Depuis la récession de 1993, la France, comme la plupart des pays industrialisés, s'est lancée dans un mouvement de réduction des charges sociales, principalement à destination des bas salaires. Les exonérations de cotisations sociales patronales sont alors devenues un instrument majeur des politiques publiques de l'emploi : huit réformes majeures se sont succédées, quarante-six mesures se sont empilées, selon la Cour des comptes (recensement du 1er septembre 2005). D'après l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (Acoss), le montant des exonérations de charges est passé de 3 milliards d'euros en 1993 à plus de 25 milliards d'euros en 2007. Le dispositif des baisses de charges semble donc incontrôlé, d'autant que son impact sur l'emploi est particulièrement contrasté. Souvent présenté comme un ensemble de mesures permettant de baisser le coût des travailleurs peu qualifiés afin de réduire leur exposition au chômage, cette présentation mérite toutefois d'être nuancée au vu des différents objectifs poursuivis. Si les politiques d'allégements de charges ont tendu à abaisser le coût relatif du travail, leur impact sur l'emploi reste difficile à quantifier et le bilan demeure relativement incertain. Dès lors, l'Etat a-t-il encore intérêt à poursuivre ces politiques d'allégements de charges, alors que ces mesures lui coûtent une fortune et ont tendance à tirer les rémunérations vers le bas ? En fait, la baisse des charges sociales sur les moins qualifiés poursuit d'autres objectifs que la lutte pérenne contre le chômage. Les effets sur l'emploi qui en résultent sont donc très contrastés et appellent à un autre usage des allégements de charges.
[...] Les effets sur l'emploi qui en résultent sont donc très contrastés et appellent à un autre usage des allégements de charges. I Depuis 1993, les gouvernements successifs ont pris en charge une partie de plus en plus large des cotisations patronales dans l'espoir de baisser le coût du travail et d'enrayer la hausse du chômage Cette idée est un principe de base de la théorie néo-classique, mais est discutable dans les faits Selon Yannick L'Horty, les allégements de charges ont tous eu un caractère défensif. [...]
[...] Et cela va de pair avec la défiscalisation des heures supplémentaires, qui sous couvert de mettre la France au travail va surtout creuser le déficit et valoriser le travail de ceux qui en ont déjà un (et ce, dans un nombre limité de secteurs) ! Autrement dit, l'accroissement des heures supplémentaires risque de se faire au détriment de nouvelles embauches. Une fois de plus, cette nouvelle suppression de charges sociales ne sera pas destinée à résoudre le problème du chômage. Les effets sur l'emploi et sur les revenus de ce dispositif sont de nouveau très incertains. Le lien entre créations d'emplois et baisses de charges n'est pas donc pas évident. [...]
[...] Cela rejoint aussi le phénomène de liste d'attente dans l'emploi ou dit des surdiplômés En fait, ce sont les hausses du Smic, relativement fortes depuis 1993, qui ont contribué à ce tassement : ces hausses ne se diffusent plus sur l'ensemble des salaires et les allégements de charges accentuent ce phénomène. Ils constitueraient donc une trappe à bas salaire. En effet, ces mesures incitatives destinées à réduire le coût du travail dans les entreprises ont largement favorisé le développement des emplois à temps partiel ou peu qualifiés. Or, le coût d'un emploi peu qualifié, créé ou sauvegardé par les mesures d'exonération, est d'en moyenne euros par an, soit un montant proche du Smic à temps complet. [...]
[...] Ces politiques d'allégements de charges soulèvent d'abord la question de leur efficacité sur l'emploi. Après avoir repris quatorze études disponibles, L'Horty estime que le nombre moyen d'emplois non qualifiés créés ou sauvegardés est un peu supérieur à pour une enveloppe budgétaire de 5 milliards d'euros. Les allégements prouvent donc une certaine efficacité car ils ont permis d'enrayer l'effondrement des emplois non qualifiés en France. Depuis le milieu des années 1990, la part de l'emploi non qualifié dans l'emploi total ne diminue plus. [...]
[...] Et surtout, du point de vue macroéconomique, comme les allégements ont une efficacité bien incertaine sur l'emploi, le coût de ces mesures pour le budget est trop pénalisant. Il faut alors soit revenir à des exonérations limitées aux bas salaires (passer de 1,6 Smic actuellement à 1,3 Smic), soit limiter les allégements Fillon aux entreprises de moins de 20 salariés, ce qui pourrait permettre de faire jusqu'à 10 milliards d'économies, dans un pays où la dette publique dépasse les 64% du PIB. [...]
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