Depuis une quinzaine d'années, le taux d'épargne des ménages en France est stable aux alentours de 15 à 16%. Cela signifie que les ménages épargnent environ 16% du PIB. Cette stabilité du taux d'épargne a accompagné une période de croissance molle comme l'affirme Jean-Paul Fitoussi et les ménages ont donc eu un comportement paradoxal, ou au moins inhabituel, car face à cette croissance molle, ils n'ont pas puisé dans leur épargne pour maintenir leur niveau de vie, mais ils ont continué à répartir de la même manière leur consommation et leur épargne.
Pour comprendre cette situation, il faut rechercher les causes qui expliquent l'évolution du taux d'épargne depuis le milieu des années 70 (depuis la crise économique, qui est venue perturber la croissance régulière de l'épargne qui avait dépassé les 20% à la veille du choc pétrolier). Les données statistiques montrent que la période 1975-2008 n'est pas homogène.
[...] Dans les années 70, les entreprises occidentales sont fortement touchées par le choc pétrolier qui conduit à un effondrement de leurs profits. Face à cette situation, la stratégie des entreprises s'est modifiée dans les années 80. En France, l'épargne des entreprises représentait 25% de l'épargne nationale en 1980 et 40% en 1990. Ce phénomène s'est retrouvé dans tous les pays industrialisés. L'origine de ce phénomène est à rechercher dans la désindexation des salaires du prix, dans la baisse régulière de l'impôt sur les bénéfices, dans la mise en œuvre d'une gestion plus flexible de la main- d'œuvre. [...]
[...] Dans une logique libérale, on peut en effet penser que les ménages comme les entreprises intègrent dans leur raisonnement que l'accroissement des déficits publics conduira à une augmentation des impôts ou à une inflation nécessaire pour financer l'endettement. Le déficit public se traduit par une hausse de l'épargne dans la mesure où les agents anticipent une perte de PA. En Europe, le passage à la monnaie unique s'accompagnant des critères du traité de Maastricht a fait croire aux ménages que le déficit ne pourrait durer et que les états allaient rapidement augmenter leurs recettes. L'arbitrage opéré par les ménages entre une épargne financière et non financière a eu un impact sur l'évolution du taux d'épargne des ménages. [...]
[...] Mais des changements institutionnels ont joué aussi sur le comportement des ménages depuis les années 70. Le développement dans les pays industrialisés de la protection sociale (sauf aux Etats-Unis) a favorisé la diminution de l'épargne de précaution. En France, on constate que la crise des années 70 correspond aussi au moment où les risques sociaux deviennent totalement pris en charge par l'Etat-Providence. Les ménages ont donc intégré l'idée qu'ils pouvaient compter sur la solidarité collective. Ce changement d'état d'esprit a favorisé la montée de l'endettement des ménages. [...]
[...] L'étude de l'inflation est donc nécessaire. On constate donc que si l'inflation peut conduire à court terme à phénomène de fuite devant la monnaie qui sera défavorable à l'épargne, le maintien d'une inflation régulière peut inciter les ménages à augmenter leur épargne. Les travaux de Pigou et de Patinkin montrent qu'une baisse des prix en augmentant la valeur réelle de l'encaisse des ménages provoquait une hausse de la demande et une baisse de l'épargne avait l'effet inverse en cas de hausse des prix (effet d'encaisse réelle). [...]
[...] La baisse des prix s'est maintenue, alors que le taux d'épargne s'est accru. L'effet d'encaisse réel semble avoir été inversé. Mais au-delà de cette évolution, on constate aussi que la baisse des revenus liée au maintien d'un fort chômage a produit une épargne de précaution. Dans les années 90, le chômage apparait aux agents comme un phénomène inéluctable et son maintien a joué sur les anticipations des ménages. En effet, ceux-ci ont intégré l'idée qu'une carrière ne pouvait s'effectuer sans arrêt, sans rupture, liée à des moments de chômage. [...]
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