Depuis le début des années 1980, l'évolution de la dette malienne - et plus particulièrement la question de son allègement, opère comme un calque de l'évolution de la coopération instituée entre le gouvernement et les Institutions de Bretton Woods (IBW). Ainsi, la problématique de l'endettement du pays s'est-elle toujours exprimée en contrepoint de la stratégie promue par les IBW, laissant entrevoir l'évolution à la fois de l'idéologie portée en leur sein et des rapports de force entretenus avec les autorités du pays partenaire : la réduction de la dette au titre de l'initiative des Pays Pauvres Très Endettés (PPTE) renforcée, programmée à la fin 2000, était conditionnée à l'adoption d'un Cadre Stratégique de lutte contre la Pauvreté (CSLP) par le gouvernement malien (Bougoin et Raffinot, 2001).
Cette dernière conditionnalité a permis aux IBW de faire une pierre deux coups puisqu'elle faisait passer l'allègement de dette à la fois comme une mesure économique et comme une mesure sociale pro-pauvres. Toutefois en deux décennies, l'évolution apparente d'un discours promouvant d'abord une politique libérale de stabilisation macroénomique puis une politique plus interventionniste de lutte contre la pauvreté masque la continuité réelle d'une stratégie structurée autour de la conditionnalité, la dette agissant comme une soupape. Dès lors, il semble que l'endettement du Mali (ou de quelque autre pays en développement) n'a jamais été considéré en lui-même par les IBW puisqu'il aura fallu attendre vingt ans pour que ces dernières entament une analyse systématique de la dette. Le caractère conditionnel de la dette semble avoir toujours occulté sa dimension utilitaire, appauvrissant et privant la question de l'endettement de sa dynamique et de l'évaluation de son objectif fondamental. Dans ce cadre, les négociations successives (et néanmoins passionnées) portant sur les remises de dette n'ont pas aidé à recentrer le débat pour évaluer les capacités de l'endettement à se poser comme un outil de développement.
Pourtant, ce pour quoi le Mali s'endette, en plus d'être au cœur de la dynamique même de la soutenabilité de la dette, ne détermine-t-il pas également les grandes orientations de la politique économique et sociale ?
[...] Pour sa part le ratio Dette/PIB n'indique pas d'insoutenabilité. La conclusion que nous pouvons tirer de cette simulation est la résilience à la fois de la soutenabilité et de la solvabilité de la dette face à des chocs d'une ampleur importante et portant sur un secteur stratégique comme le coton. Dans notre simulation, cette résilience est d'autant plus frappante que la participation du secteur cotonnier dans le PIB a été surestimée environ au lieu de en moyenne). Par ailleurs nous constatons que si nous n'introduisons qu'un des deux chocs, la tendance reste la même. [...]
[...] Or, Comment évaluer et donc rendre compte de l'impact réel d'une diminution tendancielle du prix de la fibre de coton sur l'économie du Mali et donc sur sa dette? Si la soutenabilité de la dette semble être ici simplement chahutée et sa solvabilité reportée, les transmissions économiques et sociales d'un tel choc à tous les échelons de la filière (notamment par les variations du prix payer au producteur) peuvent à leur tour entraîner des chocs qui ne sont pas pris en compte dans l'analyse financière : la grève générale menée par les cotonniers en 2001 en est un exemple frappant. [...]
[...] Pour le dire autrement, à montants équivalents, il n'est pas évident que les revenus de l'Etat soient engagés de la même manière s'ils proviennent des recettes ou des dons. Le modèle Epargne-investissement (dont les entrées de capitaux sont déterminées par un déficit d'épargne) ne nous semble pas prendre en compte cette problématique essentielle. Modèle du TOFE : Dès-lors, le modèle du TOFE, qui fait varier le financement net de l'Etat en fonction des revenus perçus et des dépenses effectuées nous semble plus approprié au cas du Mali. [...]
[...] Nous formons ici l'hypothèse que le FCFA connaîtra une nouvelle dévaluation de 50% de sa valeur en 2020, se traduisant par un doublement de la charge de la dette en fin d'année. Figure 5 : Projection des ratios Dette/recettes et Dette/PIB avec une dévaluation de 50% du FCFA en 2020 - Analyse du scénario : Le doublement de la charge de la dette retarde la date de solvabilité (2060) mais ne détériore pas sa soutenabilité, autrement dit la qualité de la dynamique de l'endettement. [...]
[...] Des projections de la BCEAO montrent que l'initiative PPTE ne libèrera, pour le Mali, que 0,024% du PIB nécessaire sur la période 2000-2002 (Ibid.). La principale conclusion que nous pouvons tirer ici est que l'initiative PPTE correspond à un apport réel pour un pays comme le Mali qui a administré ses remboursements passés avec rigueur (la réduction de dette a permis l'embauche d'environ 3500 enseignants entre 1999 et 2000 (Bougoin et Raffinot, 2001) - mais se repose ici la capacité du management), toutefois cet apport sera très dilué puisqu'appliqué à l'échéancier de remboursement prévu dans les différents contrats de dette. [...]
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