1. En vous basant sur la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, explicitez la thèse soutenue par Olympe de Gouges.
Il s'agit de montrer que le combat d'Olympe de Gouges possède deux facettes, la libération civile et la libération politique de la femme. En pointant du doigt les nombreuses injustices subies par les femmes, dans leur nature même, donc d'un point de vue social (manque d'instruction, difficulté du labeur, contrainte du foyer, critique du mariage). Puis en militant pour des droits politiques (propriété, liberté, opinion, représentation), en complétant la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, elle questionne les principes de notre démocratie, les origines de la citoyenneté.
2. Comment la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne fait-elle valoir le caractère militant de l'écriture d'Olympe de Gouges ?
Ce sujet invite à contempler l'énergie combative qui se dégage de ses textes. Comme le déclare Michelle Perrot, « l'écriture fut pour elle surtout instrumentale, un cri protestataire, véhément. Elle avait le talent du manifeste »[1]. Olympe de Gouges s'implique totalement pour sa cause, à travers la forte présence du « je » dans son texte, l'usage provocant du tutoiement, l'interpellation directe des femmes. Elle utilise une éloquence audacieuse et parfois insolente pour attaquer et mobiliser. Ne se contentant pas d'écrire pour dénoncer, elle propose et se projette au-delà du combat. L'écriture est un véritable mode d'action.
- Quelle fut la position d'Olympe de Gouges en tant que femme au 18e siècle et jusqu'où s'étendit son combat ?
- La critique féministe (et son autocritique), commentaire de Olympe de Gouges, Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne, p.204-215
3. Après la lecture de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne d'Olympe de Gouges, pensez-vous que littérature et politique fassent bon ménage, qu'une oeuvre peut être utile pour défendre une thèse ou dénoncer des inégalités ?
L'histoire prouve que littérature et politique sont intiment liées, d'abord car les auteurs ont souvent offert aux gouvernants de les instruire à travers des textes moraux notamment (Machiavel, La Fontaine, Rabelais). D'autres ont usé de leur talent comme d'un instrument de combat pour anéantir doctrines et préjugés, servitudes et tyrannies (Voltaire, Hugo, Zola). Il en est ainsi d'Olympe de Gouges, qui ira jusqu'à payer de sa vie son engagement et qui restera longtemps ignorée. Au regard de son destin et face à la violence de la nature humaine, la littérature semble un bien piètre allié. Mais comment juger la puissance de la littérature ? Au nombre de cris étouffés à qui elle permet d'éclore ? L'impact instantané d'un texte peut être minime, certes, mais il faut le replacer dans le tempo intrinsèque aux écrits qu'est le temps long. C'est un travail de l'ombre, tout en douceur, qui transforme nos représentations, à l'image d'Olympe qui inspirera bon nombre de féministes au XXe siècle. Dès lors, la littérature peut être perçue comme un bouclier, un contre-pouvoir en politique.
4. En quoi l'oeuvre d'Olympe de Gouges est-elle caractéristique du siècle des Lumières ?
Il s'agit de montrer comment l'oeuvre d'Olympe de Gouges est guidée par la raison et par la science en vue d'une société plus juste. Croyant fermement au progrès humain, elle ne se contente pas de prêcher l'égalité des sexes, mais elle se bat également pour l'abolition de l'esclavage et la reconnaissance des plus démunis. Elle s'inscrit également dans la pensée des Lumières par son républicanisme (elle refuse le despotisme, tout en rejetant l'assassinat du roi), mais surtout par son universalité (liberté et égalité pour tout être).
5. « Elle voulut être homme d'État et il semble que la loi ait puni cette conspiratrice d'avoir oublié les vertus qui conviennent à son sexe ». Au regard de cette citation, affirmée par un journaliste après l'exécution d'Olympe de Gouges, quelle est la place de cette dernière dans la Révolution ?
Bien que Révolutionnaire convaincue (elle est proche des Girondins), Olympe de Gouges fait preuve d'une grande indépendance d'esprit. Elle ne se contente pas de dénoncer la précarité des femmes vis-à-vis des hommes, mais aussi leur oubli dans les projets révolutionnaires. Si les premiers temps révolutionnaires ont vu la participation féminine à la vie politique s'accroître, cette dynamique est stoppée nette en 1795 par une exclusion définitive des affaires politiques. Olympe voit ainsi sa proposition de seconder Malesherbes, qui était en charge de la défense du Roi lors de son procès, lui être refusée. Enfin, si la Déclaration vient compléter l'originale, ce n'est pas cet écrit qui la conduira à la guillotine. Il s'agit plutôt d'un manifeste intitulé Les trois urnes (1793), dans lequel elle rapporte les horreurs de la Terreur et s'attaque à Robespierre et Marat. Ses divergences de vues lui coûteront la vie.
