La mobilité sociale est un élément clé en sociologie. Il s’agit de la capacité pour un individu ou un groupe d’individus à changer de classe sociale. Il peut s’agir d’une mobilité intergénérationnelle, qui apparait lorsqu’un individu appartient à une classe sociale différente de celle de ses parents, ou d’une mobilité intragénérationelle, qui caractérise des mouvements de classe sociale durant la vie d’un même individu.
La mobilité sociale définit l’obtention d’une classe sociale différente, mais pas nécessairement d’une classe sociale meilleure, plus élevée, plus favorisée. Changer de classe sociale pour se retrouver tout en bas de l’échelle sociale est également considéré comme une mobilité sociale. Toute mobilité sociale n’est donc pas souhaitée ni souhaitable.

Nous verrons dans cette fiche comment se définit la mobilité sociale, quelles sont ses caractéristiques, puis quels sont ses facteurs et ses limites.

I. La mobilité sociale et ses caractéristiques

La mobilité sociale a été initialement décrite par Pitrim Sorokin, et définit la possibilité pour un individu de parvenir à une classe sociale différente de celle de ses parents, ou différente de celle dans laquelle il se trouvait plus tôt dans sa vie.
Par classe sociale, on définit notamment la catégorique socio-professionnelle à laquelle l’individu appartient, elle-même déterminée par l’emploi qu’il occupe.
Cette mobilité sociale se heurte à des barrières importantes : reproduction des élites, transmissions des capitaux (sociaux, culturels, financiers, économiques) des parents vers les enfants, difficulté pour l’école à assurer son rôle de socialisation et de mobilité sociale intergénérationnelle.
L’école, en effet, occupe une place importante dans les facteurs de mobilité. Mais elle ne peut être à elle seule un facteur suffisant, et ne parvient pas toujours à réduire correctement les inégalités ni à favoriser les mobilités sociales.

II. Les facteurs de la mobilité sociale

a. L’école, un facteur incontournable…

L’école de la République, instaurée par Jules Ferry, en 1882, a pour ambition première de permettre à tous les enfants de s’instruire. Les rêves de mobilité sociale et d’ascension sociale sont alors nombreux. L’école en France est désormais gratuite et obligatoire, ce qui permet à tous les enfants d’y avoir accès. Certains en étant jusqu’alors exclus, par manque de moyens financiers notamment, ou par volonté de leur famille n’y trouvant aucun intérêt. En bénéficiant d’une instruction minimale, en permettant la socialisation entre élèves de milieux sociaux souvent très différents, l’école permet parfois d’accélérer l’ascension sociale.
Le diplôme, quant à lui, est un élément important dans l’obtention d’un emploi et d’une position sociale. Aller à l’école, poursuivre ses études, sont donc des éléments favorables pour la mobilité sociale et l’ascension sociale.

b. … mais pas suffisant

Très tôt, des auteurs comme Pierre Bourdieu ont montré (dans les années 1960) que l’école ne suffisait pas à réduire significativement la reproduction des élites, et que l’ascension sociale potentielle demeurait limitée. D’après lui, les classes sociales favorisées ont plus de chances de réussites à l’école, et donc plus tard sur le marché du travail, et donc sur l’échelle sociale. Le capital social, le capital culturel, s’acquièrent à l’école mais aussi et surtout dans la famille, et l’école peine alors à réduire les inégalités.
Enfin, Anderson indique que le diplôme ne fait pas tout, et que l’on constate de nombreux cas de mobilité sociale descendante, pour des individus possédant pourtant un diplôme supérieur à celui de leurs parents. Ils obtiennent néanmoins une place moins élevée dans la hiérarchie sociale, et Anderson baptise ce mécanisme le Paradoxe d’Anderson.
La famille est un élément déterminant dans la position sociale d’un individu. On assiste le plus souvent à la reproduction des élites, notamment en raison de la transmission du capital social, culturel, mais également d’un engagement de capital financier dédié à la réussite des élèves. Ainsi, de ce fait, les mobilités sociales intergénérationnelles sont limitées. Seulement 2% d’enfants d’ouvriers accèdent aux grandes écoles, par exemple, contre 12% pour les enfants de cadres.

c. Et complété par d’autres facteurs

Nos sociétés et en particulier la société française, connaissent d’importantes évolutions sociales et sociétales. Les besoins en travaux primaires diminuent, alors que les besoins en emplois qualifiés ne cessent d’augmenter. Il convient en effet que les progrès technologiques, conjugués au déclin de l’industrie et de l’agriculture, viennent bousculer les échelles sociales valables jusqu’alors. L’étude de tables récentes de mobilité montre que seulement 2% des actifs sont désormais agriculteurs, quand ils étaient près de 10% dans la génération précédente. Ainsi, la mobilité sociale opère de façon quasi automatique, suite aux changements sociétaux. Enfin, l’accès des femmes à l’emploi accroit également cette mobilité. Bon nombre de femmes étaient inactives dans les premières décennies du XXème siècle, et leur entrée dans l’emploi marque nécessairement une ascension sociale importante. Dans la même trajectoire, seuls 5% d’élèves de la génération étaient bacheliers dans les années 1920, alors qu’ils sont plus de 75% aujourd’hui. La mobilité sociale ascendante résulte donc en partie des seules évolutions de la société.
Enfin, l’Etat participe à la réduction des inégalités sociales de par son rôle, par exemple en octroyant des bourses à certains élèves pour leur permettre de suivre des études en limitant le fardeau financier pour leur famille. Il peut également opter sous certaines conditions pour des mesures de discrimination positive, favorisant les élèves de milieux modestes pour les entrées dans certaines écoles notamment.

Nous avons vu dans cette fiche que la mobilité sociale peut être de plusieurs types : intergénérationnelle ou intragénérationnelle, selon qu’elle définit la mobilité par comparaison avec la catégorie socio-professionnelle occupée par les parents ou par celle occupée plus tôt au cours de sa vie. Dans tous les cas, la catégorie socio-professionnelle est un élément central qui définit le positionnement de l’individu au sein de la société. Elle est une donnée importante, car elle détermine également en partie les revenus, le niveau de salaire et donc le niveau de vie de l’individu. Pour la plupart des individus, les aspirations sont à la mobilité ascendante. En effet, ils aspirent à être mieux positionnés dans la société, mieux considérés, mieux rémunérés. Certains facteurs permettent de faciliter la mobilité sociale ascendante, comme par exemple l’école, la scolarisation, l’Etat avec des mécanismes de discrimination positive ou des systèmes de bourse pour les élèves, mais également par les évolutions sociales et sociétales du monde lui-même. En effet, la société évolue et se transforme en profondeur au cours des décennies, ce qui conduit à une certaine modification de l’emploi, de la structure de l’emploi, des métiers. En effet, les métiers exercés aujourd’hui ne sont pas du tout les mêmes que ceux exercés il y a un siècle, ni la place des femmes vis-à-vis de l’emploi, ni les besoins dans les secteurs. Toutes ces évolutions conduisent à une certaine mobilité sociale, et à une modification de la structure sociétale en profondeur. Mais la mobilité sociale n’est malheureusement pas un paramètre facile et rapide à gérer, et l’école, l’Etat, la société, peinent à réussir une pleine mobilité sociale pour toutes les classes sociales. Beaucoup demeurent encore dans la même catégorie sociale que leurs parents, notamment en raison du déterminisme social qui a été longuement documenté par Bourdieu.

SOURCES
Dissertation: Ecole et mobilité sociale(Bac ES-juin 2019) | Le Cahier de SES (wordpress.com)
Dissertation : Les déterminants de la mobilité sociale (xn--tudiant-9xa.es)