Maupassant, né le 5 août 1850 et mort en 1893 est ainsi l’un des auteurs majeurs de cette période, s’inscrivant dans les courants réaliste et naturaliste. Le premier est un genre illustré notamment par les nouvelles, relatant des faits de vie au sein d’une société dans sa globalité, en passant par des éléments tels que les classes sociales, ou les conventions de la vie de famille de l’époque. Le naturalisme quant à lui, cherche également à réaliser une représentation la plus fidèle possible à la réalité, tout en y intégrant des aspects liés à la nature, tels que le temps, ou encore l’impact de saisons. Dans l’oeuvre de Guy de Maupassant, divers thèmes peuvent être relevés comme récurrents, à l’appui des messages qu’il souhaite transmettre. Notamment, de nombreuses nouvelles et autres romans cherchent à dépeindre une réalité quotidienne d’un personnage clé, à travers son ascension ou, plus souvent, sa déchéance en termes de classes sociales et de niveau de vie, mais également une dimension romantique notable qui s’inscrit dans ses oeuvres, la plupart du temps sous un angle très négatif, démontrant le pessimisme que l’auteur souhaite exprimer vis-à-vis de la vie humaine.
I. L’intrigue du roman
1- Jeanne, un personnage incarnant le standard féminin du siècle
« Une vie », également dénommé « L’Humble vérité », est le premier roman de Guy de Maupassant, écrit et paru en 1883. Dans cette oeuvre, l’auteur s’attèle à réaliser une représentation de la société, par le point de vue de la place des femmes au XIXe siècle au coeur de celle-ci. Pour ce faire, Maupassant va relater l’histoire de Jeanne, le personnage principal du Roman, qui représente alors la femme moyenne dans cette société, issue d’une classe sociale relativement élevée, et pleine de rêves et d’espoir, mais qui va finir par connaître de nombreux échecs, dont une importante déchéance de classes sociales, la conduisant à un profond défaitisme. D’après la description qu’en fait l’auteur, la société française du XIXe siècle est un lieu où priment des considérations financières et de l’apparence de chacun, avant même de considérer la moralité et les relations humaines. Ainsi, il s’agit d’un cadre dans lequel la lutte des classes et la recherche de l’ascension sociale et du gain financier sont au premier plan, en parallèle à l’inégalité des sexes et à la place subalterne des femmes dans la société dans de nombreux domaines.
2- L’utilisation du réalisme et du naturalisme
Les courants dans lesquels l’oeuvre de Guy de Maupassant s’inscrit influencent largement la façon dont celui-ci procède pour décrire la vie de Jeanne, notamment en confrontant le lecteur à un portrait fidèle à la réalité, dans lequel il est facilement possible de se projeter, notamment du fait de l’inspiration des sciences humaines et des mouvements de la nature de ce cadre. Le portait de Jeanne réalisé par l’auteur est ainsi un portrait ancré dans un profond réalisme, également influencé selon certaines analyses par la vie personnelle de l’auteur, cette dernière sombrant dans la folie, à l’image de la mère de celui-ci, dont le portrait était similaire à celui de Jeanne sur de nombreux points. La dimension personnelle de l’oeuvre de Maupassant est ainsi importante en ce qu’elle influe sur certains éléments du roman, notamment sur les thèmes récurrents retenus par l’auteur, et surtout celui de la place de la femme, s’inscrivant dans la continuité de son enfance, ayant été éduqué sans son père. Jeanne représente également tout au long du roman, une sorte d’héroïne féminine, qui tente de combattre la société et de se délier des conventions sociales, ce qui se soldera toutefois par une succession d’échecs. L’histoire du roman étant orientée autour du portrait et de la vie de Jeanne, le genre peut également être qualifié de biographie fictive, dont le réalisme est tel que le lecteur pourrait confondre celui-ci avec une réelle biographie personnelle de l’auteur ou de sa mère.
II. La représentation de la société faite par Maupassant
1- Les personnages constituant le microcosme d’ « Une vie »
Guy de Maupassant retrace dans ce roman la vie d’une société typique du XIXe siècle, à travers différents rôles, tels que celui du patriarche, de la femme détenant une position secondaire vis-à-vis de ce dernier, et d’autres classes sociales diverses. Les personnages mis en action pour dépeindre la trame du roman sont tout d’abord Jeanne le Perthuis des Vauds, l’héroïne, que l’auteur décrit comme une jeune femme naïve, qui va être confrontée à de nombreux échecs, sombrant dans le pessimisme et la folie. Au cours du roman, cette dernière rencontre Julien de Lamare, et l’épouse, pensant trouver avec lui un amour réel et profond, mais cela ne se réalisera pas puisque Julien se révélera être infidèle et intéressé, représentant l’archétype du patriarcat, très fréquent à l’époque. Jeanne et Julien ont un fils, Paul, qui est un personnage ambigu et complexe à cerner en ce qu’il détient des liens étroits avec Jeanne, mais que son attitude lui porte également préjudice, et engendre certains des malheurs de celle-ci. Enfin, le roman intègre le personnage du père de Jeanne, le Baron Simon-Jacques Le Perthuis des Vauds, et Rosalie, la servante de la famille, qui sera renvoyée suite à la découverte des relations qu’elle entretenait avec Julien, le mari de Jeanne.
2- Des thèmes réalistes rapprochant le lecteur de l’histoire
L’histoire de Jeanne, contée par Guy de Maupassant à travers ses différentes expériences, sa quête de l’amour romantique, puis ses déceptions amoureuses, sociales et familiales, rendent compte des thèmes mentionnés au préalable, qui sont souvent abordés par l’auteur dans ses oeuvres, et qui se rattachent à la description fidèle de la société dans laquelle il a évolué, tout comme les personnages qu’il présente ici. Le premier thème central de « Une Vie » est celui de l’amour et de la désillusion. Le portrait fait de Jeanne dès le début du roman la présente, naïvement en quête d’un amour parfait, qu’elle pense découvrir avec Julien, mais qui la conduira une fois de plus à une grande déception. À travers cet élément, Maupassant développe une vision pessimiste de l’amour, et fait quasiment la critique de celui-ci, et des instincts naïfs, poussant souvent à une grande déception pour l’héroïne. Cela aboutit alors à un lien avec le second thème majeur, qui est celui du pessimisme et de la négativité, puisque la vie de Jeanne, le personnage principal, ainsi que celle des autres personnages constituant la société, est représentée comme un enchaînement d’échecs et de déceptions, passant par exemple pour Jeanne par son mariage raté, puis par sa déchéance sociale. En outre, Guy de Maupassant, en s’inscrivant dans les courants naturaliste et réaliste, élabore une forme de critique détournée des conventions sociales en place au cours du XIXe siècle, notamment celles concernant le rôle des femmes, puisque Jeanne y est représentée comme un personnage plus faible malgré sa place centrale, naïve et recherchant un amour inatteignable, tandis que son mari gère le couple sur le plan financier, et exerce une emprise sur cette dernière, allant parfois jusqu’à l’infantiliser. Maupassant critique également la société dans laquelle les personnages évoluent, sous l’angle des classes sociales, puisque les personnages finissent ici tous plus ou moins ruinés, faisant de l’argent un moteur essentiel de la société du XIXe siècle présentée ici.