L'erreur, par le discours qu'elle provoque, par le message qu'elle envoie, par les repères qu'elle crée, est bel et bien le principal vecteur de la communication sur ce qui façonne pour l'essentiel la relation didactique: enseigner, apprendre ... et montrer que l'on sait. L'analyse de l'erreur en didactique est quelque chose de récent. Il y a eu tout d'abord dans les années 50/60 l'analyse contrastive, qui est une approche behaviouriste. L'hypothèse dite forte de cette méthode nous vient de Robert Lado. Elle se réfère à une théorie de l'interférence selon laquelle les individus tendent à transférer dans la langue étrangère les caractéristiques formelles et sémantiques de leur langue maternelle et selon laquelle ce qui est similaire est facilement transféré, donc facile à apprendre tandis que ce qui est différent donne lieu à un transfert négatif, ou interférence, et donc à des erreurs qui sont les manifestations des difficultés d'apprentissage. On part de structures profondes présumées communes aux deux langues pour remonter aux structures superficielles en spécifiant à chaque niveau intermédiaire, en terme de règles particulières, différents ordres de différences ou de similitudes entre les langues confrontées. L'application pédagogique reste cependant difficile et ces analyses n'ont qu'un rapport indirect avec les processus d'apprentissage et d'enseignement. Elles excluent la dimension cognitive du langage : ce qui est transféré ne relève pas seulement du savoir-faire, des habitudes verbales et des structures linguistiques mais fondamentalement de l'expérience langagière et cognitive intériorisée par l'individu. Cela dit, il n'y a pas de réelle invalidation du principe de l'analyse contrastive de deux langues, mais il faut dire que ni l'analyse contrastive, ni le transfert de la langue maternelle ne suffisent à rendre compte des erreurs rencontrées dans l'apprentissage, ni a fortiori à les prévoir. Du fait de cette faiblesse se développe dans les années 60 l'analyse des erreurs à proprement parler, d'abord envisagée comme complément ou substitut aux analyses contrastives. Elle compense l'impossibilité ou la difficulté d'analyses contrastives dans le cas de langues maternelles inconnues des enseignants et dans le cas de publics plurilingues (en Afrique par exemple). Pour le français, les premières analyses ont été réalisées en Afrique. On pose alors la diversité et la complexité des causes potentielles des erreurs. Pour Corder, l'apparition d'erreurs est un phénomène naturel, inévitable et nécessaire. Cependant, on peut se demander quel est l'intérêt de l'erreur, comment en parler, l'utiliser ou l'enrayer s'il le faut ? C'est la question de son statut dans l'apprentissage et dans l'enseignement. Pour tenter d'y répondre, il semble intéressant d'étudier le premier cadre de l'erreur : l'erreur comme transgression de la norme, puis son second, l'erreur et le problème de la décision, ensuite la réaction de l'enseignant face à l'erreur et enfin les liens entre élève, erreur et problème.
[...] On le voit, l'erreur a ici un sens passif : elle apparaît comme "un défaut de conformité". L'erreur "mesure d'écart" va donc seulement concerner, dans la relation didactique, la partie publique du rapport au savoir de l'élève, celle qui se montre à tous. Centrée sur des produits, elle va jouer un rôle non négligeable dans le positionnement des élèves dans la classe et dans l'image que l'enseignant se fait d'eux. Néanmoins, ce type d'erreur ne pourra jamais prétendre fournir à quiconque -enseignant ou élève - des informations concernant l'activité réelle de l'élève au travail, les procédures qu'il met en oeuvre et les processus qu'il active. [...]
[...] S'il y a risque de punition, l'élève peut effectivement faire plus attention, mais la peur peut également entretenir un phénomène inverse, d'oubli par exemple ou de manque de précision. L'enseignant doit tenir compte des causes psychologiques de l'erreur pour mieux les comprendre et aider l'apprenant à dépasser l'erreur. C'est là qu'il doit également distinguer différentes sortes d'erreurs : erreur systématique et non systématique. Les erreurs systématiques sont des manifestations de la compétence transitoire d'un apprenant. Elles sont représentatives d'un système intériorisé (grammaire), c'est-à-dire de l'existence de règles et de la nature des ces dernières. [...]
[...] En présence de l'erreur, on est donc ici invité à mesurer un écart, évaluer une différence, entre le produit attendu et la production de l'élève. Les attitudes envers l'erreur, liées à des représentations socio- culturelles et idéologiques, souvent négatives et péjorativement connotées. Elles débouchent alors, côté enseignant, sur des pratiques directives, voire coercitives, et sur une sanction négative de l'évaluation et de la certification des acquis. Côté apprenant, elles débouchent sur des inhibitions ou des stratégies pour éluder dans les productions orales (il faut que je je dois partir) ou écrites (ratures, surcharges). [...]
[...] Un apprenant ne peut corriger ses erreurs car elles sont représentatives de sa grammaire intériorisée, mais il peut corriger ses fautes, car elles sont imputables à des lapsi, à la fatigue ou à diverses causes psychologiques (les autocorrections spontanées sont des traces de ces fautes). L'enseignant peut aussi provoquer une erreur (cf. questions pièges) pour montrer aux apprenants où se situent les points pouvant donner lieu à une erreur, afin que ces derniers s'en souviennent. Ils s'en souviendront si le moyen de provoquer l'erreur a pu les marquer. [...]
[...] C'est le problème de la capacité ou non de l'apprenant à déterminer si son erreur appartient au domaine de la morphologie, de la syntaxe ou du lexique quand il est seul face à son erreur. Il faut que l'étudiant connaisse la catégorie de son erreur pour pouvoir la corriger. Parfois, il y a des problèmes de discrimination. Exemple : mit dem Regen/mit der Regen : erreur de déclinaison ou de genre ? Soit l'élève a mis le déterminant au nominatif masculin singulier (erreur de déclinaison), soit il l'a mis au datif féminin singulier (die Regen parce que la pluie) et c'est une faute de genre. [...]
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