La hausse des prélèvements obligatoires décidée par le gouvernement Ayrault – et notamment la contribution exceptionnelle de solidarité de 18% devant s'appliquer aux revenus d'activité excédant un million d'euros (pour un taux d'imposition marginal total à 75%) – a fait ressurgir dans les débats parlementaires le spectre de « l'imposition confiscatoire ».
Le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 29 décembre 2012 relative à la loi de finances rectificative pour 2012, a censuré cette contribution exceptionnelle. Néanmoins, le grief retenu par les Sages était la rupture de l'égalité devant les charges publiques : ladite contribution, qui avait été établie « dans la continuation de l'impôt sur le revenu » n'était pourtant pas conjugalisée.
[...] Néanmoins, il est souvent oublié que la multiplication des régimes d'exception compense cette pression, certes de manière inoptimale, voire anticonstitutionnelle au regard des griefs d'inégalité devant la charge publique portée contre certaines exonérations de l'ISF. Le caractère confiscatoire de l'impôt ne peut actuellement pas être apprécié globalement. Ainsi, système fiscal est trop fracturé pour apprécier le caractère confiscatoire de l'impôt, car il est difficile d'estimer le taux effectif d'imposition des contribuables. Cette absence de visibilité rend nécessaire une simplification du système fiscal, si les législateurs ou magistrats ont pour but de définir un seuil confiscatoire réel. [...]
[...] De plus, comme la décision Vigneron le montre, l'Impôt de solidarité sur la fortune (ISF) est le plus directement concerné par le risque de dérive confiscatoire, et ce à cause de ses règles particulières d'assiette. En effet, l'ISF n'impose pas les revenus tirés du capital, mais le capital lui- même : son assiette est constituée par la valeur nette du patrimoine de l'assujetti. Le choix de ce mécanisme d'imposition présente un caractère indiscutablement confiscatoire lorsqu'il capte l'ensemble des revenus annuels d'un contribuable, portant fondamentalement atteinte à leur situation financière Ce cas de figure peut notamment se présenter pour les contribuables ayant hérité d'un bien immobilier avant l'explosion des prix dans les zones A et B1. [...]
[...] Néanmoins, aucune des jurisprudences du Conseil constitutionnel n'attribue un seuil minimum à ce caractère confiscatoire. L'imprécision des jurisprudences et des articles afférents ne rend toutefois pas impossible une définition du caractère confiscatoire de l'impôt Cette absence s'est en effet manifestée dans les délibérations du Conseil sur la loi de finances pour 2013 : l'article instituant une nouvelle tranche marginale à 45% de l'IR, a été jugé conforme à la Constitution ; néanmoins, d'autres mesures, telles que les taux d'imposition marginaux des retraites chapeau où les nouvelles impositions de stock options et PV (Articles 11 et 15) avec des taux marginaux d'imposition supérieurs à 70% ont été révoquées. [...]
[...] Cette recommandation, certes non liante, du Conseil d'Etat soulève toutefois la question de la légitimité voire de la capacité de magistrats non élus à se prononcer, et encore plus à légiférer, sur le caractère confiscatoire de l'impôt (cf. débat sur le gouvernement des juges Celui-ci est en effet une appréciation éminemment subjective, politique, voire temporelle. Le législateur est le seul à même de juger de la pertinence d'un taux d'imposition : son plafond doit donc être inscrit dans la loi, et non dans la jurisprudence. [...]
[...] Ce mécanisme de plafonnement a des effets limités : outre le fait que les magistrats tendent à contrôler la qualité normative plutôt que l'efficacité économique d'une mesure fiscale, les plafonds nominaux qu'ils jugeraient non confiscatoires auraient une valeur seulement symbolique. En effet, les taux nominaux d'un impôt, et notamment de l'ISF, ne prennent pas en compte réductions d'impôts et divers abattements. De même, ces plafonds sont calculés hors impôts indirects, comme la TVA (qui capte selon Thomas Piketty 11-12% du revenu d'un foyer moyen) ou certains prélèvements obligatoires. Il semble clair que les magistrats n'ont pas la capacité de construire un seuil maximum d'imposition effective. [...]
Source aux normes APA
Pour votre bibliographieLecture en ligne
avec notre liseuse dédiée !Contenu vérifié
par notre comité de lecture