimination positive.
Le mot « discriminer » n'a a priori aucun sens péjoratif puisqu'il désigne simplement le fait de séparer ou discerner, ce qui est en soit tout à fait louable. Savoir distinguer un homme courageux d'un lâche, le permis de l'interdit ou encore un chef d'œuvre d'un barbouillage est traditionnellement une qualité.
Il se trouve cependant que par un glissement sémantique, le terme de discrimination a acquis une signification essentiellement péjorative désignant des distinctions arbitraires et mal fondées. Dès lors, une discrimination devient une sélection négative préjudiciable à celui qui la subit au point d'être moralement et juridiquement condamnée: si l'on prend la définition du Code pénal français, « c'est le traitement défavorable dont sont victimes les personnes vulnérables en raison de leur appartenance à un groupe défini par une caractéristique particulière ». C'est ce qui résulte clairement de la politique actuelle dite de « lutte contre les discriminations ».
Cependant aujourd'hui on parle de « discrimination positive »: cela n'a a priori pas de sens puisque ça nous amène à reconnaître un caractère positif à ce contre quoi on prétend lutter! La politique de discriminations positives amène donc à faire des distinctions en faveur de certaines catégories de personnes jugées plus défavorisées que les autres en raison de caractères territoriaux, sociaux, sexuels, économiques ou ethniques. Née aux États-Unis sous le nom d'« affirmative action » dans les années 60 et 70 pour favoriser l'intégration des minorités noires et hispaniques, elle donne la priorité à certains groupes grâce à un système de quotas ou de places réservées. En France, il existe des mesures de discrimination positive mais les critères ne sont jamais religieux ou ethnique au nom du principe politique de cécité des pouvoirs publics vis-à-vis des différences innée ou héritée qui touchent les individus; les discriminations positives se basent uniquement sur des critères territoriaux ou socio-économiques.
Se demander si les différents types de discriminations positives aujourd'hui mises en œuvre peuvent être légitimes revient tout d'abord à se demander si ces traitements préférentiels en faveur de certaines minorités jugées défavorisées sont conformes à la loi.
Mais cela revient également à considérer un aspect différent du terme « légitime » qui nous amènerait à nous demander si la discrimination positive peut être justifiée, admise par une société afin d'atteindre les buts qu'elle recherche.
Nous allons voir que cette politique de discrimination positive est bien souvent contestée car elle amène une forme d'injustice: en ce sens elle apparaît être illégitime et injuste puisqu'elle repose sur des privilèges accordés à certaines catégories jugées plus défavorisées que les autres.
Malgré tout, il ne faut pas en rester à un pur aspect comptable des privilèges accordés, étant donné que les bénéficiaires des mesures de discriminations positives partent avec justement une dotation de départ bien plus faible que celle des autres. En ce sens, cette politique se trouve justifiée puisque l'égalité des droits reste aujourd'hui très théorique et ne correspond pas à la réalité…
[...] Les conditions pour que la politique de discriminations positives ne dérive pas en un système de privilèges injustifiés pour certaines minorités Le principe consiste donc à appliquer, dans des domaines précis, les principes de la discrimination positive uniquement pour réduire les inégalités de départ, sans toutefois que ces discriminations juridiques ne deviennent permanentes même une fois l'objectif visé atteint, afin de parer aux risques d'accoutumance à de tels passe-droits et à l'irresponsabilité qu'ils produisent. Pour rendre une telle politique de discriminations positives acceptable aux yeux de la société, il est important que deux critères soient respectés: - le premier est que cette politique de privilèges inégalitaires reste transitoire. Assister de façon permanente les populations jugées inaptes à s'en sortir sans aide spécifique à leur situation serait une atteinte à leur dignité puisque cela reviendrait à les considérer comme des assistés n'ayant pas la possibilité de s'assumer par eux-mêmes. [...]
[...] C'est donc par le biais d'examens que sont départagés les candidats. Mais l'instauration de places réservées à des minorités défavorisées dans les grandes écoles peut créer de l'injustice dans le sens où ces places auraient été occupées par d'autres candidats sans doute plus compétents, mais ne possédant pas ce qui représente désormais l'« avantage d'appartenir à l'une de ces minorités. De plus les discriminations positives effectuées pour lutter contre les inégalités atteignent parfois des buts tout autres que ceux à la base visés. [...]
[...] Le problème de la stigmatisation des bénéficiaires des mesures de discrimination positives est un autre inconvénient malheureusement bien réel. On le voit notamment par la réticence des employeurs envers les individus provenant de ZEP. Dans de telles situations, l'effet recherché est donc inverse : ces mesures se retournent contre les populations concernées en instillant le doute sur leurs résultats ou compétences. Pourtant la discrimination positive cherche au contraire à rompre avec la spirale de l'échec en instaurant une réelle égalité des chances, et non à créer des ghettos ethniques et sociaux. [...]
[...] Durant le temps qu'il lui faut pour faire dix mètres, l'autre en a déjà parcouru cinquante. Comment rectifier la situation ? Doit- on simplement délivrer le premier coureur et laisser la course se poursuivre, en considérant qu'il y a désormais "égalité des chances" Pourtant, l'un des coureurs a toujours quarante mètres d'avance sur l'autre. Est-ce que la solution la plus juste ne consisterait pas plutôt à permettre à celui qui était attaché de rattraper son retard ? [ ] Ce serait là agir concrètement dans le sens de l'égalité." Cette citation est bien démonstrative du problème majeur que pose la nécessité de l'égalité entre citoyens : en effet traiter chacun de la même manière ne reviendra qu'à transposer les différences entre individus, car les plus défavorisés ne pourront sortir de l'impasse que grâce à une attention portée à leur situation particulière. [...]
[...] En ce sens, une discrimination positive serait donc un passe-droit reconnu aux membres de catégories ethniques, culturelles ou sexuelles ayant réussi à se forger un statut de victimes dans notre société. Dans notre pays depuis la Révolution, de nombreux textes garantissent cependant l'égalité de tous sans discriminations, qu'elles soient positives ou négatives: pour démontrer cela, nous pouvons citer de nombreux textes constitutionnels : - article 1er de la Déclaration de 1789 : Les hommes naissent libres et égaux en droits. [...]
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