Le procès qui s'est ouvert le mois dernier contre Vivendi Universal à New York après sept années d'instruction illustre les difficultés que peuvent éprouver les actionnaires minoritaires dans l'accès à l'information financière des sociétés cotées et le peu de moyens dont ils disposent pour apprécier la véracité des informations qui leurs sont données. Il est pourtant indispensable que chaque actionnaire puisse bénéficier d'une information complète et exacte sur la gestion des affaires sociales. Le droit à l'information apparaît en effet comme un corollaire indispensable au droit de vote en ce qu'il permet à l'actionnaire de comprendre la marche de la société et éclaire ses prises de position en assemblée. Il doit aussi lui permettre d'apprécier la santé financière de la société dans laquelle il a investi afin d'arbitrer en toute connaissance de cause ses choix de gestion patrimoniale. Ce droit à l'information de l'actionnaire recouvre alors une double réalité : il est le droit de recevoir l'information par la société et le pouvoir d'investigation et de recherche de l'information.
C'est dans ce contexte qu'a émergé le débat récent autour du gouvernement d'entreprise ou corporate governance. La transparence et la diffusion de l'information à tous les actionnaires constituent ainsi un des enjeux majeurs de cette doctrine.
Nous nous intéresserons uniquement aux sociétés cotées, c'est-à-dire des sociétés dont les actions ont été introduites sur une bourse de valeurs mobilières. L'information financière consiste en une information détaillée reflétant la réalité économique de l'entreprise. En France, comme dans la plupart des pays, il existe une obligation légale d'établir des comptes annuels, réguliers et sincères donnant une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l'entreprise. Nous montrerons en quoi celle-ci abreuve de plus en plus largement les actionnaires.
Cependant, le renforcement de l'information des actionnaires n'est pas sans poser quelques difficultés. L'étendue de l'information génère en effet un conflit entre, d'une part, l'intérêt des actionnaires pour lesquels la marche de la société doit être transparente, et, d'autre part, l'intérêt de la société qui doit pouvoir se protéger contre une information trop importante qui la mettrait à la merci de la concurrence et alourdirait son fonctionnement.
[...] Ce dernier est extrêmement touffu, notamment pour les sociétés cotées en devant contenir la rémunération des dirigeants, la prise en compte des conséquences sociales et environnementales de l'activité de la société, le tableau d'utilisation des délégations d'augmentation de capital, les opérations au sein du groupe de sociétés . Le rapport de gestion doit également comprendre une analyse objective et exhaustive de l'évolution des affaires, des résultats et de la situation financière de la société, notamment de sa situation d'endettement, au regard du volume et de la complexité des affaires. [...]
[...] L'intérêt de la société restreint donc le droit à l'information de l'actionnaire minoritaire, en sanctionnant l'exercice abusif par celui-ci de son droit à l'information. Conclusion : l'égalité entre actionnaires, un mythe du Code civil ? On peut conclure en affirmant que si l'évolution législative du début des années deux-mille s'est inscrite dans un processus de renforcement du droit à l'information de l'actionnaire, améliorant le contrôle par les associés de l'action des dirigeants et de la gestion de la société, il n'en demeure pas moins des inégalités persistantes. [...]
[...] Des règles ont en effet été instaurées afin de limiter l'application pratique de ce droit à l'information et de sanctionner les comportements abusifs des actionnaires dans l'exercice de leur droit. À cet égard, un petit actionnaire pourra beaucoup plus facilement être accusé d'abuser de son droit à l'information que celui ayant investi un montant important dans le capital de la société. Or, nombreuses sont les décisions jurisprudentielles ayant sanctionné l'exercice, par un actionnaire, d'une prérogative sociale dans un but autre que la poursuite d'un intérêt commun, tels l'intention de nuire, le désir d'entraver la bonne marche des affaires sociales ou la satisfaction d'un intérêt purement personnel. [...]
[...] Néanmoins, elle montre ses limites lorsque le droit à l'information de l'actionnaire se trouve confronté à l'intérêt social. L'appréciation de la pertinence de la réponse du président à la question préalable à la mise en œuvre de l'expertise de gestion est du ressort du juge, qui est confronté à la tension permanente qui existe entre le droit à l'information légitime de l'actionnaire et la protection du secret des affaires[9]. Dans les groupes de sociétés, l'opportunité de la demande d'une expertise de gestion concernant les opérations de l'une des filiales de la société mère doit être appréciée par le juge conformément à l'intérêt du groupe, qui est distinct de l'intérêt isolé de la filiale concernée par l'acte de gestion. [...]
[...] Il est pourtant indispensable que chaque actionnaire puisse bénéficier d'une information complète et exacte sur la gestion des affaires sociales. Le droit à l'information apparaît en effet comme un corollaire indispensable au droit de vote en ce qu'il permet à l'actionnaire de comprendre la marche de la société et éclaire ses prises de position en assemblée. Il doit aussi lui permettre d'apprécier la santé financière de la société dans laquelle il a investi afin d'arbitrer en toute connaissance de cause ses choix de gestion patrimoniale. [...]
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