Il fait partie des 5 poèmes dédiés au vin. Il se compose de six quatrains d'alexandrins soit six strophes de quatre vers chacun, contenant 12 syllabes. Les alexandrins sont construits en hémistiches égaux de 6 pieds avec des rimes croisées, soit qui s'alternent entre le féminin et le masculin. Ces 5 phrases sont complexes et de styles directs qui utilisent aussi bien la forme exclamative que celle interrogative en mélangeant les temps présents, futurs avec les modaux, les infinitifs et les participes. De cet usage, il donne « parole et âme » au vin comme premier paradis artificiel. Il le personnifie et en fait l'éloge.

 

1er quatrain

La première strophe pose le décor comme lorsqu'on narre une histoire. Il est fait allusion au « soir », moment propice à la boisson qui chante pour accompagner l'enivrement des buveurs, ainsi qu'aux louanges des récipients qui le contiennent. Le poète donne vie, âme et parole au vin qui s'adresse à son « cher » buveur comme un ami qui a besoin de réconfort par le mot « déshérité ». Il se pose comme un incontournable de la « fraternité » qui souhaite sortir de sa bouteille, considérée comme une « prison » pour aller à la rencontre des bons vivant qui chantent. La tonalité est douce, donne un effet de bienveillance avec son « chant plein de lumière »

 

2e quatrain

Le vin se fait toujours doucereux et manie l'art de la parole avec l'agilité d'un bon orateur. Il caresse dans le sens du poil ses auditeurs avec le registre de l'effort, en les remerciant de leur labeur à le faire « naître » à la « sueur » de leur « peine ». Il appuie sa présence et son voile de bienfaisance par sa volonté de ne « point » être « ingrat ni malfaisant ». Il souhaite leur insuffler que tous ses efforts seront récompensés.

 

3e quatrain

Le vin savant nous fait éprouver sa sensibilité et appelle les buveurs de ses bons sentiments. Il leur fait les louanges du privilège et de la « joie » de pouvoir les désaltérer après leurs durs labeurs et de se trouver un foyer, une « douce tombe » dans le coeur des hommes plutôt que de rester dans les « froids caveaux » où on l'entrepose. Ce qui est particulier est de parler de tombe et de caveaux, allusion à la mort pour une boisson sensée apporter joie, réconfort et gaieté. Mais à quelle mort ? Celles de buveurs ? Dans cet éloge, l'auteur met-il en lumière implicitement la désillusion du vin comme paradis artificiel, pas si bienfaisant au final ?

 

4e quatrain

Le vin continue ses louanges en se confondant avec les sensations et le corps du buveur avec « son sein palpitant ». Il continue avec la joie qui « gazouille » et refait allusion au chant de la première strophe avec « les refrains des dimanches » et évoque le contentement avec une vie trépidante, en mouvement. Il contraste avec la strophe précédente qui parlait de mort.  De plus, il fait allusion que retrousser ses manches n'est pas que pour la besogne, mais aussi pour chanter et boire.

5e quatrain

Le vin continue à se vendre comme magique en serinant que « sa femme » sera ravie et son « fils » vigoureux grâce à lui. Il joue sur les aspirations de l'être humain, le bonheur des siens, réussir à se hisser dans la vie qui est perçue comme une lutte de « frêle athlète de la vie » qui a besoin de son breuvage pour être « fort ».


6e quatrain

Le vin continue sa personnification et ses symboliques en se comparant à « l'ambroisie », boisson divine des dieux dotés de pouvoir. Pouvoir qui serait donné aux mortels qui s'en abreuveraient. Il se sacre lui-même comme « précieux » et donné « par l'éternel Semeur ». Il glorifie l'amour que se porte le vin et l'homme et que de cet amour, une « poésie » naîtra en retour vers « Dieu » comme un bien précieux, « une rare fleur ».  L'homme devient poète par le vin et ses pouvoirs qui ne sont pas fortuits, mais qui suit sa destinée, car « jeté par l'Éternel » comme amour de Dieu envers ses mortels. Ainsi, le vin est un cadeau dont « jaillira » la poésie qui naît de l'intérieur de l'être humain dans « sa chaude poitrine » du troisième quatrain. Le vin se personnifie en bienfaiteur qui se veut comme aide, dans un esprit « de fraternité », faisant palpiter l'espoir et la gloire.

 

Pour conclure, Baudelaire bien qu'il fasse l'éloge du vin, n'en abusait pas, c'était un amoureux du vin. Pour lui, le vin fait partie des exhausteurs de vie pour s'échapper, chasser le « spleen », s'enivrer de la vie en somme. Mais pas forcément s'enivrer de vin, mais de tout ce qui permet de se sentir en vie, sans être entravé par le temps, la vie, les fardeaux : le vin, la poésie, la vertu, qu'importe ! La vie se remplit de petites joies simples. Il le voit comme une bénédiction pour ses contemporains sans avoir paradoxalement expérimenté l'ivresse et tout en condamnant l'abus d'alcool dans son poème « le vin de l'assassin » qui tue sa femme pour boire sans reproche. Sa ferveur pour le vin vient sûrement aussi de sa position de défenseur des petits cafés et marchands de vin, lieux où il écrivit bon nombre de ses textes et où il rencontrait ses amis littéraires.


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