6. Après la lecture de la Déclaration des droits de la femme et de la citoyenne d'Olympe de Gouges, selon vous, de quelles ressources dispose la littérature pour mener un combat contre les inégalités ?
Le combat en littérature s'apparente d'abord à la dénonciation, en nommant des responsables, en pointant du doigt les injustices, puis en exposant les rouages de l'asservissement et de l'exclusion. Ensuite, la littérature justifie ce combat par l'idéal qui le sous-tend, ici, l'égalité des sexes. Elle favorise, par l'argumentation indirecte, l'identification aux victimes ; elle permet d'exposer le profit de l'affranchissement des citoyennes pour la communauté. Enfin, elle cristallise la lutte dans la parole : en apostrophant vivement, en se basant sur une emphase belliqueuse, en envisageant l'après-combat.
7. La littérature a-t-elle le pouvoir de transformer nos regards ?
Il s'agit de montrer que, bien que tous ne possèdent pas une dimension universelle, les écrits littéraires ont le pouvoir de densifier l'existence, de rendre plus vivant et de bousculer nos représentations. Chaque livre contient en soi un message et invite à une prise de conscience. En optant pour une vision critique de la société, les écrivains, qui sont réellement enracinés dans leur époque, favorisent un recul nécessaire à l'indépendance d'esprit. Chez Olympe (qui s'est formée en autodidacte grâce aux livres), cela se perçoit dans son rejet d'un remariage afin de se consacrer à la littérature et de préserver sa liberté d'écriture. Finalement, la littérature précède et inspire l'action.
8. Comment Olympe de Gouges s'émancipe-t-elle de sa condition féminine ?
Il convient de bien connaître la vie de l'auteur pour répondre à cette question. Olympe est originaire de Montauban et comme pour beaucoup de compatriotes d'alors, l'occitan est la langue habituelle, au détriment du français. Qu'à cela ne tienne, elle décide de l'apprendre et prend goût à s'instruire en autodidacte ! Mariée très jeune à un homme de trente ans son aîné, elle s'enfuit pour Paris dès que ce dernier meurt, avec son fils. Elle mène alors une vie de courtisane, de femme galante, ce qui était encore associé à de la prostitution de luxe. Jugeant son éducation insuffisante, elle multiplie les rencontres avec les artistes, politiques, philosophes, et prend part à de nombreux Salons (Cercle social, où ses prétentions intellectuelles font parfois esclandre. Elle s'arroge ensuite le droit de pénétrer dans deux univers exclusivement masculins que sont la politique et la littérature, au point qu'elle sera la première femme à passer sous la guillotine en raison de ses publications politiques. Finalement, Olympe de Gouges fait en sorte de se libérer elle-même de tout carcan, avant de pouvoir aider les autres femmes à changer leurs conceptions et se défaire des clichés qui les emprisonnent.
9. À la lueur de vos cours et de vos lectures personnelles, décrivez la postérité d'Olympe de Gouges, quel héritage laisse-t-elle au monde ?
Il s'agit de montrer la grande modernité d'Olympe de Gouges, comme précurseur en termes de féminisme. Si ses écrits demeurent dans l'ombre un certain temps (près de 200 ans), ils sont remis au goût du jour après la Seconde Guerre mondiale, particulièrement en Allemagne et aux États-Unis. En France, ses ouvrages sont republiés pour la première fois en 1986, par Benoîte Groult. Mais son sacre définitif a lieu pour le bicentenaire de la Révolution, lorsqu'elle est proposée pour entrer au Panthéon.
10. « Ô femmes ! Femmes, quand cesserez-vous d'être aveugles ? », dans quelle mesure cette citation tirée du Postambule est-elle caractéristique de l'oeuvre d'Olympe de Gouges ?
Il convient de montrer qu'Olympe cherche avant tout à faire changer les femmes elles-mêmes, en se faisant leur porte-voix (la Déclaration était adressée à la reine Marie-Antoinette) et afin de créer une réelle communauté de combattante, une sororité. Elle commence donc par les apostropher avec audace et par dépeindre avec sévérité le caractère manipulateur, rusé et dangereux des femmes de son époque.
[1] Michelle Perrot, Des femmes rebelles, Elyzad, 2014, 224p.